Près de cinq ans après sa chute, l'ancienne star de la police lyonnaise Michel Neyret comparaît depuis lundi devant le tribunal correctionnel de Paris pour corruption et trafic de stupéfiants aux côtés de huit autres prévenus. Il est accusé d'avoir franchi la frontière qui sépare "flics et voyous" en acceptant des cadeaux de membres du milieu en échange de services, et d'avoir détourné plusieurs kilos de résine de cannabis afin de rémunérer des informateurs. L'ancien numéro 2 de la PJ de Lyon, âgé de 60 ans et qui a déjà passé huit mois en prison, s'est dit "combatif", à son arrivée devant le tribunal, où il encourt dix ans de prison.
Aux côtés de Michel Neyret, ont pris place sept personnes, dont son épouse Nicole, un avocat et trois fonctionnaires de police. Un huitième prévenu est en fuite. Cet homme au physique d'acteur avait collaboré avec le cinéma, notamment pour le film d'Olivier Marshall "Les Lyonnais", qui raconte l'affaire du Gang des Lyonnais et dont un personnage de commissaire est inspiré de lui. "Sa ligne de défense reste: j'ai fait ça dans l'intérêt du service", explique Richard Schittly, auteur du livre "Commissaire Neyret, chute d'une star de l'antigang".
Michel Neyret s'inquiète que le justice ne fasse preuve de sévérité envers un homme longtemps présenté comme un modèle et est en même temps "pressé d'en finir et de s'expliquer", a expliqué l'un de ses avocats, Yves Sauvayre. Patron de la brigade antigang de Lyon pendant vingt ans, Michel Neyret a accumulé les succès dans ses enquêtes et fait tomber nombre de délinquants de haut vol avant d'être arrêté par l'IGS, la police des polices, en 2011. Les relations entre policiers et informateurs, toujours très complexes, sont au cœur du procès.
"TOUT LE MONDE ÉTAIT CONTENT"
"On ne fera pas l'économie d'un débat sur les méthodes de la police. Tout le monde était content des méthodes de Michel Neyret", a dit Yves Sauvayre, qui déplore une hypocrisie. Le dossier saisi à la direction de la PJ "témoigne d'un fonctionnaire de police tout a fait exceptionnel", lit-on dans l'ordonnance de renvoi devant le tribunal. Michel Neyret a reçu la Légion d'honneur pour ses états de service. Il va devoir s'expliquer jusqu'au 24 mai sur les liens amicaux qu'il entretenait avec l'une des figures du milieu lyonnais, Gilles Benichou, qu'il a décrit comme un "personnage attachant aux valeurs familiales fortes".
L'ancien policier est également soupçonné d'être intervenu auprès de policiers ou de magistrats pour informer des malfaiteurs de l'état d'une procédure, notamment. Le magistrat chargé de l'enquête a détaillé les cadeaux reçus par l'ancien policier ou son épouse Nicole: des séjours dans des hôtels de luxe au Maroc et à Cannes, notamment, deux montres de luxe, dont une de 30.000 euros, des sommes en liquide, des prêts de voitures, dont une Ferrari. Dans une écoute téléphonique versée au dossier, Nicole Neyret reproche à Gilles Benichou d'avoir "pourri" son mari.
L'épouse de l'ex-policier devra également dire devant le tribunal pourquoi elle s'est rendue à Genève avec Gilles Benichou pour créer une société et ouvrir un compte bancaire. Michel Neyret se voit également reprocher d'avoir récupéré de la résine de cannabis juste avant destruction afin de rémunérer des informateurs. Il a admis avoir sollicité, outre un membre de son service, d'autres fonctionnaires de police dans le cadre d'un "projet de fidélisation des informateurs".
(Gérard Bon, édité par Yves Clarisse)
2 Commentaires
Anonymere
En Mai, 2016 (17:51 PM)Anonymerew
En Mai, 2016 (18:03 PM)Participer à la Discussion