Neuf mois après la mort de George Floyd, qui a rouvert les plaies raciales en Amérique, le policier Derek Chauvin, accusé de l'avoir tué, se retrouve face à la justice. Son procès, qui débute lundi, à Minneapolis, s'annonce exceptionnel à tous les égards.
Un procès historique et sous haute tension s'ouvre lundi 8 mars à Minneapolis, dans le nord des États-Unis : celui du policier blanc qui a tué l'Afro-Américain George Floyd, le 25 mai dernier, et suscité un sursaut antiraciste dans le monde entier.
Ce procès très attendu doit débuter à 8 h (14 h GMT) par la sélection des jurés, mais d'ultimes débats sur la qualification exacte des charges pesant sur Derek Chauvin pourraient retarder la procédure.
Pour l'instant, cet homme de 44 ans, dont 19 au service de la police de Minneapolis, est inculpé de meurtre et d'homicide involontaire. Remis en liberté sous caution, il comparaîtra libre.
Le 25 mai, il était intervenu avec trois collègues afin d'arrêter George Floyd, soupçonné d'avoir utilisé un faux billet de vingt dollars pour s'acheter un paquet de cigarettes.
En pleine rue, et devant des passants effarés, Derek Chauvin était resté agenouillé pendant près de neuf minutes sur le cou du quadragénaire noir, menotté et plaqué au sol, bien que celui-ci ait lancé à vingt reprises : "Je ne peux pas respirer".
Ce furent ses derniers mots et ils sont devenus le cri de ralliement de millions de manifestants qui, alertés par une vidéo du drame, sont descendus dans les rues de Miami à Los Angeles, mais aussi Londres, Paris ou Sydney pour réclamer justice.
Passé raciste
La mobilisation, qui a ouvert un débat de fond aux États-Unis sur les méthodes de la police et le passé raciste du pays, s'est tassée à l'automne. Mais, à l'approche du procès, elle a repris à Minneapolis, où plusieurs rassemblements ont eu lieu ce week-end.
"Je crains d'être déçue, que Derek Chauvin ressorte libre", a confié Sicilya Knott, une étudiante de 20 ans, croisée dans un de ces cortèges. Elle compte se faire régulièrement entendre auprès du tribunal et espère "que les jurés prendront en compte la colère et la fatigue des communautés".
Les proches de George Floyd abordent aussi le procès avec appréhension. "Je veux que justice soit rendue", a déclaré à l'AFP son oncle Selwyn Jones, tout en exprimant sa méfiance envers un "système" qui, dans le passé, a souvent exonéré les policiers. Selon lui, si Derek Chauvin échappe à la prison, "les gens vont se déchaîner".
Par anticipation, la ville de Minneapolis, secouée par de violentes émeutes à la fin mai, a déjà renforcé son dispositif de sécurité et mobilisé des milliers de policiers et de soldats de la Garde nationale.
Des clôtures en béton et barbelés ont également été érigées autour du siège du gouvernement local qui abritera les audiences au sein d'un 18e étage inaccessible, sauf pour les protagonistes.
Verdict à l'unanimité
Compte tenu de l'énorme intérêt du public, le procès sera filmé et retransmis en direct dans tous les États-Unis.
Après les trois premières semaines consacrées à la sélection du jury, il entrera dans le vif du sujet le 29 mars.
L'accusation, qui aura la parole en premier, tentera de démontrer que Derek Chauvin avait "l'intention" de causer des souffrances, et qu'il ne s'agit pas d'une simple négligence.
Pour ce faire, elle s'appuiera sur la vidéo du drame : celle-ci montre que le policier a maintenu la pression sur le cou de George Floyd, même une fois celui-ci devenu inconscient et son pouls indétectable.
La défense soutiendra pour sa part que Derek Chauvin a agi conformément à sa formation et que le quadragénaire noir est mort d'une overdose au fentanyl. L'autopsie a montré qu'il avait consommé cet opiacé de synthèse mais identifié la "compression de son cou" comme cause de la mort.
Le jury devrait se retirer pour délibérer dans la seconde moitié d'avril. Son verdict devra être rendu à l'unanimité des douze membres.
Les trois autres policiers impliqués dans le drame, Alexander Kueng, Thomas Lane, et Tou Thao, seront pour leur part jugés ensemble en août.
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