(Correspondant) - Le Livre Blanc sur la défense et la sécurité nationale de la France ne va pas créer une révolution dans les rapports militaires entre la France et certains pays africains où ses forces armées sont pré-positionnées. En effet, la commission chargée de rédiger le Livre blanc en question dont le contenu a été rendu public hier, n’entrevoit pas le démantèlement des bases françaises africaines. Elle préconise plutôt une réorganisation, d’ailleurs plusieurs fois défendue par les plus hautes autorités françaises. En conséquence, les interventions tant critiquées ne vont pas non plus cesser, même si elles se feront beaucoup plus dans le cadre européen.
Tout de même, la France se réserve le droit d’intervenir solitairement si ses intérêts stratégiques vitaux sont en jeu. Alors ‘la France entretiendra en permanence la capacité d’action extérieure nécessaire à la défense de ses intérêts de sécurité et à ses responsabilités’, écrit la commission. Pour ces experts, ‘la France devra pouvoir concentrer ses capacités sur l’axe allant des approches occidentales du territoire jusqu’à la Méditerranée, au Golfe et à l’océan indien, tout en conservant une capacité d’action sur la façade occidentale de l’Afrique, dans la bande sahélienne, ainsi qu’outre-mer’. Et cette face atlantique passe par Dakar, Gabon et Djibouti puisque la base militaire française en Côte d’Ivoire est appelée à disparaître. D’ailleurs, le Livre Blanc parle dans ce sens quand il dit que ‘ce choix comporte par ailleurs une réduction de notre dispositif pré-positionné par rapport à la situation actuelle et son évolution vers des capacités de coopération adaptées conformément aux objectifs décrits ci-dessus dans la fonction stratégique prévention’.
En ce qui concerne l’Afrique au sud du Sahara, l’organisation de la présence militaire de la France va calquer sur les organisations sous-régionales. C’est dans ce cadre que l’Union africaine, la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cedeao), la Communauté de développement d’Afrique australe (Sadec), la Communauté économique des Etats d’Afrique centrale (Ceeac) et l’Autorité intergouvernementale pour le développement (Igad) pour l’Afrique orientale vont devenir des partenaires à part entière de la France. Si les autorités françaises tiennent tant à leur présence militaire, c’est qu’elles considèrent que ‘la France et l’Europe ne peuvent se désintéresser du continent qui leur est le plus proche’. Il ne s’agit pas simplement de proximité, mais également à ses nombreux ‘atouts’, son ‘potentiel humain et économique considérable’. D’ailleurs les experts, qui ont rédigé le Livre Blanc, projettent sérieusement qu’à ‘long terme, ces capacités pourraient lui permettre de figurer parmi les acteurs de premier plan de la croissance économique et de la sécurité mondiales’.
‘Néanmoins, font remarquer les auteurs, la poursuite de l’essor démographique, la faiblesse des structures étatiques et la mauvaise gouvernance risquent de freiner encore longtemps le développement et une répartition équitable de ses gains’. Ce qui peut compromettre ‘la sécurité en Afrique’ à cause ‘des conditions de vie liées à l’urbanisation croissante, à l’absence de structures sanitaires appropriées, à la raréfaction des ressources alimentaires locales’. Sans compter ‘le réchauffement climatique (qui) aggrave cette situation’.
Ce sont toutes ces raisons qui font que ‘la France et l’Europe doivent contribuer à la lutte contre la dégradation de ces conditions, afin de juguler les mouvements migratoires poussés par la détresse économique et sociale’ dont l’une des conséquences sera l’accentuation des migrations vers l’Europe.
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D’autres raisons sont indiquées pour maintenir des forces pré-positionnées en Afrique afin de mieux aider le continent qui ‘aspire à disposer de ses propres capacités de règlement des différends, de prévention des crises et de maintien de la paix’. Et la commission chargée de la rédaction du Livre Blanc est convaincue que ‘la France et l’Europe ont un intérêt majeur à contribuer à l’établissement de ces moyens. A cette fin, elles doivent continuer d’accompagner les efforts de l’Union africaine, des organisations régionales et des pays africains eux-mêmes’. Surtout que ‘Les problèmes de l’Afrique ont des incidences directes sur nos intérêts : immigration clandestine, radicalisation religieuse en terrain musulman et développement de sectes fondamentalistes en terrain chrétien, implantation des groupes terroristes se réclamant d’Al-Qaida, apparition de nouvelles routes de la drogue, trafics d’armes illicites, réseaux de prolifération, blanchiment d’argent et risques sanitaires. La bande sahélienne, de l’Atlantique à la Somalie, apparaît comme le lieu géométrique de ces menaces imbriquées et, à ce titre, appelle une vigilance et un investissement spécifiques dans la durée’, lit-on dans le Livre Blanc sur la Défense et la Sécurité nationale.
Les experts indiquent que ce tableau noir de l’Afrique cache un autre plus reluisant comme ‘ses richesses vitales pour l’économie mondiale ; sa jeunesse (qui) est une chance ; de nouvelles générations, qu’il faut encourager, accèdent aux responsabilités économiques et politiques’.Ce qui explique ‘l’expansion et l’influence croissantes des pays du Moyen-Orient et de l’Asie en Afrique, attirés par les ressources et le potentiel africains’.
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