Après une rencontre, hier matin, avec le directeur de cabinet du ministre de la Justice à qui, ils ont remis des Cd-rom contenant des éléments d’enquêtes contre Hissène Habré, les avocats des victimes ont fait face à la presse. Pour l’essentiel, ils estiment que le Sénégal doit faire vite pour organiser le procès dans un délai raisonnable.
Face aux journalistes, le collectif des avocats des victimes tchadiennes d’Hissène Habré s’est dit rassuré par le directeur de cabinet du ministre de la Justice qui les recevait, hier, quant à la tenue du procès de l’ancien dictateur tchadien au Sénégal. Toutefois, aucune date précise n’a été avancée. C’est la raison pour laquelle, le collectif des avocats des victimes demande à l’Etat sénégalais de faire vite en vue de pouvoir juger Habré dans ‘un horizon visible’, selon l’expression de Me William Bordeau, un des avocats des victimes. ‘Les victimes estiment qu’il est grand temps que les procédures soient entamées parce que le Sénégal a reçu mandat de l’Union africaine depuis bientôt maintenant 16 mois. L’Union africaine a elle même désigné un représentant spécial à Dakar, en la personne de Robert Dossou, ancien ministre des Affaires étrangères et de la Justice du Bénin. L’obstacle juridique a été modifié de telle sorte que les juridictions sénégalaises, notamment la Cour d’assises peut connaître des crimes contre l’humanité. Donc, il n’y a plus d’obstacles pour que la procédure contre M. Habré soit entamée’, a ajouté Me Mouhamed Kébé, avocat sénégalais des victimes.
William Bordeau, avocat français membre du collectif des victimes de renchérir que ‘nous avons à plusieurs reprises dit notre préoccupation que trop de temps a été perdu (…) Depuis ce matin ( Ndlr, lundi) nous sommes rassurés parce que le directeur de cabinet a bien voulu nous dire que des instructions ont été données pour qu’une information soit ouverte et que, par conséquent, un juge d’instruction soit nommé à court terme. C’est ce que nous attendons, c’est ce que les victimes attendent. Il nous a aussi dit qu’il n’imagine pas que les investigations soient suspendues en attendant les premiers chèques’. Pour cet avocat au barreau de Paris, les investigations vont démarrer en attendant l’arrivée des chèques. ‘Elles vont commencer. Le président Wade a fait inscrire sur la ligne budgétaire une certaine somme pour la procédure. Que le Sénégal ait besoin de soutiens financiers, c’est normal. Parce que les juges sénégalais ne vont pas seulement juger Hissène Habré pour les victimes sénégalaises, pour les victimes tchadiennes, mais pour toute l’humanité aussi. Donc l’humanité est concernée par ce procès. Mais cela ne peut pas être un argument pour retarder les investigations. Aujourd’hui, cette ambiguïté a disparu, l’obstacle juridique aussi. Les investigations peuvent maintenant démarrer à un bon rythme sans précipitation. Il y a tout un travail de rassemblement des preuves, rigoureux et sérieux qui a été fait. Les éléments de preuves sont là : nous avons remis les Cd-rom des archives du Bds qui est la police de répression de Habré. Il faut que Habré s’explique. Il faut qu’il soit confronté aux victimes’, a t-il poursuivi.
Me Demba Ciré Bathily, membre du collectif des avocats des victimes ne dit pas autre chose. Selon lui, les éléments de preuves rassemblés par les avocats des victimes peuvent servir de base de travail au juge d’instruction. ‘Nous avons aussi exprimé nos inquiétudes par ce que nous avons l‘impression que depuis que le dossier a été confié au Sénégal, rien n’a démarré. Il y a certes, la question insurmontable des moyens financiers, mais il y a la disponibilité des bailleurs de fonds, de l’Union européenne, du Canada, de la Suisse, du Tchad et du reste de la communauté internationale’, informe-t-il . D’après Me Demba Ciré Bathily si Hissène Habré n’a pas été jugé, il faut le mettre sur le compte de ceux qui avaient la responsabilité de le juger. ‘Les victimes sont en train d’être ballottées de juridictions en juridictions pour demander que justice leur soit rendue. Car, jusqu’ici nous avons assisté à une sorte de déni de justice. C’est cet ordre qu’il faut réparer’, avance Me Bathily pour qui ‘il a fallu que, la Belgique demande à juger Habré pour qu’une partie de la communauté africaine dise :“ c’est à nous de le juger“‘. ‘Tout a une fin. Si vous prenez l’Europe, tous les criminels de guerre ont été jugés. En Afrique, c’est à nous de mettre fin à cette impunité. Pas une justice expéditive mais une justice équitable où les droits de la personne accusée seraient respectés’, a-t-il conclu. Hissène Habré vit en exil au Sénégal depuis 1990. Il est poursuivi pour tortures et crimes contre l’humanité.
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