Deux policiers, accusés d'avoir violé une jeune femme en état d'ivresse, viennent d'être acquittés après deux mois d'un procès très médiatisé. Un verdict inattendu qui pourrait bien intéresser la défense de Dominique Strauss-Kahn.
Un sacré revers pour le procureur de Manhattan Cyrus Vance également en charge de l'affaire qui touche Dominique Strauss-Kahn et qui s'était beaucoup investi dans ce dossier. Contre toute attente, un jury de New York vient d'acquitter deux policiers accusés de viol, après un procès de deux mois fortement médiatisé. Un verdict qui, selon le New York Times, risque fort d'intéresser les avocats chargés de la défense de l'ancien directeur du FMI.
Les faits remontent à décembre 2008. En pleine nuit, un chauffeur de taxi compose le 911 pour indiquer que sa cliente est alcoolisée et qu'elle a besoin d'aide pour rentrer dans son appartement. Deux policiers en patrouille, Franklin Mata et Kenneth Moreno, arrivent sur les lieux et prennent en charge la jeune femme, âgée de 29 ans.
Quelques jours plus tard, celle-ci se rend au commissariat pour raconter qu'elle a été violée. Une enquête est ouverte. Les caméras de surveillance de l'immeuble de la victime présumée montrent que les deux officiers du NYPD sont revenus trois fois dans la même nuit dans l'appartement de la jeune femme. En tout, ils y sont restés 97 minutes. Sans en informer leur hiérarchie.
Le récit de la plaignante est flou. Très alcoolisée, elle reconnaît que cette nuit-là, elle a perdu connaissance. Elle avait bu beaucoup d'alcool dans la journée et la soirée pour fêter avec des amis une promotion. Mais, assure-t-elle, elle s'est réveillée à plusieurs reprises et a entendu la radio des deux policiers. Elle raconte également qu'elle a senti qu'on lui enlevait ses collants et qu'on la pénétrait alors qu'elle était couchée sur le ventre.
La plaignante devenue accusée
Des accusations rejetées par les deux policiers. S'ils sont revenus dans l'appartement, arguent-ils, c'est parce que la plaignante leur avait demandé de venir vérifier qu'elle se portait bien. Kenneth Moreno raconte même qu'il a dû refuser les avances de la jeune femme, qui s'était déshabillée. Il reconnaît toutefois s'être allongé à côté d'elle pour la «câliner» et lui avoir chanté une chanson, Livin' on a Prayer de Bon Jovi, pour la réconforter. Mais rien de plus. Son collègue, pendant ce temps, se trouvait dans le salon.
Problème : la jeune femme, quelques jours après les faits, était allée au commissariat pour s'entretenir avec Kenneth Moreno. Furieuse, elle souhaitait des explications. Elle avait alors secrètement enregistré la conversation. Sur les bandes audio, on entend bien le policier lui indiquer qu'il a utilisé un préservatif. Une révélation sur laquelle le policier est depuis revenu. Au procès, il s'est défendu en disant qu'il lui avait dit ça pour «la calmer» et éviter un esclandre en plein commissariat.
La difficulté de ce dossier résidait principalement dans l'absence de traces ADN. Le fait que le jury ait finalement favorisé les deux policiers prouve en tout état de cause la difficulté, dans des affaires de viol, de faire arriver douze jurés à une «conviction au-delà du doute raisonnable», selon la formule en droit américain qui permet de condamner un accusé. «On n'avait aucune preuve. On a pris la loi à la lettre», a ainsi confié un juré au New York Times une fois le procès terminé.
Au cours des audiences, près de 40 témoins ont été appelés à témoigner. La jeune femme a craqué à de nombreuses reprises à la barre, face aux interrogatoires musclés de la défense. Plusieurs journaux américains ont estimé qu'en fin de compte, la plaignante avait fait figure d'accusée à de multiples reprises, comme c'est souvent le cas dans les affaires de viol fortement médiatisés.
«Les jurés sont très avertis»
Il y a évidemment de grandes différences entre cette affaire et celle qui touche Dominique Strauss-Kahn, accusé de viol et d'agression sexuelle par une employée de l'hôtel Sofitel de Manhattan. Mais l'acquittement inattendu des deux policiers a provoqué des dizaines de commentaires de journalistes, d'avocats et d'experts sur les chances qu'aurait l'ancien patron du FMI de lui aussi échapper à la prison en cas de procès. Le bureau du procureur craint que le public fasse un amalgame entre les deux affaires, ce qui pourrait encourager les avocats de Dominique Strauss-Kahn à aller jusqu'au procès.
Brenda Smith, professeur à la faculté de droit de l'American University de Washington et spécialiste des violences sexuelles, considère en tout cas que cet acquittement est une décision «encourageante» pour le camp de Dominique Strauss-Kahn. «Dans des villes comme New York, les jurés sont très avertis, ils ne vont pas croire d'emblée une histoire rebattue, ils analysent au cas par cas».
Les tabloïds américains se sont quant à eux déchaînés. «Bienvenue aux prédateurs en uniforme, la saison est ouverte», a ainsi écrit le New York Post. Michael Daly, du New York Daily News, est allé plus loin encore et a estimé que «Le Perv» - abréviation de «pervers» et surnom donné à DSK dans ces journaux populaires - allait certainement fêter la nouvelle depuis son domicile où il est en résidence surveillée. «On peut parier que Le Perv pense maintenant que si les jurés ont cru ces deux policiers, ils vont tout croire», écrit le journaliste.
3 Commentaires
Lecteur
En Mai, 2011 (15:48 PM)Kekh Kekh
En Mai, 2011 (17:44 PM)Mamabiamayo
En Mai, 2011 (19:33 PM)Participer à la Discussion