
« Je comprends la douleur du papa de la fille. Toute cette affaire me désole, mais je ne veux pas qu’on dise que j’ai violé la fille ». Cette réponse de Cheikh Yérim Seck au juge qui lui demandait s’il regrettait son geste, résume bien le fond des débats qui ont duré près de 15 heures.
Selon le prévenu, cette affaire est toute simple. « C’est une fille qui s’est donnée à un homme qui la désirait et qui, après avoir pris conscience des conséquences que cela peut engendrer au sein de son environnement familial, a décidé de porter plainte pour viol ». Alors que pour Aïssata Tall, elle n’a jamais pensé que Cheikh Yérim Seck allait la pénétrer.
Accusations, contre-accusations, arguments, contre-arguments, ont été la trame de ce procès qui a débuté vers 11 heures 20 mn quand, Cheikh Yérim Seck, tout de blanc vêtu, s’est présenté dans la salle d’audience archicomble où le mercure est au plus haut malgré la mise en marche de la climatisation.
Alors que tous les regards sont portés sur elle, la plaignante, teint caramel, veston bleu sur un jean bleu délavé, un timide maquillage qui lui donne plus que ses 20 ans, entre dans la salle escortée par certains de ses avocats. C’est elle ? Ce n’est pas elle ? Sa présentation devant le juge, côte à côte avec son supposé violeur, clos le petit débat sur son identité.
Après la déclinaison de son identité et le rappel des chefs d’accusations pour lesquels il était devant la barre, le prévenu est prié de revenir sur le déroulement des faits. Il s’exécute. De la prise de contact avec la fille lors d’une émission de télé jusqu’à cette date fatidique du samedi 8 septembre, l’ancien journaliste de l’hebdomadaire « Jeune Afrique » est revenu en long et en large sur cette affaire. Rien de nouveau, il a tenu les mêmes propos que dans le procès verbal d’audition de la gendarmerie.
Selon lui, la fille s’est déshabillée toute seule. Ils se sont mis à s’embrasser et à se caresser. Ensuite il a mis un préservatif, s’est mis à se frotter sur elle et au bout de quelques minutes, ne contrôlant plus rien, il l’a pénétrée. « Ce n’est qu’au bout de 15mn de coït que le sang a giclé de la fille qui, prise de panique, s’est brusquement levée pour se réfugier dans les toilettes ». Ce dernier point n’a pas manqué d’intriguer le juge qui s’étonne que ce n’est qu’au bout de 15mn que l’hymen de la fille s’est déchiré alors que le prévenu lui-même a soutenu que tout son « appareil génital » était entré entièrement dans le sexe de la fille.
Cheikh Yérim Seck bredouille ses réponses sous le feu roulant des questions du juge. À un moment, il était même en contradiction avec les propos qu’il avait tenus dans le procès verbal de la gendarmerie quand il a soutenu devant la barre qu’il avait conscience de pénétrer la fille alors qu’il avait argué que « tout le monde sait qu’à un certain moment on ne peut plus rien contrôler », pour signifier qu’il l’avait fait inconsciemment.
À la question de savoir si la fille était consentante, le prévenu lâche : « Non, mais il y a des gestes qui sont plus illustratifs que la parole ». Confirmant ainsi que la fille n’a jamais été consentante. C’est d’ailleurs sur ce point que le bataillon d’avocats de Ndèye Aïssata Tall a accentué sa plaidoirie. Après avoir écouté son présumé violeur livrer sa version des faits, Aïssata Tall, un bout de femme, bat tout en brèche d’une petite voix inaudible et sourde au point que le juge lui demande de parler fort. Elle a tout nié. Jusqu’aux circonstances de leur rencontre. Mais là où le juge a confondu la présumée victime, c’est quand il s’est étonné de la facilité avec laquelle elle s’est laissée déshabiller par Cheikh Yérim Seck. Ndèye Aïssata Tall soutient que ce dernier l’a forcée. Le débat devient houleux et prend parfois des tournures « salaces ».
Devant des questions jugées déplacées ou non, Mes Moustapha Diop, Samba Ahmet Ly, Borso Pouye, Yerim Thiamet et consorts, leurs collègues défendant le prévenu dont Mes Aly Fall et Abdou Dialy Kâne protestent vigoureusement. C’est ainsi qu’à plusieurs reprises, le juge a été obligé d’arrêter les débats pour calmer les esprits. Après la suspension de l’audience de 16 à 17 heures, les débats reprennent avec l’interrogatoire des différents témoins, en l’occurrence les employés de l’hôtel-restaurant où se sont déroulés les faits et l’ami du prévenu Souleymane Astou Diagne. Ces interrogatoires n’ont pas permis de faire éclater la vérité.
Ce n’est qu’aux alentours de 22 heures que les plaidoiries des 25 avocats constitués dans cette affaire ont démarré. Lors de ces joutes oratoires, l’avocat de la partie civile, Me Moussa Sarr lâche une phrase choc : « Cheikh Yérim manque d’humilité. Il aime le fric, le faste et les fesses. La conséquence, c’est les frasques ».
Dans son réquisitoire, le parquet a demandé au tribunal de condamner Cheikh Yérim Seck à 3 ans de prison.
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