
Les acteurs de la justice ne sont pas contents des nombreuses sorties médiatiques de leur ministre de tutelle, Aminata Touré. La sur-médiatisation des audits est la goutte d’eau qui a fait déborder le vase. L’on estime que cela donne l’impression d’une justice aux ordres de la tutelle. Ce qui compromet l’indépendance de la justice.
Les acteurs de la justice sont vivement indignés par les nombreuses sorties médiatiques de leur ministre de tutelle. Le constat est que de tous les ministres ayant présidé le département de la Justice, Mme Aminata Touré bat le record des déclarations publiques. Si ce comportement est tant déploré dans les rangs des acteurs de la justice, c’est parce que les autorités judiciaires doivent se faire distinguer par le droit de réserve. Telle est la démarche des magistrats et autres. A en croire les acteurs du secteur en question, il devrait en être autant pour l’autorité qui préside aux destinées de la Justice. «La rigueur des principes voudrait que le garde des Sceaux et ministre de la Justice qui incarne un département de souveraineté ne se prononça que lorsque les circonstances l’exigent. C’est-à-dire, dans des cas exceptionnels. L’élégance républicaine le recommande», soutient-on du côté du Temple de Thémis. L’indignation a atteint son paroxysme à cause des nombreuses sorties médiatiques sur la question des audits enclenchés par le pouvoir contre les barons de l’ancien régime. Selon les protestataires, cette situation est de nature à donner l’impression que ces audits sont commandités par l’Exécutif et que «le parquet est aux ordres de la Chancellerie». Ce qui compromet, dès lors, le principe de l’indépendance de la justice.
Depuis qu’elle a été nommée à la Chancellerie, on ne dénombre pas le nombre de sorties de «Mimi» Touré dans les médias. Réagissant aux menaces de l’ancien président, Abdoulaye Wade, d’attaquer la Cour de répression de l’enrichissement illicite et en marge du conseil des ministres décentralisé à Saint-Louis, Mme le ministre de la Justice déclarait que «le gouvernement restera déterminé dans la conduite des audits». Répliquant aux accusations de Me Wade sur les poursuites judiciaires contre son épouse, Aminata Touré déclarait : «Je n’ai jamais saisi le procureur de la République dans l’affaire Viviane Wade.» Toujours dans le cadre de la médiatisation des audits, le garde des Sceaux disait que «toutes les personnes épinglées par le rapport de la Centif vont répondre à la justice». Lors de la rencontre entre le président Macky Sall et les ministres membres de l’Alliance pour la République (Apr), la patronne de la Chancellerie soutenait que «tous les dossiers connaîtront une suite judiciaire». Samedi dernier, lors de l’anniversaire du mouvement des forces vives de la nation (M23), elle est aussi revenue sur la question des audits en promettant de sévir contre les bourreaux des victimes des violences électorales. Avant d’ajouter que rien ne fera reculer le régime sur les audits contre les barons de l’ex-régime. Il s’y ajoute sa déclaration tenue, tout dernièrement, au Centre culturel Blaise Senghor.
Des acteurs de la Justice font remarquer, mezza voce, que ses prédécesseurs au ministère de la Justice (Me Madické Niang, Moustapha Sourang, El Hadji Amadou Sall et Cheikh Tidiane Sy) ne se prononçaient que rarement sur des questions relevant de leurs compétences. La rentrée solennelle des Cours et tribunaux, le vote du budget du ministère de la Justice, la conférence annuelle des chefs de parquet, le conseil des ministres étaient les seuls cadres où l’on pouvait les entendre s’exprimer. Tout dernièrement, la presse a fait état d’une altercation entre Aminata Touré et un autre de ses collègues, en plein conseil des ministres. La garde des Sceaux n’aurait pas apprécié la remarque de son collègue sur l’hyper-médiatisation des audits.
Pape NDIAYE
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