Sept ans plus tard, précisément le 9 novembre 2022, le journaliste Pape Alé Niang, directeur du site d’informations Dakarmatin.com, est raflé puis jeté en prison pour des… délits de presse. Rattrapé par l’histoire, le Président Macky Sall a bel et bien été démenti par ses propres services. En effet, c’est le procureur de la République, le bras judiciaire tout-puissant du pouvoir politique, qui a fixé les réquisitions ayant précipité l’emprisonnement de notre confrère à la prison de Sébikhotane.
On ne se consolera pas de constater que ce n’est pas la première fois que le Président Sall est pris en flagrant délit de violation de ses propres engagements devant le peuple sénégalais et même devant la Communauté internationale. Mais l’agression du 9-novembre contre la presse sénégalaise qui aboutit à priver de liberté un journaliste dans l’exercice de ses fonctions est autrement plus grave. Il s’agit d’une atteinte délibérée et intolérable aux droits sacrés et inaliénables que la Constitution du Sénégal, la Déclaration universelle des droits de l’homme et des Chartes internationales comme celle de Munich reconnaissent expressément à ceux et celles qui exercent le métier de journaliste. C’est clairement inacceptable !
L’arrestation de Pape Alé Niang en pleine rue alors qu’il vaquait à ses occupations - violence symbolique - et la diligence avec laquelle il a été privé de liberté est une opération politique kamikaze. Son but ultime est, au pire, de neutraliser les plumes et voix encore attirées par le réflexe professionnel de fouiner dans les placards à cafards des détenteurs de responsabilités publiques, au minimum de susciter une épidémie d’autocensures et de renoncements dans les rangs de notre profession. C’est inenvisageable ! Cette tentative d’assignation à résidence du journalisme de qualité entre les geôles de la médiocrité et les souterrains pénitenciers de la révérence est un mépris et une insulte à l’endroit de tous ceux qui ont fait le serment d’informer vrai en toutes circonstances. Dans son ouvrage « La valeur de l’information », Edwy Plenel, directeur co-fondateur de Mediapart, identifie « deux éléments décisifs » qui donnent sens au journalisme : « L'obligation envers la vérité et la loyauté vis-à-vis du public. » Au regard de cela, Pape Alé Niang doit-il rester encore en prison ? NON !
Cette affaire-ci est un véritable tournant porteur d’une jurisprudence fondatrice soit d’un musellement légalisé de la presse sénégalaise, soit d’un environnement de travail où les journalistes continuent de s’épanouir sous le contrôle de leurs pairs et des principes de liberté/responsabilité conformes aux fondamentaux de leur métier. Ce qui se joue ici et maintenant est donc d’une gravité exceptionnelle pour l’avenir de la presse, des journalistes, de la liberté d’information, du droit à l’information pour le public. Avons-nous encore le pouvoir d’informer les Sénégalais en toute liberté ? Avons-nous toujours le pouvoir de choisir, en toute liberté, les orientations d’une mission de service public chevillée à la défense de l’intérêt général ? Avons-nous le pouvoir de refuser les injonctions - aimables ou directrices - qui infiltrent notre profession en la caporalisant au service d’intérêts privés couverts du manteau de la puissance publique ? Les « OUI » à ces questions ne dépendent que de nous, journalistes, et de tous les démembrements du peuple sénégalais attachés aux libertés de presse et d’expression. Les « NON » aussi.
Les soubassements politico-revanchards qui caractérisent ce dossier puent à dix mille lieux. Leur évidence est grotesque et manifeste. Ils sont les préliminaires d’une offensive visant à réduire au silence toutes sortes de contestations de nature à mettre en cause la volonté de puissance qui sous-tend la gouvernance actuelle du Sénégal. Les puissants enjeux politiques qui pointent à l’horizon, en particulier l’élection présidentielle de février 2024, en sont LA RAISON ESSENTIELLE. Les médias encore libres en sont LES CIBLES.
Après avoir fait semblant de dormir, le « Monstre » a dû quitter l’état de somnolence pour reprendre du service. La violence et la détermination avec lesquelles il a fait boucler en quatre jours l’étape d’incarcération de Pape Alé Niang menace fondamentalement la profession de journaliste, mais aussi le droit à l’information des Sénégalais. Du reste, il se satisferait bien que les journalistes sénégalais se transforment en chroniqueurs de chiens écrasés, de ragots de comptoir, de faits divers spectaculaires… loin des problématiques qui structurent l’état réel du pays.
Mais « Le Monstre » doit se convaincre – et définitivement - que les journalistes sénégalais n’acceptent pas d’être les victimes expiatoires des dysfonctionnements de ses pratiques politiciennes. Les hommes et femmes des médias qui ont fait le choix de servir l’intérêt public général n’ont pas vocation à être les otages de concepts fourre-tout dont les finalités servent en fin de compte l’affairisme de groupuscules privés de politiciens publics. C’est rigoureusement impensable !
Pape Alé Niang ne méritait pas un instant de passer une seule nuit en prison. Les motifs inavoués de son embastillement relèvent de l’instrumentalisation flagrante d’une justice au sein de laquelle l’hyper-puissance d’une marionnette enchantée dénommée Parquet a décidé de réduire nos libertés à leur plus petite expression, sur ordre d’un pouvoir politique en stage d’autoritarisme. Ce ne sont pas seulement les journalistes et les activistes qui font les frais de ces dérives liberticides, c’est aussi une certaine idée de la démocratie et de la séparation réelle des pouvoirs qui est en train d’être anéantie.
Avant d’être assassiné par des mercenaires du régime de Blaise Compaoré, le journaliste d’investigation burkinabè Norbert Zongo écrivait en 1993 que « les peuples comme les hommes finissent toujours par payer leurs compromissions politiques : avec des larmes parfois, du sang souvent, mais toujours dans la douleur. »
Pour nous Sénégalais, il est encore temps de réagir !
Libérez Pape Alé Niang !
PAN ! A bas le monstre !
23 Commentaires
Anonyme
En Novembre, 2022 (11:49 AM)LE MONSTRE EN CAGE
Xeme
En Novembre, 2022 (11:53 AM)Quand il s'agit d'un journalisme impliqué dans le mensonges, la diffamation ou d'autres délits, ils se couvrent mutuellement, la corporation se tait.
Dire que ce sont ces gens adepte de corporatisme primaire de bas étage, qui aiment se prendre pour des juges et des donneurs de leçons ... qui jugent et jettent à la vindicte populaire impunément les personnes se trouvant dans leur collimateur.
Voilà ce qu'est devenu la presse sénégalaise : une mafia organisé autour du mercénariat de l'information.
Pour nous sénégalais, il est temps que la justice tienne bon pour qu'aucun sénégalais, fusse-t-il journaliste ne soit au dessus des lois. Autrement, autant libérer tous les prisonnsiers qui n'ont pas corporation pour les défendre
Reply_author
En Novembre, 2022 (16:38 PM)On ne peut pas en dire autant pour tout le monde surtout pour ceux dont les boules sont attachées avec des liasses de CFA.
Deug
En Novembre, 2022 (13:16 PM)Leppaye Bakhe
En Novembre, 2022 (13:17 PM)Ibou
En Novembre, 2022 (14:15 PM)Passant
En Novembre, 2022 (14:21 PM)En dernier lieu, l'armée sénégalaise n'appartient pas à Macky Sall, si les journalistes encagoulés se croient tout permis, ils se trompent lourdement, il n'y aura pas de dépénalisation des délits de presse à cause de cette attaque contre l'armée. Merci à Pape Alé Niang d'avoir enterré définitivement cette lubie. Ce n'est pas parce qu'on a de grandes gueules qu'on est au-dessus de la loi. Ce sont ces mêmes gens qui disent que la justice est bancale qui cherchent à avoir des immunités. La justice c'est pour les autres, le peuple ordinaire. Eux les politiciens et les journalistes il leur faut des immunités pour qu'ils puissent faire et dire ce qu'ils veulent.
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En Novembre, 2022 (16:40 PM)Senegalais Lambda
En Novembre, 2022 (14:35 PM)Maintenant , il est entrain de moisir au cachot et y restera autant que la loi l'autorise . Alors continuez à rediger vos articles , organiser vos marches et à mentir cela ne lui donnera pas la liberté .
EN REALITE PAPE ALE N'EST PAS JOURNALISTE ET CEUX QUI LE SOUTIENNENT NON PLUS . CESONT LES MERCENAIRES DU GOUROU VIOLEUR ET IMPOSTEUR MAIS LA VERITE ECLATERA AU GRAND JOUR
Jambaar
En Novembre, 2022 (15:39 PM)Bu Ndaw
En Novembre, 2022 (15:54 PM)Depuis quand est-il diplômé du CESTI ou autre institut de journalisme ? Depuis quand a-t-il reçu la qualification de journaliste ?
Mohamed Ghaly Kane
En Novembre, 2022 (16:19 PM)S'il exerce en phase avec la loi il ne sera emprisonné pour ses opinions.
Bu Ndaw
En Novembre, 2022 (16:38 PM)Lemzo
En Novembre, 2022 (19:57 PM)Pan
En Novembre, 2022 (16:04 PM)