Plus connu en tant que leader politique et président du Grand Parti, Malick Gakou préside aussi aux destinées de la Fondation « Maternité Solidaire ». En ce moment où le débat sur la mortalité maternelle fait rage, « Le Vrai Journal » est allé à sa rencontre pour une discussion à bâtons rompus sur ce sujet qui lui tient particulièrement à cœur. Entretien.
« Au Sénégal, chaque 4 ou 6 heures, une femme meurt en donnant la vie »
« La première protection du droit de la femme commence par le respect du droit à la maternité »
« J’incarne un symbole vivant de la mortalité maternelle »
« Mon principal objectif est la construction d’un hôpital ultra moderne consacré à la vie de la mère et de l’enfant »
1 – Le procès des sages femmes impliquées dans le décès d’Astou Sokhna pour une supposée « négligence médicale » a lieu aujourd’hui. Que vous inspire la fin tragique de cette femme décédée en couches ?
C’est un grand sentiment de désolation et une tristesse infinie qui m’ont envahi en apprenant le décès de cette brave dame décédée lors d’un accouchement.
Je suis tenté de dire qu’il s’agit hélas d’un décès de plus, un décès évitable mais qui illustre, à bien des égards, la détresse des femmes sénégalaises face à la maternité. Cela reste insupportable et insoutenable.
2 - Etes-vous d’accord avec les condamnations qui fusent de partout et qui mettent en cause les sages femmes ?
Face à des situations qui mettent en péril le destin de la mère et de l’enfant, il est extrêmement important de mesurer à sa juste valeur et avec sérénité les causes et les solutions à mettre en exergue pour éradiquer le taux élevé de mortalité maternelle et infanto juvénile dans notre pays.
Ensuite, il nous faut situer les responsabilités de chaque élément de la chaine intervenant dans le processus de la maternité. Il ne sert à rien, dans ce contexte, de s’empresser à vouer aux gémonies le personnel médical et les braves sages femmes du Sénégal qui, avec des moyens dérisoires, se battent quotidiennement pour sauver la vie de la mère et de l’enfant.
3 - Le taux de mortalité maternelle reste toujours élevé au Sénégal ?
Au Sénégal, chaque 4 ou 6 heures, une femme meurt en donnant la vie. Statistiquement, on dénombre près de 2500 à plus de 3000 femmes qui décèdent chaque année durant le processus de la maternité. C’est inacceptable et inadmissible, même si des efforts considérables ont été entrepris ces dernières années. La situation reste très critique et mérite une attention particulière de la part des pouvoirs publics et de l’action citoyenne pour protéger les femmes sénégalaises qui sont le socle de la famille et de la société.
4 - Qu’est-ce qui explique ce drame de la mortalité maternelle qu’on a du mal à éradiquer ?
La situation globale de la mortalité maternelle a diminué de près de 38% entre 2000 et 2018, passant de 344 à 212 décès pour 100.000 naissances, même si on est encore loin de l’objectif millénaire du développement humain durable, c’est-à-dire moins de 70 décès pour 100.000 naissances vivantes.
Dans notre pays, les données officielles indiquent que le ratio de la mortalité maternelle a baissé de 392 décès pour 100.000 naissances vivantes en 2010 à 230 décès en 2018. Toutefois, ce taux est encore extrêmement élevé et il urge de le réduire encore considérablement.
La première protection du droit de la femme commence par le respect du droit à la maternité qui est un droit fondamental et un devoir pour l’humanité.
5 – Mais, selon vous, quelles sont réellement les causes de la mortalité maternelle ?
En dépit des progrès de la médecine, il est notoirement connu que la majorité des femmes qui meurent en donnant la vie, décèdent pour cause d’hémorragies, d’avortements non médicalisés, entre autres, mais surtout, de l’absence de prise en charge adéquate et de suivi approprié du processus de la grossesse jusqu’à l’accouchement.
Tous ces morts sont évitables avec un personnel médical qualifié, disponible, bien organisé et disposant des moyens adéquats pour préserver et protéger les femmes pendant la grossesse et à l’accouchement.
6 – Vous êtes Président de la Fondation « Maternité Solidaire ». Quels objectifs visez-vous à travers la dite fondation ?
La fondation a pour objet principal :
- la lutte contre la mortalité et la morbidité maternelles et périnatales, au Sénégal et en Afrique Sub-saharienne
- l'amélioration des connaissances, des attitudes et pratiques des femmes vis-à-vis des principaux facteurs de risque de mortalité et de morbidité maternelles et périnatales, à travers des activités d'information, de sensibilisation et d'éducation pour un changement de comportement ;
- la promotion chez le personnel de santé de la diffusion des meilleures pratiques de prévention et de traitement des problèmes de santé fréquemment rencontrés chez les femmes et les nouveau-nés ;
- la promotion de l'accès à des soins de qualité adaptés aux besoins des femmes et des nouveau-nés, surtout en banlieue et en milieu rural ;
- la contribution, à travers la recherche opérationnelle, à une meilleure connaissance et à une prise en charge plus efficiente des problèmes majeurs de santé maternelle et périnatale ;
- la surveillance prénatale, l'accouchement humanisé, la néonatologie, le dépistage et la prévention des cancers gynécologiques et mammaires, la planification familiale et la ménopause. Et, généralement, toutes activités se rapportant à l'objet ci-dessus ou susceptibles de favoriser son développement, sa réalisation ou son extension.
7 – Mais est-ce que votre cas personnel n’a pas déterminant dans la création de la fondation ?
Vous avez tout à fait raison, j’incarne un symbole vivant de la mortalité maternelle. Ma propre mère est décédée à ma naissance des suites d’une hémorragie et j’en porte éternellement les stigmates. Je suis un élément de la cause.
C’est pour éviter un tel drame à toutes les familles que je me suis levé depuis le 26 décembre 2015 pour faire de cet engagement le combat d’une vie. Je ne ménagerai aucun effort, aucune peine pour l’éradication définitive de la mortalité maternelle au Sénégal, en Afrique et dans le monde. Je sais qu’il nous faudra beaucoup d’efforts, de sueurs et d’imagination pour y arriver, mais nous allons relever le défi.
8 – Quelles ont été les dernières actions de la fondation ?
Malgré le Covid 19 qui a un peu entravé nos actions, nous avons pu appuyer les structures de santé des Communes de Taiba Ndiaye et de Notto Diobas, dans le cadre de notre plan d’action bi annuel 2020 – 2021.
Avec la fin probable de la pandémie, nous allons reprendre nos actions sur le terrain avec un budget annuel de cent millions de Francs (100.000.000 F CFA) pour l’appui aux maternités, aux structures de santé et le portage du plaidoyer de la lutte contre la mortalité maternelle et infanto juvénile.
9 – Peut-on s’attendre à une réalisation en termes d’infrastructure ?
Consacrer toute mon énergie pour cette cause est un sacerdoce pour moi et un combat de vie. Je profite de l’occasion pour remercier tous les membres de la fondation pour les efforts consentis dans cette bataille. Malgré la discrétion qui entoure leur contribution, je salue leur engagement dans cette dynamique.
Cela dit, mon principal objectif est la construction d’un hôpital ultra moderne consacré à la vie de la mère et de l’enfant et je ferai vraiment tout pour le matérialiser en sauvant les femmes face au désastre familial de la mortalité maternelle.
« Au Sénégal, chaque 4 ou 6 heures, une femme meurt en donnant la vie »
« La première protection du droit de la femme commence par le respect du droit à la maternité »
« J’incarne un symbole vivant de la mortalité maternelle »
« Mon principal objectif est la construction d’un hôpital ultra moderne consacré à la vie de la mère et de l’enfant »
1 – Le procès des sages femmes impliquées dans le décès d’Astou Sokhna pour une supposée « négligence médicale » a lieu aujourd’hui. Que vous inspire la fin tragique de cette femme décédée en couches ?
C’est un grand sentiment de désolation et une tristesse infinie qui m’ont envahi en apprenant le décès de cette brave dame décédée lors d’un accouchement.
Je suis tenté de dire qu’il s’agit hélas d’un décès de plus, un décès évitable mais qui illustre, à bien des égards, la détresse des femmes sénégalaises face à la maternité. Cela reste insupportable et insoutenable.
2 - Etes-vous d’accord avec les condamnations qui fusent de partout et qui mettent en cause les sages femmes ?
Face à des situations qui mettent en péril le destin de la mère et de l’enfant, il est extrêmement important de mesurer à sa juste valeur et avec sérénité les causes et les solutions à mettre en exergue pour éradiquer le taux élevé de mortalité maternelle et infanto juvénile dans notre pays.
Ensuite, il nous faut situer les responsabilités de chaque élément de la chaine intervenant dans le processus de la maternité. Il ne sert à rien, dans ce contexte, de s’empresser à vouer aux gémonies le personnel médical et les braves sages femmes du Sénégal qui, avec des moyens dérisoires, se battent quotidiennement pour sauver la vie de la mère et de l’enfant.
3 - Le taux de mortalité maternelle reste toujours élevé au Sénégal ?
Au Sénégal, chaque 4 ou 6 heures, une femme meurt en donnant la vie. Statistiquement, on dénombre près de 2500 à plus de 3000 femmes qui décèdent chaque année durant le processus de la maternité. C’est inacceptable et inadmissible, même si des efforts considérables ont été entrepris ces dernières années. La situation reste très critique et mérite une attention particulière de la part des pouvoirs publics et de l’action citoyenne pour protéger les femmes sénégalaises qui sont le socle de la famille et de la société.
4 - Qu’est-ce qui explique ce drame de la mortalité maternelle qu’on a du mal à éradiquer ?
La situation globale de la mortalité maternelle a diminué de près de 38% entre 2000 et 2018, passant de 344 à 212 décès pour 100.000 naissances, même si on est encore loin de l’objectif millénaire du développement humain durable, c’est-à-dire moins de 70 décès pour 100.000 naissances vivantes.
Dans notre pays, les données officielles indiquent que le ratio de la mortalité maternelle a baissé de 392 décès pour 100.000 naissances vivantes en 2010 à 230 décès en 2018. Toutefois, ce taux est encore extrêmement élevé et il urge de le réduire encore considérablement.
La première protection du droit de la femme commence par le respect du droit à la maternité qui est un droit fondamental et un devoir pour l’humanité.
5 – Mais, selon vous, quelles sont réellement les causes de la mortalité maternelle ?
En dépit des progrès de la médecine, il est notoirement connu que la majorité des femmes qui meurent en donnant la vie, décèdent pour cause d’hémorragies, d’avortements non médicalisés, entre autres, mais surtout, de l’absence de prise en charge adéquate et de suivi approprié du processus de la grossesse jusqu’à l’accouchement.
Tous ces morts sont évitables avec un personnel médical qualifié, disponible, bien organisé et disposant des moyens adéquats pour préserver et protéger les femmes pendant la grossesse et à l’accouchement.
6 – Vous êtes Président de la Fondation « Maternité Solidaire ». Quels objectifs visez-vous à travers la dite fondation ?
La fondation a pour objet principal :
- la lutte contre la mortalité et la morbidité maternelles et périnatales, au Sénégal et en Afrique Sub-saharienne
- l'amélioration des connaissances, des attitudes et pratiques des femmes vis-à-vis des principaux facteurs de risque de mortalité et de morbidité maternelles et périnatales, à travers des activités d'information, de sensibilisation et d'éducation pour un changement de comportement ;
- la promotion chez le personnel de santé de la diffusion des meilleures pratiques de prévention et de traitement des problèmes de santé fréquemment rencontrés chez les femmes et les nouveau-nés ;
- la promotion de l'accès à des soins de qualité adaptés aux besoins des femmes et des nouveau-nés, surtout en banlieue et en milieu rural ;
- la contribution, à travers la recherche opérationnelle, à une meilleure connaissance et à une prise en charge plus efficiente des problèmes majeurs de santé maternelle et périnatale ;
- la surveillance prénatale, l'accouchement humanisé, la néonatologie, le dépistage et la prévention des cancers gynécologiques et mammaires, la planification familiale et la ménopause. Et, généralement, toutes activités se rapportant à l'objet ci-dessus ou susceptibles de favoriser son développement, sa réalisation ou son extension.
7 – Mais est-ce que votre cas personnel n’a pas déterminant dans la création de la fondation ?
Vous avez tout à fait raison, j’incarne un symbole vivant de la mortalité maternelle. Ma propre mère est décédée à ma naissance des suites d’une hémorragie et j’en porte éternellement les stigmates. Je suis un élément de la cause.
C’est pour éviter un tel drame à toutes les familles que je me suis levé depuis le 26 décembre 2015 pour faire de cet engagement le combat d’une vie. Je ne ménagerai aucun effort, aucune peine pour l’éradication définitive de la mortalité maternelle au Sénégal, en Afrique et dans le monde. Je sais qu’il nous faudra beaucoup d’efforts, de sueurs et d’imagination pour y arriver, mais nous allons relever le défi.
8 – Quelles ont été les dernières actions de la fondation ?
Malgré le Covid 19 qui a un peu entravé nos actions, nous avons pu appuyer les structures de santé des Communes de Taiba Ndiaye et de Notto Diobas, dans le cadre de notre plan d’action bi annuel 2020 – 2021.
Avec la fin probable de la pandémie, nous allons reprendre nos actions sur le terrain avec un budget annuel de cent millions de Francs (100.000.000 F CFA) pour l’appui aux maternités, aux structures de santé et le portage du plaidoyer de la lutte contre la mortalité maternelle et infanto juvénile.
9 – Peut-on s’attendre à une réalisation en termes d’infrastructure ?
Consacrer toute mon énergie pour cette cause est un sacerdoce pour moi et un combat de vie. Je profite de l’occasion pour remercier tous les membres de la fondation pour les efforts consentis dans cette bataille. Malgré la discrétion qui entoure leur contribution, je salue leur engagement dans cette dynamique.
Cela dit, mon principal objectif est la construction d’un hôpital ultra moderne consacré à la vie de la mère et de l’enfant et je ferai vraiment tout pour le matérialiser en sauvant les femmes face au désastre familial de la mortalité maternelle.
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