La crise de la Covid-19 et le conflit russo-ukrainien ont mis à nu la vulnérabilité du Sénégal qui importe 70 à 80 % de ses besoins alimentaires. En 2022, le Sénégal a dépensé 1 070 milliards de francs CFA pour l’achat de 10 produits alimentaires : riz, blé, maïs, huile, sucre, produits laitiers, fruits et légumes, entre autres.
Déterminé à renverser la tendance, le nouveau régime envisage de faire de la souveraineté alimentaire une priorité. Une décision que le Dr Cheikh Guèye approuve, car, croit-il, « la souveraineté la plus importante est la souveraineté alimentaire qui nous permet de retrouver notre dignité ».
Invité de l’émission "Objection" de ce dimanche sur Sud FM, ce membre de l’Initiative prospective agricole et rurale (IPAR) a esquissé la stratégie pour atteindre cet objectif de souveraineté alimentaire à moyen terme.
« C’est un défi immense, déclare Cheikh Guèye. Il doit être impulsé par l’État, c’est vrai. Mais il ne peut pas le faire seul. Il faudra nécessairement la mobilisation de tous les acteurs, notamment du CNCR (Conseil national de concertation et de coopération des ruraux) et des organisations de producteurs avec lesquels on va voir les mobilisations des contrats d’objectif, en tout cas un engagement commun pour atteindre cet objectif à moyen terme ».
Mais, précise le chercheur, « il y a beaucoup d’autres conditions qui sont liées à la réussite de cette souveraineté alimentaire ».
« D’abord, la souveraineté alimentaire, ce n’est pas que l’agriculture. Il y a également tous les autres domaines de la chaîne de valeur : l’élevage et la pêche, puisqu’on ne mange pas que les produits agricoles. La question du financement et la culture de consommation jouent également un rôle très important. Produire ce que nous mangeons est très important, mais manger ce que nous produisons l’est encore plus », argue-t-il.
Sous ce rapport, poursuit-il, « il faut des éléments solides en matière de culture de consommation, laquelle a beaucoup été extravertie ces dernières décennies avec l’importation de presque tous les produits que nous consommons ».
Ainsi, estime-t-il, « à moyen terme, on doit pouvoir inverser la tendance en matière de consommation des Sénégalais ».
À ce propos, il faudra, selon lui, « travailler sur la jeune génération qui ne mange plus ce qu’on prépare dans les maisons, qui est branchée sur le marché international de la consommation ».
« Tout cela, conclut-il, doit faire l’objet d’une étude très profonde pour comprendre les nouveaux modes de consommation des Sénégalais et voir comment les inverser sans doute par la culture, par le cinéma, le théâtre. Si l'on produit plus ce que nous consommons, il va falloir convaincre les Sénégalais à les consommer ».
3 Commentaires
Sur cette question, on se méfie des sénégalais qui mettent la pédale douce là où il faut être ferme. Nous préférons avoir faim en craignant DIEU que d' être des âmes damnées dans le monde éphémère de l' opulence
Poullo
En Juillet, 2024 (15:52 PM)On ne change pas les mentalités ou les habitudes alimentaires par décret. On ne les change même pas en essayant de persuader les gens de ''manger sénégalais'' quand ils veulent manger autre chose de disponible, qui se trouve sur le marché et qu'on l'encourage à manger par toutes sortes d'incitations.
C'est ce ''autre chose'' qu'il faut produire chez nous, c'est tout, en encourageant la production locale et en créant une industrie de transformation de nos produits agricoles, des industries vouées aux produits alimentaires et un ''made in Senegal'' de tout ce qui se fait ailleurs et dont les Sénégalais raffolent. Ainsi nous réduirons notre dépendance à l'étranger et créerons des entreprises et des emplois pour la jeunesse et industrialiserons notre pays.
Deux mesures sont urgentes à prendre à ce sujet:
1. D'abord et avant tout se débarrasser du franc CFA qui n'enrichit que la France et nous maintient dans un état de sous-industrialisation car le CFA étant arrimé à une monnaie forte (l'euro), nos produits se révèlent non-concurrentiels car nous n'avons pas la maitrise notre monnaie détenue par la France et ne pouvons en conséquence dévaluer par exemple en fonction de la conjoncture économique et de nos intérêts du moment.
2. Développer une politique économique protectionniste en interdisant par exemple l'importation de riz pour encourager la production locale et la consommation de notre propre riz. Si la concurrence internationale est éliminée, notre production de riz deviendra concurrentielle et beaucoup se lanceront dans la production de riz qui sera multipliée par 3 ou 5 en quelques années.
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