Un Américain sur quatre préfère regarder Netflix plutôt que de faire l'amour. Plus d'un tiers des Japonais de 16 à 19 ans disent ne pas être intéressés par la sexualité. Sommes-nous entrés dans l’ère de la sobriété sur l’oreiller ?
Aujourd'hui, nous sommes dans le grand supermarché de l'amour : sex-toys, films pornos ou applis de rencontre... tout est à portée de main. Et pourtant. En France, 43 % des jeunes de 18 à 25 ans n'ont connu aucun partenaire l'année dernière. Des spécialistes, invités de l'émission Le Débat de midi sur France Inter, ont listé les obstacles à la sexualité.
Des jeunes qui font de moins en moins l’amour
François Kraus est directeur du pôle Politique et Actualité à l’IFOP. Il a publié une enquête en février 2022. Il explique : « 43 % des jeunes n'avaient eu aucun partenaire au cours des douze derniers mois. C'est une proportion sensiblement plus élevée qu'en 2016, la dernière enquête. Et quand on met en perspective ces chiffres avec les données de l'ère pré-smartphones, vers 2005-2006, ou des données de l'ère d’avant le haut-débit dans les foyers, là, la baisse est vraiment significative. Une enquête très sérieuse faite aux Etats-Unis montre que 23 % des jeunes de moins de 30 ans n'ont eu aucun rapport sexuel, contre 8 % en 2008. »
Les réseaux, le porno plutôt que le sexe réel
Que préfèrent les jeunes à la sexualité ? François Kraus explique qu’« Une proportion non-négligeable d’entre eux sont de plus en plus addicts, par exemple aux réseaux sociaux, et aux différentes applications d'échanges, aux séries, aux films, ou aux films pornographiques. Ils assument plus le sexe de manière solitaire via par exemple la masturbation sur les sites pornos, ou les sex-toys, qui sont de plus en plus adaptés, on le sait, au plaisir féminin. »
Une conséquence de l’accès au porno
Pourquoi ce désamour de l’amour ? Pour le philosophe Alexandre Lacroix, les raisons de cette baisse du désir sont à chercher du côté de la représentation dominante de la sexualité. « L'exposition à la pornographie commence très jeune aujourd’hui : dès qu'on a un smartphone entre les mains, en moyenne à l'âge de onze ans. Or, l'âge du premier rapport sexuel autour de 16 ans n'a pas évolué ces 40 dernières années. Donc pendant 5 ans, l’éducation à la sexualité se fait à travers les plateformes qui diffusent des vidéos pornographiques en streaming. La performance y est très présente. Il y a alors une forme d'accumulation, et peut-être un effet de lassitude. Cela crée en tous les cas une injonction à la performance, une injonction au plaisir qui peut avoir un effet contre-productif.
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