La disparition des 13 jeunes originaires de la commune de Bounkiling, dans la région de Sedhiou, fait encore couler beaucoup de larmes. Le quartier Kegneto, situé à la périphérie sud de la commune, est toujours dans l'émoi et la consternation après avoir appris que 11 de ses enfants sont restés dans les eaux de l'océan. Bounkiling commune en a perdu deux.
Dans le quartier Kegneto, la tristesse se lit sur tous les visages. Quasiment chaque maison a perdu un des siens. Papa Cissé a perdu son neveu Mamoudou Faty, marié et père d'un garçon de deux ans et demi. ''Lorsqu'un jour il m'a parlé d'un projet de voyage, je lui ai dit que quand on est seul homme dans une famille, on n'entreprend pas un long et périlleux voyage. Comme il ne m'en parlait plus, j'avais conclu qu'il avait renoncé. Mais à ma grande surprise, depuis plus de trois mois, il n'a pas fait signe de vie. J'ai compris qu'il était parti'', a expliqué l'oncle maternel du jeune Mamoudou Faty.
Pourtant, le regretté Mamoudou Faty avait réussi à décrocher un emploi de boulanger à Bounkiling. Selon son oncle, c'est grâce à ce travail qu'il a obtenu une parcelle à usage d'habitation. Après y avoir construit une maison, il a déménagé avec sa famille qui était à la charge de son oncle.
''Ses deux parents, sa femme et son fils vivaient chez moi. A l'époque, il n'avait pas encore de travail et ses deux parents vivant avec un handicap n'étaient pas en mesure de subvenir aux besoins de la famille'' informe Papa Cissé.
Sur les raisons profondes de son départ, l'oncle parle de l'influence de ses camarades qui sont arrivés sans grosses difficultés et qui ont commencé à faire des réalisations dans le village. Il se demande comment il a pu mobiliser autant d'argent pour tenter le voyage alors que son emploi lui permettait juste de s'occuper de sa femme Mariama Cissé, de son garçon et de mère puisqu'il a perdu son père.
Aujourd'hui, Papa Cissé écœuré, désemparé ne compte que l'œuvre du bon Dieu et sur sa miséricorde et sur celle de la communauté pour les lourdes charges familiales qui vont peser encore sur ses épaules.
Chauffeur contractuel à la Sonacos de Ziguinchor, Papa Cissé prédit déjà de grosses difficultés soulignant qu'avec le manque d'arachides l'année dernière, ils n'ont pratiquement pas travaillé la saison dernière. Pour l'instant, toute aide en provenance des autorités locales comme étatiques allant dans le sens de soulager la famille est attendue à bras ouverts
À côté du domicile de Papa Cissé, la famille Faty est aussi affectée par le drame. Le jeune Assane Faty, célibataire sans enfant, faisait partie du voyage sans retour.
Âgé de 23 ans, Assane Faty avait arrêté les études pour embrasser l'informel. Demba Cissé, son frère de mêmes parents rapporte qu'après la saison des pluies, il travaillait comme manœuvre dans les chantiers pour subvenir aux besoins de ses vieux parents. Mais personne ne soupçonnait qu'il avait l'idée d'emprunter les pirogues. Et d'expliquer comment il a appris son voyage.
''Un jour, je l'ai vu prendre la direction de Médina Wandifa à bord d'une moto Jakarta. Jusque tard la nuit il n'était pas revenu. Le lendemain, je ne l'ai pas vu. C'est en m'informant des raisons de son voyage qu'on m'a dit qu'il a voyagé. C'est la toute dernière image que j'ai retenue de lui. Lorsqu'on nous a informés dimanche que leur embarcation avait coulé, c'était insupportable. Je cherchais dans l'imaginaire ses derniers mots, ses derniers mouvements dans la maison, bref je tentais de retracer tout ce qu'on a vécu ensemble. Mais hélas ! Tout était vide. L'idée que je ne le verrai plus m'a plongé dans une tristesse profonde. À chaque fois que je vois mon père et ma mère, je ne puis m'empêcher de pleurer'' témoigne son frère. Il explique que c'était dans le souci de pouvoir faire quelque chose pour ses parents qu'il avait arrêté les études en 2021 pour se rendre utile. Il faisait mille métiers rien que pour ne pas se sentir inutile dans la maison.
''Aujourd'hui, il a certainement dans son esprit voulu être plus utile en tentant l'émigration clandestine, mais le ciel en a décidé autrement. On s'en remet à Dieu'', se résigne Demba Faty.
3 Commentaires
Défenseur
En Janvier, 2024 (20:12 PM)Toi
En Janvier, 2024 (04:01 AM)Participer à la Discussion