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Comment les scientifiques produisent des fantômes

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Comment les scientifiques produisent des fantômes
Photo: Création d'un "sentiment de présence" dans le laboratoire de l'Ecole polytechnique de Lausanne.

Faut-il être malade pour voir des fantômes ? Maupassant et son Horla, Hoffmann dans ses contes ou Poe dans ses nouvelles semblaient assez hésitants sur le sujet. Depuis qu’en juin 1970, alors qu’il redescendait épuisé du Nanga Parbat, dans l’Himalaya, en compagnie de son frère, Reinhold Messner a éprouvé le sentiment qu’« il y avait un troisième grimpeur avec nous, un peu sur ma droite, quelques pas derrière moi, juste en dehors de mon champ de vision », l’alpiniste italien a compris que des conditions extrêmes pouvaient engendrer cette impression a priori inexplicable. 

Une équipe de l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL) vient de montrer qu’un tel « sentiment de présence » pouvait être généré en laboratoire, à l’aide d’un robot, par la simple perturbation du mécanisme de perception spatio-temporelle. Elle publie dans la revue Current Biology un article décrivant ce dispositif.

De nombreux travaux avaient déjà associé ces « apparitions » à des perturbations cérébrales chez des schizophrènes, épileptiques, migraineux… Autrement dit, les fantômes n’existaient que dans nos têtes. Les chercheurs suisses ont quand même voulu y voir de plus près. Ils ont analysé les cerveaux de patients présentant ces symptômes : en l’occurrence douze personnes, en majorité épileptiques, dont ils ont scruté l’encéphale à l’aide d’images à résonance magnétique (IRM). Ils y ont trouvé des lésions dans trois régions corticales – les cortex insulaire, pariéto-frontal et temporo-pariétal –impliquées dans la conscience de soi, le mouvement et la position.


Discordance temporelle et spatiale

Les neurologues de l’EPFL ont donc émis l’hypothèse que ce sentiment de présence relevait d’une difficulté à conjuguer ces différents sens pour établir une perception « cohérente et unitaire de notre propre corps ». Pour s’en assurer, ils sont allés voir leurs collègues du département de robotique. Ensemble, ils ont conçu un appareil capable de produire de la discordance temporelle et spatiale. Les yeux bandés, le sujet de l’expérience tend son bras puis le déplace devant son corps, le doigt dans un capteur. Derrière lui, un robot reproduit ces mouvements en lui touchant le dos. « Pour le cerveau, il y a un conflit spatial, explique Olaf Blanke, directeur du centre de neuroprothèses de l’EPFL et premier signataire de l’article. Un mouvement effectué devant soi ne doit pas se traduire par une sensation dans le dos. Mais ce conflit, il le résout. » Les sujets sains ont ainsi affirmé avoir éprouvé le curieux sentiment de se toucher eux-mêmes le dos. Faux dans la réalité, mais cohérent.

Les chercheurs ont ensuite ajouté une discordance temporelle. Cette fois, le robot reproduisait les mouvements avec un décalage d’une demi-seconde. Dans ces conditions asynchrones, plusieurs sujets ont eu l’impression que ce n’était ni eux-mêmes, ni le robot qui leur titillait le dos mais une autre, voire plusieurs autres personnes.


« Pour la plupart d’entre eux, ce sentiment n’était pas aussi violent que chez les sujets malades, précise Olaf Blanke. Et il disparaissait quand l’expérience s’interrompait. Mais certains ont eu des réactions très fortes, jusqu’à demander d’arrêter l’expérience tant ils se sentaient mal. »

Espoir pour les épileptiques

Giulio Rognini, du département de neurosciences cognitives de l’EPFL, décrypte le résultat : « Notre cerveau possède plusieurs représentations de notre corps. Dans des conditions normales, il est capable de les rassembler en une perception unitaire de nous-même. Mais lorsque le système dysfonctionne, par maladie ou robot, une deuxième représentation de notre corps est parfois induite et n’est pas ressentie comme “moi” mais comme autrui, comme une présence. »

Les chercheurs suisses n’entendent pas s’arrêter là. Si un robot peut créer un sentiment de présence, peut-être peut-il aussi le faire disparaître. Autrement dit, corriger certaines discordances subies par des sujets malades. Un espoir pour les épileptiques. Une menace pour les fantômes.


1 Commentaires

  1. Auteur

    Janus

    En Novembre, 2014 (09:35 AM)
    Regardez la vidéo du test effectué : http://www.rts.ch/video/info/journal-19h30/6283384-des-chercheurs-reussissent-a-reproduire-des-illusions-paranormales.html   <img src="https://images.seneweb.com/content/seneweb/generic/images/smileys/bravo.gif" alt=":bravo:">    <img src="https://images.seneweb.com/content/seneweb/generic/images/smileys/bravo.gif" alt=":bravo:">    <img src="https://images.seneweb.com/content/seneweb/generic/images/smileys/bravo.gif" alt=":bravo:">  



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