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COLONEL MASSAMBA DIOP, DIRECTEUR SORTANT DE L’HOPITAL ARISTIDE LE DANTEC « La vérité est que la santé a un coût ; il faut le payer »

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COLONEL MASSAMBA DIOP, DIRECTEUR SORTANT DE L’HOPITAL ARISTIDE LE DANTEC « La vérité est que la santé a un coût ; il faut le payer »
La crise sociale qui a secoué récemment les hôpitaux de Kaolack, Louga, Ziguinchor entre autres structures sanitaires du pays semble se calmer progressivement. A l’hôpital Aristide Le Dantec, des pistes nouvelles sont en voie d’exploration dans le but d’apporter des solutions rapides aux problèmes d’approvisionnement en médicaments ; également en matière de fonctionnement et d’investissement au sein de la structure hospitalière. Le Directeur Massamba Diop (entretien réalisé à deux jours de son affection à Kaolack), qui se dit assez satisfait des mesures prises par le Premier ministre pour sortir du malaise social donne ici quelques éclairages en attendant des actions énergiques qui devraient sortir le système de santé au Sénégal dans sa léthargie actuelle. 

Ce n’est plus un secret que les structures sanitaires du pays traversent de réelles difficultés. Comment au niveau de l’hôpital Aristide Le Dantec, vivez-vous une situation ?

Il est vrai que les structures sanitaires du pays traversent un malaise. Ce qui signifie qu’effectivement cette situation qui prévaut à Dantec est la même dans les autres hôpitaux du Sénégal. A dire vrai, nous sommes dans une situation de rareté des ressources, qui est à l’origine de nombreux dysfonctionnement dans nos structures sanitaires. S’y ajoutent bien sûr les populations qui sont de plus en plus pauvres mais exigeantes. Tout comme d’ailleurs les travailleurs qui exigent les primes de motivation qui ne tombent toujours pas en temps réel. Les salaires sont payés au plus tôt le 4 ou le 5 de chaque mois. Les fournisseurs de produits consommables sont, eux, payés une ou deux fois par trimestre. Ce qui fait que les charges de fonctionnement deviennent de plus en plus lourdes et les produits nécessaires deviennent rares. L’hôpital éprouve encore d’autres difficultés liées au recouvrement de ses créances. Les malades ne payent toujours pas au comptant, les factures des IPM et les imputations budgétaires nous parviennent par compte goûte. En plus, les cas sociaux deviennent de plus en plus nombreux. Nous assurons également la prise en charge du plan sésame qui assure la gratuité des soins aux personnes âgées de plus de 60 ans. En somme, un ensemble d’activités que nous menons et qui nous coûtent souvent cher parce que les remboursements ne se font pas dans les délais.

Toutes ces contraintes font que l’hôpital Aristide Le Dantec à l’instar des autres structures, rencontre de sérieux problèmes de trésorerie.

Quels sont les services qui sont les plus touchés par cette crise de trésorerie ?

En dépit de ces problèmes, il faut dire que tous les services fonctionnent. Le seul hic c’est qu’on ne peut pas atteindre la vitesse de croisière avec ces problèmes. On fait tout pour rationaliser les ressources et ne pas les utiliser dans un laps de temps très court. C’est en particulier au niveau du diagnostic ou au niveau du bloc opératoire que les difficultés sont le plus souvent constatées. Soit on a des examens qu’on a du mal à faire, soit les réactifs nécessaires ne sont pas livrés, ou il y a des actes de chirurgie qui ne sont pas faits. Tout cela dépend en fait de l’approvisionnement en consommables par les fournisseurs. Quand les fournisseurs ne sont pas payés, ils montrent une certaine réticence. Mais, globalement, on remercie le bon Dieu, aucun service n’est à l’arrêt actuellement.

D’aucuns soutiennent que le bloc opératoire ne fonctionne pas depuis deux mois ? Vous confirmez ?

L ‘hôpital prend toutes les urgences. C’est au niveau du programme opératoire qu’on a diminué le nombre de patients reçus car les moyens dont nous disposons se sont amoindris. Par conséquent, la capacité d’intervention a été réduite. C’est parce qu’également nous sommes de plus en plus obligés de rationaliser nos moyens.

Devant une telle situation, comment se présente le climat social ?

Le climat social évolue en dents de scies. Aujourd’hui, on est dans le creux de la vague. S’il y a des moyens, on paie tous nos arriérés. Mais, il suffit de rester deux ou trois mois sans être payés pour que les travailleurs piquent une colère noire. D’ailleurs, ils commencent à bouger et à proférer des menaces contre la direction. C’est pour vous dire que le climat social à l’hôpital Le Dantec évolue comme les marées qui sont tantôt hautes, tantôt basses. Notre rôle à nous, est d’essayer de discuter avec les travailleurs, de partager l’information avec eux pour qu’il y ait beaucoup plus de visibilité dans ce que nous faisons. C’est pourquoi nous profitons de l’occasion pour lancer un message aux travailleurs pour plus de compréhension. Donc, le climat social est très instable. Il faut la gérer alors avec beaucoup de tact et de diplomatie et surtout avec beaucoup de communication.

C’est un travail collectif. Il ne peut pas reposer sur les seules épaules d’un seul directeur. Il faut toute une équipe et des partenaires sociaux qui ont une bonne capacité d’écoute, de compréhension et pour discuter avec la base. Les partenaires ont aussi un travail très difficile car on les accuse parfois d’être des corrompus. Je pense que c’est la même situation qui prévaut dans toutes les entreprises quelles qu’elles soient. Les difficultés ont souvent la même origine qui est l’insuffisance des ressources financières.

Au Sénégal, sur 11 millions d’habitants, les 80 % des Sénégalais n’ont pas de couverture sociale. Donc, si on place la barre des tarifs de consultations très haut soit à 15.000 FCfa, l’intervention chirurgicale à 250.000 FCfa ou plus comme cela se pratique ailleurs, nos jeunes filles, nos mamans, nos enfants, nos grand-mères et grands pères vont tous mourir, faute de soins. C’est cela que nous voulons éviter. C’est à cause de cela que nous connaissons notre situation actuelle

N’y a-t-il pas lieu de tenir le langage de la vérité aux populations ?

Le langage de la vérité qu’il faut tenir aux gens c’est de leur demander de payer les consultations. Les malades disent qu’ils n’ont pas les moyens de payer leurs soins. Et ils disent que nous avons les moyens de s’acquitter de cette mission. Les moyens sont les hommes d’abord, les infrastructures, les équipements, les consommables. Les produits consommables qu’on achète à l’extérieur, on le paie avec les activités. Si les gens refusent de payer et font le profil bas alors que faire ? La vérité est que la santé a un coût ; il faut le payer. Les hôpitaux au Sénégal peuvent fonctionner correctement. Il y a toute l’expertise nécessaire pour faire fonctionner les hôpitaux. Ce qui n’est pas disponible, ce sont les financements nécessaires pour la prise en charge des problèmes de santé. L’Etat a fait un maillage dans le système de santé. Dans chaque région, il y a un hôpital. Dans chaque circonscription, il y a un centre de santé. Dans chaque village aussi, il y a un poste de santé. L’Etat a fait son devoir. Ce qui reste maintenant c’est le suivi. Et si on veut donner des soins gratuits, il faut mettre en place un système de sécurité sociale comme en France ou dans les pays développés. Mais, on sait que la première structure déficitaire en France c’est la Snr. La sécurité sociale accuse annuellement plusieurs milliards d’euros de déficit. C’est parce que le coût de la santé est devenu exorbitant. Ici, ce n’est pas encore pareille, on a des Ipm. L’Etat a fait beaucoup pour la Santé. Le plan sésame n’existe dans aucun pays du monde. C’est une leçon que le président de la République a donnée aux autres pays de l’Afrique et du monde. Les personnes âgées soignées gratuitement aux frais de l’Etat sans sécurité sociale, sans structure de prise en charge, il n’y en a qu’au Sénégal, à ma connaissance. J’avoue que cela a sauvé la vie à beaucoup de personnes âgées. Croyez-moi parce que je connais ce que je dis en ma qualité de président du Réseau des hôpitaux d’Afrique.

Qu’est-ce qui a été fait pour éponger les arriérés dus aux fournisseurs ?

Nous avons été reçus par M. le Premier ministre en présence du ministre du Budget et de Mme le ministre de la Santé et de la Prévention. Il y a des stratégies qui sont prévues. On va assainir les hôpitaux, faire l’audit de la dette des hôpitaux. L’Etat du Sénégal s’engage à assurer un peu le relais par rapport à la prise en charge de la dette pour aider les hôpitaux à payer leurs arriérés. Toutes les dettes qui sont réglementées et qui relèvent des dépenses publiques vont être auditées et l’Etat va nous appuyer pour le faire. Le Premier ministre s’est également engagé à aider les hôpitaux en augmentant les subventions compte tenu des difficultés que nous rencontrons après cet assainissement. Cela veut dire qu’il faudrait respecter les normes de gestion. Il ne faut pas également que l’ensemble des dépenses de personnels des hôpitaux dépasse 40 % du budget. Il est inconcevable que l’ensemble du budget serve à payer uniquement des salaires. Il faudrait investir en équipements, assurer la maintenance et les approvisionnements tout en améliorant le cadre de vie. Le Premier ministre s’est également engagé devant le ministre du Budget pour que l’ardoise de l’Etat vis-à-vis des hôpitaux notamment avec les factures du plan sésame, les cas sociaux, les imputations budgétaires, soit payée.

La fermeture de la maternité a-t-elle un impact sur le fonctionnement de l’hôpital ?

La maternité ne relève plus de la direction de l’hôpital. Les travaux relèvent du gouvernement du Sénégal, en particulier du ministère de la Culture qui travaille en parfaite symbiose avec le ministère de la Santé et de la Prévention. D’après les informations disponibles par écrit, le ministère de la Culture a fait les constatations, sélectionnées, entreprise que nous connaissons et qui est chargée de réaliser les travaux à terme. Nous savons également qu’il y a une partie du financement qui est disponible et que les choses suivent leur cours correctement. Il faut y ajouter que la maternité n’est pas une petite affaire. Il y a beaucoup d’hôpitaux au Sénégal qui ont la taille de la maternité de l’hôpital Le Dantec. C’est le cas de certains hôpitaux départementaux qui font 150 à 120 lits en terme de capacité d’accueil, alors que la maternité ALD peut prendre plus de 200 patientes.



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