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Le rapport de la Cour des Comptes, un outil citoyen de lutte contre les fluxfinanciers illicites (Par M. Birahime SECK)

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Le rapport de la Cour des Comptes, un outil citoyen de lutte contre les fluxfinanciers illicites (Par M. Birahime SECK)
Le 13 février 2025, la Cour des Comptes a publié un rapport d’audit sur la situation desfinances publiques pour la période 2019 à mars 2024. Ce rapport a suscité beaucoup deréactions de la part des politiques, des journalistes, de la société civile, des citoyens etc. Cesréactions témoignent d’un dynamisme démocratique et citoyen libérant la parole en matièrede promotion de la bonne gouvernance et de lutte contre la corruption.L’initiative du Gouvernement est salutaire à plus d’un titre. 


Il s’agit du premier exercice d’auditsur la situation des finances publiques en application de l’article 1.7 du Code de transparencedans la gestion des finances publiques. Le rapport produit par la Cour des comptes est un outilsubstantiel d’identification de canaux de flux financiers illicites au cœur des régies financières.Ce rapport est une chance pour le Sénégal d’opérer des réformes en profondeur pour« arrêter l’hémorragie ». Le Gouvernement a donné l’occasion à la Cour des Comptes« d’aller » au cœur du système de gestion budgétaire et financière. C’est pourquoi, elle n’a pasmanqué de titiller des intérêts névralgiques de plusieurs centres d’intérêts.Il appartient, donc, aux citoyens d’exiger du Gouvernement et de la justice successivementdes réformes et des poursuites. 


Le citoyen doit être le bouclier de la Cour des Comptescontre toute tentative de manipulation politicienne en exigeant des clarifications surl’ensemble des constations effectuées par la Cour en matière de recettes, de dépensesbudgétaires, de gouvernances des comptes spéciaux du trésor et en matière de mauvaisegouvernance dans la gestion de la trésorerie et de l’endettementContrairement aux idées qui sont véhiculés par les détracteurs de la Cour des Comptes, lerapport publié le 13 février 2025 n’épargne personne dans la chaîne de responsabilité pour lapériode de gestion 2019 à mars 2024. Il s’adresse aux décideurs politiques, aux décideurstechniques, aux banques, aux tiers, à l’Assemblée nationale etc. Si un travail complémentaireet approfondi est réalisé par les juridictions compétentes, les résultats peuvent éclabousserdes tenants du régime actuel. C’est pourquoi, les citoyens doivent s’investir pour que lalumière soit faite sur les zones d’ombre présentées dans le rapport de la Cour des Comptes.A ce niveau nous comptons sur l’engagement du Président de la République et de son PremierMinistre. Ils ne doivent protéger personne. 

La Cour des Comptes est restée fidèle à sa démarche. En matière de recettes du budgetgénéral, la Cour des Comptes est loin de se dédire. Il est facile de le constater à la page 10.La Cour des Comptes dit : « l’analyse des recettes fait ressortir une concordance entre lesdonnées sur les recettes retracées dans le rapport et les lois de règlement /projet de loi derèglement 2023. En effet, les montants globaux des recettes de 2019 à 2023 tels que présentésau « tableau n°1 » du rapport sur la situation des finances publiques sont conformes à ceuxarrêtés par les lois de règlement sur la même période ».C’est dans l’analyse de ces données que la Cour des Comptes a constaté quelques anomaliesrelatives aux « rattachements irréguliers de recettes (page 11), à une situation non-exhaustivité de restes à recouvrer évaluées à 669,9 milliards de FCFA (page 12). Poursuivantson analyse, la Cour des Comptes présente les manquements notés dans l’évaluation desdépenses fiscales (pages 12, 13 et 14). A ce niveau, il faut rappeler que le Forum Civil a toujoursdemandé la publication des rapports sur les dépenses fiscales mais aussi leur rationalisation.

 2La Cour des Comptes a été toujours attentive sur les obligations de l’Etat à publier à tempsles rapports sur les dépenses fiscales ainsi qu’à leur exhaustivité, en atteste les constatationsfigurant dans son rapport n°028/CC/CABF/G du 13 juillet 2021 sur le Contrôle des recettesissues du secteur minier (2015-2018) de la page 65 à 69.Le rapport de la Cour des Comptes montre que les rapports sur les dépenses fiscales 2022et 2023 ne sont pas encore mis à la disposition du public. Cette obligation incombe ainsi aunouveau régime au vu des retards enregistrés.Au regard de ces constatations, va-t-on succomber devant le brouhaha politicien pour gardersous silence la perte de centaines de milliards ? L’Etat doit rester fort et déterminé pouridentifier les responsabilités. C’est aussi valable pour les constatations de la Cour en matièrede dépenses publiques. 

En matière de dépenses du budget général, la Cour des Comptes a aussi « fait ressortir uneconcordance entre les montants figurant au tableau n°7… du rapport sur la situation desfinances publiques et ceux arrêtés par les LR/PLR ».Au même titre que l’examen des recettes, la Cour des Comptes a aussi constaté quelquesmouvements suspects en matière de dépenses. C’est ce que la Cour a tenté de démontrer dela page 15 à la page 22 relativement aux « importants transferts au profit des services nonpersonnalisés de l’Etat » (le compte de dépôt CAP/Gouvernement, le compte de dépôtProgramme de Défense des Intérêts Economiques et Sécuritaires du Sénégal), aux «discordances sur les données des ressources extérieures » (variation notées dans les situationsproduites par la Direction de l’Ordonnancement des Dépenses Publiques (DODP), des écartsentre les données sur les prêts projets communiqués par la DODP et celles du Tableau desOpérations Financière de l’Etat (TOFE), des discordances sur les tirages des prêts projetsentre la Direction de la Dette publique (DDP) et la DODP). 


Comme annoncé plus haut, le travail de la Cour de la Comptes sur les dépenses publiquesn’épargne pas l’administration financière, les privées, certains gestionnaires de fait etc.Pour les Comptes Spéciaux du Trésor examinés durant la période de 2019 à 2023 à savoir lescomptes d’affectation spéciale (le Fonds national de Retraite, le Frais de contrôle des Sociétésà participation publique, de la Caisse de lutte contre l’incendie) et les comptes de prêts (prêtsaux particuliers), la Cour des Comptes reste claire et limpide : « Les diligences effectuées parla Cour montrent que les montants des recettes et des dépenses indiqués dans le rapport duGouvernement aux tableaux n°16 et n°17 ci-dessus concordent avec ceux arrêtés par les loisde règlement /projet de loi de règlement 2023 » page 23.


 Il est important de noter que pour toutes les recettes et les dépenses, exécutées, selon lesprocédures normales de gestion des finances publiques, la Cour des Comptes n’a pas fait deremarque particulière. De plus, il faut relever que la Cour des Comptes ne peut travailler quesur la base de documents produits par le Ministère des Finances et du Budget. Ces documentsretracent les opérations dont les comptables publics sont assignataires. A cet effet, toute autreinformation qui n’entre pas dans ce cadre n’est pas comprise dans les documents de redditionsdes comptes et n’engage donc pas la Cour des Comptes. De façon générale, les pièces surlesquelles la Cour des Comptes travaille sont le compte administratif de l’ordonnateur, lecompte général de l’administration des finances, les comptes individuels des comptables3principaux, les projets de lois de règlement, les lois de finances de l’années, les décrets d’avanceetc.Cependant, si des opérations sont exécutées hors budget, la Cour des Comptes ne peut, apriori, les traiter à moins qu’on ne lui présente des éléments nouveaux concernant cesopérations.Le registre de la gestion de la trésorerie et de l’endettement présenté par la Cour desComptes dans son rapport publié doit attirer l’attention de tous les citoyens. A ce niveau, laCour des Comptes a présenté un massacre financier et budgétaire traumatisant venant surtoutd’une administration financière présentée comme l’une des meilleures en Afrique.Les constatations faites par la Cour des Comptes sur la gestion de la trésorerie et del’endettement doivent aussi pousser le Gouvernement à faire éclater la vérité. Aucune réformepertinente ne peut s’opérer sans situer les responsabilités à ce niveau. C’est la moindre deschoses.Il faut, aussi, rappeler que les constatations faites par la Cour des Comptes dans son dernierrapport en matière de gestion de la trésorerie et de l’endettement avaient été relevées par laCour dans son rapport d’audit de la Dette publique n°19/22/CC/CABF/G du 25 aout 2022. 



A ce niveau, cependant, il y a lieu de relever des tentatives de manipulation car, ce rapporttraite d’un autre périmètre de gestion de la dette publique à savoir celle de 2018 à 2020. Il estsouvent arrivé que certains essaient de comparer les deux rapports en matière de volume dela dette alors que les périmètres de gestion ne sont pas les mêmes.Le dernier rapport de la Cour des Comptes traite de façon limpide de la gestion de 2019 àmars 2024.En analysant le dispositif de Contrôle interne comptable de l’administration financière, la Courdes Comptes avait noté dans son rapport de 2022 plusieurs manquements et faiblesses dansla gestion procédurale et organisationnelle de la dette publique au Sénégal.A la page 17 du rapport de 2022 sur la gestion de la dette pour la période 2018-2020, la Courdes Comptes avait bien mis en exergue la défaillance du système d’information, des risques dediscordance entre données de l’ordonnateur et celles du bailleurs, du défaut derapprochements bancaires, la faiblesse des activités de contrôle des opérations de la DODP,de l’absences de cadre de concertation dans la gestion des prêts projets, absence de manuelsde procédures et de cartographie des risques ; insuffisance dans la gestion des prêts projets,écarts entre fichiers de suivi et pièces justificatives, non concordance des tirages entres la DDPet la DODP, insuffisances dans la gestion des bons et obligations etc. 


En revenant sur le rapport de la Cour des Comptes publié le 13 février 2025, il est facile derelever que l’administration financière Sénégalaise est rattrapée par les insuffisances soulevéesdans le précédent rapport d’audit sur la dette publique.Le débat politicien ne doit pas prendre le dessus sur le besoin de vérité concernant la dettebancaire importante contractée hors circuit budgétaire, la dette garantie non exhaustive,l’encours de la dette supérieur au montant figurant dans les documents de reddition, , lestenants et les aboutissants des mouvements autour des 15 milliards impliquant le TrésorierGénéral (page 27, les dépenses effectuées sans autorisation de l’Assemblée nationale (page429), l’emprunt non autorisé par la loi de finances (page 30), les dépenses effectuées sanscouverture budgétaire (page 30), le reliquat de l’emprunt obligataire de 2022 (114 milliards)non versé au Trésor public (page 33)La vérité voudrait que la justice mène des enquêtes pour édifier les Sénégalais sur les Dépôtsà terme (DAT) virés à des tiers (page 32). Qui sont les Ministres impliqués ? C’est quoi leurniveau de responsabilité ? Pourquoi les DAT n’ont pas été virés au Trésor public ? Qui sontles donneurs d’ordre ? On parle ici de 141 milliards quand même. Les Sénégalais méritent ausside connaitre le fondement du gap de trésorerie d’un montant de 114,4 milliards dans le cadrede l’opération du Sukuk SOGEPA (page 33 à 36).La cour des comptes informe aussi que d’importantes dettes bancaires ont été contractéeshors circuit budgétaire (page 37). Va-t-on croiser les bras pour ne pas situer lesresponsabilités ? Le peuple Sénégalais ne mérite-t-il pas de savoir ? Les constatations de laCour des Comptes présentées ici sont loin d’être exhaustives.A ce stade, il est important de louer le travail effectué par la Cour des Comptes et d’œuvrerpour son renforcement.Maintenant, le travail réalisé par la Cour des comptes doit être complété et approfondi, entoute indépendance, par les juridictions pénales au nom de la transparence et de la lutte contreles flux financiers illicites.Les constatations faites pour la Cour des comptes tout au long du rapport et dans saconclusion (page 45) sont interpellatives et très sérieuses.Le travail effectué par la Cour des Comptes est un prétexte majeur pour aller vers desréformes en profondeur de notre administration, notamment, des finances. La valeur ajoutéegénérée par les constatations de la Cour des Comptes est plutôt technique. Elle est loin, trèsloin d'être politique. L’Etat du Sénégal doit élaborer une politique claire en matière de luttecontre la corruption au sein de l’administration avec comme socle la redevabilité et l’accès àl’information. Un gouvernement qui joue avec l’opacité ne peut espérer mobiliser lesressources nécessaires pour financer le développement.


 Ainsi, la lutte contre la corruption ausein de l’administration doit être un préalable pressant. Elle passe par le renforcement descorps de contrôle interne (Direction et Inspection de contrôle interne), d’un systèmecomptable fiable et sophistiqué. La lutte contre la corruption au sein de l’administrationnécessite un portage citoyen solide et durable et non populiste. Il faut l’implication de tous lesacteurs porteurs de dynamiques de changement. Pour la réussir, il faut, déjà, gouverner parl’exemple dans l’humilité, la sobriété et sans arrogance.Le peuple Sénégalais doit rester debout pour que les hommes politiques de tout bord nenoient pas le poisson avant de disparaître avec l'eau. 

M. Birahime SECK,Coordonnateur Général du Forum Civil, section Sénégalaise Transparency International ;Vice-Président deTax Justice Network Africa (TJNA)/2021-2024 ;Intervenant au Colloque régional sur les enjeux et mécanismes de lutte contre la corruption,l’évasion fiscale et les flux financiers illicites (FFI) en Afrique de l’Ouest organisé par la CENOZOdu 17 au 18 février 2025 à Cotonou (Bénin).5


7 Commentaires

  1. Auteur

    il y a 3 jours (18:59 PM)
    L argent de pastef fait effet. Comme Trump a fermé les robinets…,
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  2. Auteur

    il y a 3 jours (19:06 PM)
    Filles chaudes vous attendent sur - - www.Hot4.eu
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    Auteur

    Zeund

    il y a 3 jours (19:10 PM)
    Que de la foutaise! Il publie cet article afin de se faire remarquer; l' action des sociétés civile au Sénégal n'est que pure politique déguisée. On ne sent aucun impact de leurs combats sur la société. Kil la ferme et change de fusil d'épaule car leurs interets personels pimento sur tout.
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    Auteur

    Verite

    il y a 2 jours (04:54 AM)
    Malheureusement utilisée à d'autres fins,j'ai honte pour la justice de mon pays
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    Auteur

    Verite

    il y a 2 jours (04:54 AM)
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