En 2002, les drapeaux bretons se dépliaient sur le Stade de France de Saint-Denis (Seine-Saint-Denis) pour la première Nuit celtique, grand-messe menée par l'équipe du Festival interceltique de Lorient. Quelques mois plus tard, le hip-hop faisait son entrée sur la pelouse avec la soirée Urban Peace, une expérience renouvelée avec succès en 2008. En 2009, le groupe antillais -Kassav' y fêtait son trentième anniversaire lors d'une Nuit créole bourrée à craquer.
Le 11 juin, ce sera le tour de l'Afrique, rassemblée dans une Nuit africaine. Dix-sept artistes originaires de neuf pays francophones, cent cinquante musiciens et danseurs, pour cinq heures de musiques dansantes. L'affiche est alléchante pour le grand public : Alpha Blondy, Magic System (en tête des hit-parades français), Mory Kanté, Baaba Maal, Oumou Sangaré...
Figure importante de la musique africaine, l'Ivoirien Meiway aura, comme les autres, 'sa part de gâteau, vingt-cinq minutes de show, et c'est très bien, parce que justice se fait pour cette musique qui n'a pas accès aux grands plateaux de télévision, ni à la radio'.
Un concert marathon, et unique, au Stade de France nécessite une solide chaîne de production. L'idée de cette Nuit africaine est venue au producteur mauricien Yoven Sadaseeven, après que Luc Besson eut renoncé à un projet 'Black' imaginé pour fêter l'inauguration à Saint-Denis de sa Cité du cinéma. Yoven Sadaseeven s'est allié à l'agent artistique africain Suana José Kapesa et à l'Association pour le développement de la création, études et projet (ADC, EP).
L'Adcep est une agence de création de contenus. Elle avait accompagné le marché des arts du spectacle africains (MASA) créé à Abidjan en 1993 par l'Agence intergouvernementale de la francophonie, et dont les ailes ont été coupées pour raison politique. Elle organise depuis de longues années la Fête de la musique pour le compte du ministère de la culture. Responsable artistique à l'Adcep, Marie Audigier a voulu 'un plateau varié, qui montre la richesse des musiques africaines'. Deux filiales du Stade de France, SDF Prod et Stade de France Live Events, prennent l'organisation en charge.
Ce programme venu du continent noir est une première pour le Stade de France. Les grands concerts africains donnés en salle ont été jusqu'alors l'apanage du Palais omnisports de Bercy (17 000 spectateurs).
Premier du genre, en février 2000, celui du Congolais Koffi Olomidé (absent du Stade de France car retenu à Kinshasa par une plainte pour harcèlement sexuel, déposée par ses danseuses), suivi de son compatriote Papa Wemba, et plus tard, des grands bals annuels du Sénégalais Youssou N'dour.
Organiser une Nuit africaine au Stade de France de Saint-Denis est un beau pari. 'Cinquante ans après les indépendances africaines, toutes ces Afriques qui se retrouvent, de manière transgénérationnelle, dans le grand stade français, c'est formidable, c'est un sujet de fierté', dit le saxophoniste camerounais Manu Dibango, l'un des invités du 11 juin. 'Un pari risqué par les temps qui courent', ajoute le créateur de soul Makossa, pionnier de la world music.
Pour les promoteurs du concert, l'équation est simple : 65 000 places sont disponibles ; au 1er juin, un peu plus de 10 000 avaient été vendues. La variable tient aux habitudes de la communauté africaine, championne des achats spontanés, peu au fait des exigences de ventes de billets - un encombrement aux caisses du Stade de France est aussi inimaginable qu'un retard dans le déroulement du concert qui laisserait l'équivalent de la ville d'Auxerre sur le carreau, si les horaires de fonctionnement du RER étaient dépassés ! Ce que la préfecture de police ne saurait tolérer.
'Dix-sept têtes d'affiche, cent cinquante artistes, c'est un challenge. Les heures de passage sont inscrites dans les contrats, et là, je ne cède sur rien, je suis un panzer, dit Marie Audigier, en pleine mise en place des lumières, dix jours avant l'événement du Stade de France. 'Il a fallu récupérer le filage de tous les titres pour caler les éclairages, et ce, avec quelques problèmes, par exemple, des pannes d'électricité à Kinshasa, un débit Internet trop faible ailleurs.'
Les organisateurs ont une semaine pour mobiliser une communauté africaine qui s'est habituée au morcellement, comme en attestent les fêtes organisées le week-end au complexe LSC de la Plaine-Saint-Denis : plusieurs salles, plusieurs communautés, Maliens dans l'une, Sénégalais dans l'autre, etc. Journaliste ivoirien, Soro Solo, producteur de l'émission politico-musicale 'L'Afrique enchantée', diffusée tous les dimanches sur France Inter, voit dans cette Nuit africaine un 'conglomérat de talents, ainsi réunis sans doute pour des raisons commerciales, mais manquant de lisibilité sur le fond'.
Le contexte incite à la frilosité, poursuit Manu Dibango déjà passé par le Stade de France, invité de Yannick Noah en 2010. 'Ça balançait à gauche dans les années 1980-1990, ça balance à l'extrême droite aujourd'hui. Avant, tout le monde rêvait de l'étranger, aujourd'hui l'étranger est devenu lointain. Voyez, seuls les médias africains relaient la Nuit africaine, alors qu'un concert de Prince a été annoncé partout dans la minute. Y aurait-il deux catégories de Noirs ? La francophonie serait-elle encore et encore un handicap ?'
8 Commentaires
Lllll
En Juin, 2011 (18:48 PM)Leepape
En Juin, 2011 (18:53 PM)Oops
En Juin, 2011 (18:53 PM)Go
En Juin, 2011 (19:03 PM)Muslim
En Juin, 2011 (19:32 PM)la france sera bientôt africaine et musulmane insh'allah !!
Visionnaire
En Juin, 2011 (19:44 PM)Kamit
En Juin, 2011 (13:15 PM)Undefined
En Juin, 2011 (19:37 PM)Participer à la Discussion