"La France n'a pas dit son dernier mot" sort ce jeudi 16 septembre. Et vous n'y trouverez rien d'autre qu'une autojustification de sa candidature.
POLITIQUE - Ce ne serait donc pas le pouvoir qui l’intéresse. Encore moins les turpitudes de la vie politique. Non, si Éric Zemmour peaufine ses ambitions présidentielles, c’est parce que les événements l’y contraignent. Tel est le fil rouge de La France n’a pas dit son dernier mot (auto-édité chez Rubempré), le dernier livre du candidat putatif qui sort ce jeudi 16 septembre. Un récit de 342 pages qui nourrit un seul objectif: bâtir la légende d’un journaliste obligé par sa lucidité à sauter dans le grand bain de l’histoire. Un procédé rhétorique éculé pour ceux qui ont juré qu’ils n’y toucheraient pas (ou plus), utilisé récemment par Anne Hidalgo ou en 2016 par Nicolas Sarkozy.
Aucun chiffre. Nulle proposition. Pas même le début d’un programme. Seulement une fresque d’anecdotes et de réflexions proposée sous forme de frise chronologique qui démarre en 2006. Une narration autobiographique permettant à l’auteur de présenter ainsi les choses: son destin épouserait celui de la France. Point barre. Et presque malgré lui: "dans mes rêves d’enfant, je n’avais jamais imaginé être le chef de l’État". Mais ça, c’était avant que le monde entier ne le supplie de se lancer. "Le diagnostic, tu l’as fait depuis longtemps. Maintenant il faut agir", lui aurait lancé son fils, alors que "depuis des mois, voire des années, de nombreuses personnes, des amis et des inconnus, célèbres et anonymes, m’encourageaient à me présenter à corps perdu dans l’aventure présidentielle".
"Personne ne remplit le costume"
Après tout, Jacques Bompard, maire extrême droite d’Orange, ne lui a-t-il pas servi la "célèbre formule giscardienne" selon laquelle il n’était "pas le meilleur, mais le seul" capable de sauver la France? Et d’ailleurs, n’a-t-il pas lui même changé de dimension sans s’en rendre compte sur le plateau de CNews? "Je passe des analyses aux commentaires, des commentaires aux solutions, des solutions aux préconisations, pour la plus grande joie de mes aficionados, qui me projettent déjà à l’Élysée", écrit Éric Zemmour qui, au sortir d’une entrevue avec Marine Le Pen en 2020, est encore une fois contraint -ça alors !- de se rendre à l’évidence: "Mon constat est désolant: personne ne remplit le costume". Alors, si "personne ne remplit le costume"...
Enfin, son expérience de journaliste politique ne lui a-t-elle pas déjà ouvert les portes du pouvoir? Agapes avec des présidents en exercice, dîners avec tout ce que la droite compte de barons... Tout est raconté par le menu, jusqu’au moment où, bien évidemment, ses analyses finissent par irradier les convives. Même l’épouse d’Édouard Balladur en pincerait pour lui, quand Emmanuel Macron en personne solliciterait ses éclairages sur l’immigration. C’est dire s’il y a de quoi "remplir un costume". Et puis, Éric Zemmour doit quand même admettre que les exemples du Brexit et de la victoire de Donald Trump (dont il reprend allègrement les codes) lui ont donné des idées. "Je songe, non sans une certaine admiration envieuse, que toutes les grandes transformations partent de ces contrées", écrit-il. Pour preuve, il n’y a pas que ses compatriotes qui le poussent.
"Le Trump français, c’est vous"
Dans l’ouvrage, le polémiste affirme avoir reçu le 6 décembre 2016 Rosine Ghawji, une Franco-Américaine membre du Tea Party et ardente soutien de Donald Trump. Laquelle est, selon lui, personnellement venue lui dire ceci: "cela fait des mois qu’on a étudié la situation en France. On a bien vu les différences avec l’Amérique. On a tout compris. Le Trump français, c’est vous". Les pages et les années passent, et chaque histoire est l’occasion pour Zemmour d’accréditer la thèse selon laquelle il est le seul à avoir identifié un danger de "disparition" qui menacerait le pays.
Mais pas de quoi -encore- le pousser à franchir le Rubicon. Marine Le Pen a bien tenté de le débaucher à l’occasion des européennes de 2019, mais faute de pouvoir jouer les premiers rôles, il refusait de participer à cette "présidentielle des pauvres".
Or, pour 2022, les choses sont différentes: "rarement nous n’avons été aussi affaiblis, désunis, subvertis, envahis qu’aujourd’hui". Ce qui, forcément, oblige l’essayiste à ainsi poser les choses, avec un aplomb inversement proportionnel à son humilité: "Mais, à chaque fois, la France a trouvé en elle même, au sein de son peuple, que ce soit Jeanne d’Arc, Bonaparte, ou de Gaulle, un ‘homme providentiel’ qui porte le fer et rassemble les énergies au nom de la survie de la nation". On vous laisse deviner à qui il pense.
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