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Islam en France : le «Conseil national des imams» peine à aboutir

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Islam en France : le «Conseil national des imams» peine à aboutir
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Mis en chantier à l’automne, le projet de création d’un «Conseil national des imans (CNI)» ainsi que l’élaboration d’une charte engageant les grandes fédérations musulmanes peinent à aboutir. Programmée ce mercredi, une réunion qui devait se tenir au ministère de l’Intérieur a été finalement reportée. Les choses ne devraient pas aboutir avant janvier 2021.

«Le CNI se fera», assure à Libération un membre influent du Conseil français du culte musulman (CFCM) qui pilote le projet. L’installation du fameux CNI aurait dû avoir lieu dès décembre. Mais pour le moment, les discussions sont encore âpres. Sur la table : la charte engageant les fédérations musulmanes qui portent le projet. «Il a fallu adoucir des formulations», assure l’un des participants.

«Prétendue islamophobie d’Etat»

Ces négociations se font sous la pression du gouvernement, engagé dans la lutte tous azimuts contre ce qu’il appelle le séparatisme et l’islam politique, soupçonné d’être l’allié objectif du terrorisme. Selon les versions préparatoires de la charte consultées par Libération, les grandes fédérations musulmanes condamnent elles-mêmes les «instrumentalisations de l’islam». Au banc des accusés, la doctrine des Frères musulmans, le wahhabisme ou encore le salafisme. Cette énumération devrait, selon plusieurs sources, disparaître dans la version finale.


Autre question polémique : la notion d’islamophobie d’Etat, théorisée notamment par le Collectif contre l’islamophobie en France (CCIF) dont la dissolution par le gouvernement suscite la controverse. La charte prendrait position sur ce point en se rangeant du côté du gouvernement. Dans une version préparatoire, consultée par Libération, il est notamment écrit : «Tout en dénonçant les actes d’hostilités qui peuvent viser des musulmans et des symboles de leur foi, nous réaffirmons solennellement que la dénonciation d’une prétendue islamophobie d’Etat ne recouvre aucune réalité en France, et rejetons fermement les campagnes diffamatoires prétendant que les musulmans de France seraient persécutés.»

En dépit de ces difficultés, le projet de Conseil national des imams suscite un certain intérêt sur le terrain. Un collectif d’une centaine de mosquées a, lui aussi, élaboré sa propre charte, rendue publique le 9 décembre, le jour de la présentation en Conseil des ministres du projet de loi contre le séparatisme islamiste. «Le fait de mettre un cadre, des règles à la fonction d’imam ne peut être que bénéfique», estime Farid Kachour, l’un des responsables de la mosquée de Montfermeil (Seine-Saint-Denis), participant à cette initiative.

«Surpris de ce mutisme»

«Il est inacceptable d’abuser de l’islam et de l’instrumentaliser autant dans nos territoires qu’à l’étranger, de manière à perturber le bien-être, la sérénité et la paix du peuple français, dont nous sommes une composante essentielle», lit-on dans ce projet de charte. Selon Kachour, le collectif l’a envoyé au ministère de l’Intérieur et au CFCM. Sans recevoir de réponse… «Nous avons été surpris de ce mutisme», poursuit Farid Kachour. Cette initiative, assez novatrice, rassemble notamment d’importants lieux de culte de la région parisienne, non affiliés aux grandes fédérations musulmanes qui composent le CFCM.

Mais, en coulisses, se jouent d’autres batailles. L’une des principales priorités du président de la République, Emmanuel Macron, est de mettre un terme, comme il l’a répété à plusieurs reprises, aux influences étrangères exercées sur l’islam de France. Lors de son discours de Mulhouse, le 18 février, il avait ainsi annoncé la fin du système des imams détachés, des accords permettant à l’Algérie, au Maroc et à la Turquie d’envoyer (et de rémunérer) des ministres de cultes, officiant dans les mosquées de l’Hexagone.

«L’Algérie a déjà fait savoir qu’elle ne cesserait pas d’envoyer des imams», explique, à Libération, une source proche du dossier. De fait, l’enjeu est de taille pour la Grande Mosquée de Paris, sous contrôle algérien. C’est principalement grâce à son réseau de 120 imams rémunérés par Alger qu’elle dispose d’une certaine influence au sein de l’islam hexagonal.

Le 17 décembre, l’ambassadeur d’Algérie, Mohamed Antar Daoud, lors d’une visite à la Grande Mosquée de Paris, sous contrôle algérien, a, lui, envoyé quelques messages. «La Grande Mosquée de Paris est d’abord algérienne et ne sera jamais rien d’autre. Et c’est cela le plus important», a-t-il déclaré, à l’occasion de ce déplacement, à la télévision nationale.

«Le pape de l’islam»

Depuis, les milieux musulmans hexagonaux se livrent à l’exégèse des propos de l’ambassadeur. Est-ce une mise en garde à destination du gouvernement français ? Ou bien du Maroc à qui on prête régulièrement des velléités de reprendre le contrôle de la GMP ? Ou bien encore à l’actuel recteur, Chems Eddine-Hafiz qui doit donner des gages à la fois à Paris et à Alger ?

«Il se considère comme le pape de l’islam en France», s’agace l’un de ses détracteurs. Depuis la rentrée, le recteur de la GMP est, de fait, omniprésent dans les médias, cherchant à s’imposer comme un partenaire incontournable de l’exécutif. «La charte et le projet du conseil des imams ont réveillé les rivalités entre fédérations musulmanes», remarque-t-on au ministère de l’Intérieur. Pour certains, le projet de CNI serait même déjà mort né.

De fait, le gouvernement français est pressé d’obtenir des résultats dans sa lutte contre le séparatisme et les influences étrangères. «Cet agenda n’est pas partagé par chacun des partenaires», affirme un spécialiste du dossier. En voulant aller trop vite, l’exécutif risque de ne pas obtenir des résultats pérennes. Autant pour le futur Conseil national des imams que pour en finir avec l’islam dit consulaire. Des pays comme l’Algérie ou la Turquie savent déjà qu’ils peuvent jouer la montre…


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