Il y a des lieux où les symboles comptent plus qu’ailleurs. Où les mots contribuent à façonner la réalité. Où ils peuvent peser sur le destin des hommes. C’est le cas de la Terre sainte, berceau des trois grands monothéismes, que se disputent Israéliens et Palestiniens depuis trop longtemps et sans le moindre espoir de régler leurs différends si on les abandonne à un face-à-face aussi stérile que mortifère. Pour en sortir, il faut déjà changer les mots.
Les députés français ont cette semaine l’occasion d’y contribuer. Il faut les y encourager. L’Assemblée nationale doit débattre, vendredi 28 novembre, et voter le 2 décembre sur une proposition de résolution demandant au gouvernement français de reconnaître l’Etat palestinien. Cette bonne initiative, due au groupe socialiste, a son pendant au Sénat. Elle rejoint une démarche en voie de se généraliser en Europe, qui pourrait, jeudi 27, donner lieu à un vote au Parlement européen.
Les sceptiques auront raison de souligner que pareil vote ne lie en rien le gouvernement français. Celui-ci suivrait-il l’injonction des élus que cela ne changerait rien non plus à la situation juridique des Palestiniens. La reconnaissance d’un Etat ne peut être qu’internationale, sanctionnée par le Conseil de sécurité de l’ONU. Concernant la Palestine, on n’en est pas là, même si quelque 135 pays membres de l’organisation (sur un peu moins de 200) ont reconnu l’« Etat palestinien ».
Alors pourquoi soutenir l’initiative du groupe socialiste ? Se faire plaisir, se donner bonne conscience un après-midi d’automne au Palais-Bourbon ? Pas du tout. Il y a nombre de bonnes raisons d’appeler à la reconnaissance de l’Etat palestinien, quand bien même elles seraient purement symboliques. Elles sont fort bien présentées par un groupe de personnalités israéliennes – anciens officiers, anciens ambassadeurs, Prix Nobel, industriels, scientifiques, etc. – qui, dans une lettre à l’Assemblée nationale, exhortent les députés à voter la résolution socialiste.
L’ambition est d’exercer une pression sur le gouvernement de Benjamin Nétanyahou et sa coalition de droite et d’extrême droite. Opposé à la solution dite des deux Etats, il multiplie les implantations en territoire palestinien afin de rendre ladite solution impossible. Le mouvement national palestinien est divisé, faible – et parfois inconséquent. Mais M. Nétanyahou contribue à cette situation en attaquant en permanence le chef de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, afin de montrer qu’il n’a pas d’« interlocuteur palestinien ».
Le gouvernement actuel d’Israël ne cherche pas à préserver un quelconque statu quo territorial dans l’attente des résultats d’une éventuelle négociation. Il modifie par la force ce statu quo, ce qui empoisonne toute tentative de négociation. Laissés seuls à seuls, Israéliens et Palestiniens ont prouvé depuis plus de vingt ans qu’ils n’arrivent à rien. Sans l’exercice d’une pression internationale forte, le conflit continuera à dériver vers le pire : un affrontement religieux nourrissant une violence chaque jour plus radicale, comme on le voit à Jérusalem.
D’où l’importance politique de ces initiatives européennes – en Suède, en Grande- Bretagne, en Espagne, en Irlande, en France – qui, toutes, vont dans le même sens : refuser d’accepter la situation actuelle. En commençant avec des mots.
4 Commentaires
Le Dernier Apartheid
En Novembre, 2014 (07:59 AM)Pas plus que le IIIème Rich hitlerien, le IVème Rich Israélien ne pourra survivre au fardeau de ses crimes. L'humanité est une. Tous les peuples répugnent à voir des hommes manger de la charogne de leurs semblables.
Giss Guiss
En Novembre, 2014 (09:12 AM)A nouveau, s’il suffisait de se cantonner aux frontières de 1967 et de débâtir toutes les propriétés et habitations juives de Judée-Samarie pour parvenir à la paix, pourquoi et comment malgré les tenants et aboutissants qu’il n’y avait pas la paix avant 1967 ?
Tout bonnement parce que cette spéculation simpliste est fausse.
Kakashi Sensei
En Novembre, 2014 (11:00 AM)Concertation=paix
En Novembre, 2014 (15:22 PM)C’est une visite inédite. Dimanche 11 novembre, une délégation de dix imams et six responsables d’associations musulmanes de France a entamé une visite officielle en Israël et dans les Territoires palestiniens. Initiée par le Quai d’Orsay ainsi que les autorités palestinienne et israélienne, cette démarche pacifique vise à abolir les idées reçues sur les rapports entre les deux communautés.
Reportage - les journées de l’amitié judéo-musulmane en France
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