Edouard Philippe a annoncé en conférence de presse que le R-zéro était désormais proche de 0,6. C’est-à-dire que dix malades n’infectent que six nouvelles personnes.
Bonjour,
Votre question fait suite aux déclarations du Premier ministre, Edouard Philippe, dimanche lors de sa conférence de presse : «Nous avons évoqué ce concept un peu technique, mais absolument essentiel, qu’on appelle le R0 […] : le nombre de personne qu’un malade infecte ; la transmission de la maladie à partir d’un malade, vers combien de malades. Si on ne fait rien, parce que cette maladie est assez contagieuse, on observe un taux de l’ordre de 3 à 4 […]. Pour réduire l’épidémie, il faut que le R0 […] soit égal ou inférieur à 1. C’est comme ça que nous sommes capables de réduire la circulation du virus […] et d’éteindre l’épidémie progressivement. Grâce au confinement, les épidémiologistes estiment que nous avons réussi à faire passer ce R 0 [à une valeur voisine de] 0,6. C’est-à-dire que dix malades n’infectent que six nouvelles personnes.»
Le taux de reproduction de base d’une maladie est une notion centrale en épidémiologie. Elle permet de caractériser le potentiel épidémique d’une maladie. Pour estimer précisément ce taux il est possible de prendre en compte de très nombreux facteurs. Toutefois, dans sa version la plus simple, le calcul dépend de trois paramètres essentiels.
Premier facteur : la période durant laquelle la maladie est contagieuse (s’exprime généralement en jours).
Deuxième facteur : le nombre de personnes différentes avec lesquelles on est en interaction durant une période donnée (s’exprime généralement en «nombre de contacts par jour»).
Le dernier facteur est celui de la probabilité de transmission, autrement dit la facilité avec laquelle une contamination peut survenir à l’occasion de chaque «contact». Cette variable peut être influencée par différentes mesures de protections (lavage des mains, port de masque, etc.).
En multipliant les deux premiers facteurs, on obtient le nombre de contacts potentiellement exposés au cours de la durée de contagiosité. En multipliant par le dernier facteur, on dispose d’une estimation du nombre de personnes qu’un individu infecté est susceptible de contaminer. Autrement dit : notre taux de reproduction de la maladie.
Si un malade peut infecter en infecter plus d’un autre, la maladie se déploie rapidement. Dans le cas d’un R0 de 2, un individu en contaminera deux, chacun d’eux en contaminant deux autres, qui en contamineront eux-mêmes deux autres… 1, 2, 4, 8, 16, 32 : non seulement la maladie se déploie, mais elle se déploie vite.
Lorsque l’on parle de R0 inférieur à 1, cela signifie que si l’on prend un grand nombre de personnes infectées, on constate qu’elles n’ont réussi à contaminer qu’un nombre inférieur d’individus. Si ces nouveaux malades contaminent eux aussi un nombre encore plus petit de malade… la contagion finit par cesser d’elle-même.
Les mesures de confinement ont une influence directe sur le deuxième facteur cité plus haut : le nombre de personnes avec lesquelles on est en interaction durant une période donnée. La diminution de nos contacts quotidiens a, mathématiquement, entraîné une diminution du nombre de personnes nouvellement quotidiennement infectées. L’adoption de mesures «barrière», et notamment de mesures d’hygiène plus strictes, a également influé sur le troisième facteur de l’équation.
La diminution du R0 reflète une évolution de la dynamique de l’épidémie. Les propriétés infectieuses du virus n’ont, elles, pas changé : si les interactions sociales augmentent et les mesures «barrière» sont moins suivies, le nombre de nouveaux cas quotidiens repart à la hausse.
Le Premier ministre, lors de sa conférence de presse, a fixé pour objectif qu’en dépit du déconfinement «le R0 reste égal ou inférieur à 1», expliquant que le principal levier d’action était «la prévention», autrement dit le respect des gestes barrière.
Lorsqu’une partie de la population est immunisée contre une infection (soit par une exposition préalable qui a engendré une mémoire immunitaire, soit suite à une vaccination), le calcul du taux de reproduction de la maladie est légèrement modifié. En effet, une partie de nos interactions sociales se fait alors avec des personnes protégées, ce qui diminue mécaniquement la diffusion du pathogène. Les épidémiologistes parlent de «taux de reproduction effectif» de la maladie. Dans le cas du Covid-19, le nombre de mois durant lequel une immunité reste acquise est inconnu, et aucun vaccin n’est encore trouvé.
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