Le chef du Service de néphrologie de l’hôpital Aristide Le Dantec, El Hadj Fary Ka, a pris part, ce vendredi 20 août, au point quotidien sur l’évolution de la pandémie de Covid-19 au Sénégal. Au cours de sa prise de parole, il a dressé un tableau noir de la maladie chez les insuffisants rénaux. Toutefois, le néphrologue appelle à la vaccination contre le coronavirus pour, dit-il, lutter contre «les morts évitables».
La particularité de la Covid-19 chez les patients porteurs de maladies rénales chroniques et chez les hémodialysés
«La Covid 19 a une lourde morbi-mortalité chez les patients vulnérables, en particulier ceux qui portent des maladies rénales chroniques. Le risque d’être contaminé est plus élevé chez les insuffisants rénaux, comparativement à la population générale. Et la sévérité de la maladie est plus accrue, surtout chez les malades hémodialysés chroniques. Ces malades présentent malheureusement, en plus de l’insuffisance rénale, des comorbidités telles que l’hypertension artérielle, le diabète, les pathologies cardiovasculaires, entre autres.
En fait, quand on a une insuffisance rénale chronique, on a une baisse de l’immunité qui est très importante. Et en plus, ce risque est amplifié par le traitement qui est prescrit chez ces malades qui suivent un traitement souvent immunosuppresseur. Donc, ils ont un double risque de baisse de l’immunité d’avoir l’insuffisance rénale en elle-même, qui est un facteur de baisse de l’immunité et les médicaments pour traiter cette insuffisance rénale.
La particularité de la Covid-19 chez les patients porteurs de maladies rénales chroniques et chez les hémodialysés, c’est de faire des formes graves. Et qui dit formes graves dit beaucoup plus de spécialisations en réanimation, surtout une lourde mortalité hospitalière. Pendant la première vague, sur 345 patients hémodialysés chroniques entre Dakar, Ziguinchor et Thiès, 109 parmi eux ont eu des tests Pcr et parmi eux, 11, presque 12 % avaient développé la forme de Covid-19. Les patients étaient le plus souvent âgés, comme dans toutes les autres pathologies et surtout qui avaient d’autres comorbidités, soit ils étaient diabétiques, soit ils étaient hypertendus.
A la date 14 août 2021, 417 séances d’hémodialyse réalisées pour 90 patients dont 21 décès
Le service de néphrologie s’est développé pour pouvoir prendre en charge les insuffisants rénaux atteints de Covid-19. Parce qu’on ne pouvait pas les dialysés dans les centres de traitement comme les autres malades. Une unité spéciale a été construite dans ce sens et c’est ainsi qu’au 14 août 202, 417 séances d’hémodialyse ont été réalisées pour 90 patients, parmi lesquels, malheureusement, nous avons eu à déplorer 21 décès.
Donc, nous avons un taux de mortalité autour de 10 % ; c’est énorme. Parmi ces décès, 10 avaient une insuffisance aiguë, des patients qui ont eu une forme grave Covid, ont ensuite développé une insuffisance rénale aiguë et qui sont décédés. Les 11 autres, c’était des patients suivis pour insuffisance rénale chronique et qui ont fait une forme grave Covid-19.
Au vu de tous ces données, il est important que les patients en insuffisance rénale chronique qu’ils soient en pré-dialyse, qu’ils soient dialysés, de même que les transplantés respectent scrupuleusement les mesures de prévention indiquées.
«Dans le futur, nous pouvons envisager, par exemple, de faire une troisième dose, à l’instar de ce qui se fait ailleurs»
«Ce que nous leur recommandons, c’est qu’il faut éviter l’auto-stigmatisation, la stigmatisation des autres. Parce que la Covid-19, ce n’est pas une maladie honteuse, c’est une maladie infectieuse comme toutes les autres maladies. Il ne faut pas avoir honte de se faire signaler, quand on a des symptômes, parce que ces malades qui sont immunodéprimés font des symptômes à bas bruit et malheureusement, nous les recevons lorsque les symptômes sont très graves. Et compte tenu des risques accrus des formes graves et de la forte mortalité comparée à la population générale, nous recommandons également à tout patient qui soit en insuffisance rénale pré-guéri, hémodialysé, transplanté, d’autant plus que la vaccination est très bien tolérée. Nous sommes bien placés pour le dire, parce que sur 516 patients chroniques hémodialysés à Dakar, les 347, soit 70 % ont déjà bénéficié au moins d’une dose de vaccination. Et parmi ces derniers déjà vaccinés, nous n’avons noté aucun effet secondaire grave.
Par contre, nous avons une suggestion à faire : comme la population des hémodialysés n’est pas très importante, dans le futur, nous pouvons envisager, par exemple, de faire une troisième dose, à l’instar de ce qui se fait ailleurs. Parce que quand on est immunodéprimé, on a une réponse vaccinale qui est moindre par rapport à la population générale. Je pense que dans un avenir proche, il faudra commencer à en discuter au niveau du ministère de la Santé et de l’Action sociale (Msas). Donc, chers patients souffrant de maladies rénales chroniques, chers hémodialysés et chers transplantés, la Covid-19 est une réalité. Elle est responsable d’une lourde morbidité et d’une mortalité élevée et personne n’est épargné par cette faucheuse très agressive, surtout pour les personnes vulnérables comme les insuffisants rénaux. La seule façon de se protéger, c’est de respecter les mesures barrières et de se faire vacciner. Cela permettra de vous protéger, de protéger vos proches. S’il vous plait, il y a trop de morts évitables.»
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