Les frappes israéliennes dans le sud du Liban ont provoqué une onde de choc au sein de la diaspora libanaise d'Afrique de l'Ouest qui compte plusieurs centaines de milliers de membres.
A Dakar, Abidjan et Lagos, trois d’entre eux racontent à l'AFP comment ils vivent la guerre par procuration. Entre tristesse, peur et colère, ils soulignent l'esprit de solidarité qui règne au sein de la communauté.
Voici leurs témoignages:
Zoheir Zeidan, Dakar
"Pour moi, les frappes israéliennes ont commencé le 8 octobre 2023" au lendemain de l'attaque du Hamas. "On savait que la prochaine étape d'Israël serait le Liban", confie ce chef d'entreprise dans les télécoms âgé de 61 ans et chiite.
"Le premier jour de l'attaque d'Israël (sur le Liban), on a un ami d'enfance proche, avec qui j'ai grandi ici, qui a reçu une bombe sur sa maison. J'ai reçu des photos d'un (autre) ami. Puis, on a regardé. C'était lui, sa mère, son frère". Ils étaient morts.
"Mon ami m'a dit + Attends-toi à ce qu'il y en ait d'autres +. Et depuis ce jour, on est sur le qui-vive".
"J'ai mes tantes et mes cousines qui sont au sud du Liban, à Tyr, qui ont quitté, qui ont pris la route tout de suite quand il y a eu les problèmes. Mais comme on voit qu'Israël commence à étendre son influence sur toute la zone de Beyrouth, à tout moment ça peut arriver" d'être touché.
"Le soutien matériel se fait à travers des chaînes d'approvisionnement, de distribution et de transfert d'argent via plusieurs associations basées à Dakar, à Abidjan, au Nigeria et au Liban".
"Ma cousine à Beyrouth m'a envoyé un message en me disant +on a une association toute prête, mobilise un peu toutes les personnes, regarde ce que vous pouvez faire: des couches, des serviettes, des produits pour les femmes et les enfants, toutes ces choses-là sont bonnes à prendre+".
"Je ressens de la tristesse et de la colère. Tristesse parce qu'on se retrouve devant une situation où on peut perdre du jour au lendemain un pays et se retrouver les nouveaux Palestiniens de la terre. Et colère à cause de l'impuissance que l'on a aujourd'hui de voir ce qui se passe et l'indifférence de l'Occident devant cette situation qui nous révolte".
Zara Mirza-Branger, Abidjan
"Mes parents vivaient ici en Côte d’Ivoire, ça fait 6 ans qu’ils sont retournés au Liban à cause de la santé de ma mère. Il y a eu plein de bombardements autour d'eux, ils étaient à Tyr (sud)" et "se sont réfugiés dans une maison à Beyrouth" il y a environ deux semaines, déclare cette vendeuse de 31 ans née au Liban de mère chiite et de père sunnite.
"On est tout le temps en train de regarder les infos, on n’a même plus la tête à bosser. A chaque fois qu’on entend qu’ils ont bombardé on appelle mes parents. On essaie de leur envoyer de l’argent, d’aider le plus qu’on peut".
"Si tout ça s’arrête, qu’ils retournent au sud et qu’ils ne trouvent pas de maison, là vraiment on ne saura plus quoi faire. On sera obligé de les ramener ici, ou chez ma famille au Gabon, en France ou n’importe où. Là ils essaient de quitter le Liban mais c'est un risque pour ma mère".
"On a des associations ici qui essaient de récolter des aides, que ce soit des vêtements, de l’argent, de la nourriture, surtout ils ont demandé du lait pour les bébés, des médicaments qu’ils n’ont pas, des couches, donc un peu de tout quoi. La situation est vraiment catastrophique, ce qu’on souhaite c’est que tout ça s’arrête".
A Abidjan, entre Libanais, "toutes les discussions c’est la guerre du Liban. Même là où je travaille, dans la boutique de vêtements, quand on appelle les clientes, tout le monde est triste".
"S’il pleut au Liban, la Côte d’Ivoire est mouillée".
George Chaanine, Lagos
"Nous sommes très inquiets parce que la guerre s'étend presque à tout le Liban", explique cet homme d'affaires de 31 ans de la communauté chrétienne maronite, qui a vécu l'essentiel de sa vie au Nigeria.
"Nous créons des groupes WhatsApp où nous faisons tous des dons".
"Cela a aussi des conséquences sur le business. A cause de la guerre, les choses deviennent plus difficiles, les lignes maritimes mettent plus de temps à atteindre le Liban. Et cela fait augmenter les prix".
"Quand vous essayez de faire sortir votre famille du pays, cela devient aussi compliqué parce que la demande (pour les compagnies aériennes) a augmenté de façon exponentielle".
8 Commentaires
C'est ainsi chaque fois qu'il y a une nouvelle guerre au Liban
Eman Usa
il y a 3 semaines (11:58 AM)C fini cette nouvelle génération c garda gatsa rek
Reply_author
il y a 3 semaines (12:54 PM)Eman Usa
il y a 3 semaines (13:05 PM)You treat us like shit we treat you like shit worse come to worse we send you back home
Le noir premier être humain sur cette terre recouvera sa dignité sans complexe
Cheick Anta Diop
That’s not my war and I don’t give a shit
Peace
Abdullah
il y a 3 semaines (12:53 PM)Chers Libanais et surtout ceux d'Afrique, n'oubliez surtout pas le traitement que vous infligez aux africains et particulièrement aux africaines venues chercher pitance chez vous. Vous les maltraitez, les exploitez, les humiliez.
Pourtant, quand cela barde à Tyr, Bayrût, Tripoli, vous venez cherchez refuge à Lagos, Dakar, Abidjan, Freetown, etc.
Ce que vous vivez doit vous rappeler que sur cette terre nous sommes juste de passage et laisser un bon souvenir est bon.
Vous vivez dans nos pays en autarcie, vous n'êtes solidaires qu'entre vous et vous avez les mêmes droits que nous.
Un sénégalais, Nigérian, ivoirien, vivrait des millions d'années au Liban, jamais il ne pourrait rêver avoir juste le droit de louer un maison à fortiori être propriétaire et plus simple encore voir son épouse africaine comme lui accoucher dans un hôpital libanais.
cette tragédie que vous vivez dans votre chair, injuste soit elle, doit vous conduire à réfléchir à votre comportement sous d'autres cieux.
Que ceux qui me diront que vous êtes sénégalais ou autres n'ont qu'à arrêter leurs chars.
Ils pourriraient au Liban, jamais il ne pourront avoir la nationalité.
Reply_author
il y a 3 semaines (12:56 PM)Grâce à l’importante communauté libanaise installée en Côte d’Ivoire ou en Guinée, le mouvement chiite dispose d’une base solide pour récolter des fonds. Le Parti de Dieu s’appuie notamment sur un système mafieux, utilisant le blanchiment de l’argent de la drogue.
A Abidjan, le quartier de Marcory a commencé un deuil discret après la mort du leader du Hezbollah, Hassan Nasrallah, tué dans une frappe israélienne vendredi 27 septembre. Dans ce fief de la diaspora libanaise en Côte d’Ivoire, à 5 000 kilomètres de Beyrouth, quelques commerces sont restés fermés, ainsi que la grande mosquée chiite Al-Mahdi.
« Nous sommes forcément tristes en observant ce qui se passe au Liban », confie pudiquement Elie, un entrepreneur ivoiro-libanais. Tout comme avec les près de 100 000 Libanais vivant dans le pays – dont 80 % sont musulmans chiites –, évoquer le Hezbollah crispe et conduit au mutisme.
Dans ce quartier surnommé le « petit Beyrouth », personne ne se risque à parler du Parti de Dieu et de son influence. Pourtant, son ombre plane. La plupart des chiites libanais en Côte d’Ivoire, et plus largement en Afrique de l’Ouest, contribuent indirectement à l’effort de guerre du Hezbollah au Proche-Orient à travers la « zakat », une taxe informelle.
Aucun montant n’est connu, tant le réseau est vaste et opaque. Devenu un Etat dans l’Etat au Liban, l’organisation a bâti une économie parallèle qui s’appuie sur un vaste réseau de blanchiment d’argent lié au trafic de drogue, de diamants, de bois et d’armes en Amérique du Sud et en Afrique de l’Ouest, bénéficiant au passage de la complicité de sa diaspora.
Participer à la Discussion