La presse malienne le disait depuis quelques années. Le Premier ministre Choguel Maiga et les généraux au pouvoir à Bamako ne filent pas vraiment le parfait amour. Le natif de Tabango est isolé au sein du gouvernement.
Il a fallu attendre la commémoration de l’an 1 de la prise de Kidal le samedi 16 novembre dernier pour que le sexagénaire brise enfin le silence. Visiblement, la coupe est pleine.
Devant plus de 1000 partisans du M5-RFP, rassemblés au Centre international des Conférences de Bamako, Choguel a avoué qu'il est victime d'isolement.
Il dit n’avoir aucune information sur le programme et le plan d’actions de l’Autorité indépendante de gestion des élections (Aige) dont la mise en place a contourné, selon lui, « toutes les procédures normatives dans le fonctionnement d’une équipe dirigeante ».
La « Transition sensée prendre fin le 26 mars 2024 a été reportée sine die, unilatéralement,… »
L’Aige, faut-il le rappeler, est amené à jouer un rôle important dans l’organisation des prochaines élections au Mali. La Présidentielle annoncée pour se tenir en février dernier a été reportée à une date non déterminée.
Le Premier ministre déplore cette décision, surtout que son gouvernement n’a pas été consulté. La « Transition sensée prendre fin le 26 mars 2024 a été reportée sine die, unilatéralement, sans débat au sein du Gouvernement… (Aujourd’hui encore), il n’existe aucun débat sur la question, le Premier ministre est réduit à se contenter des rumeurs de la presse ou à une interprétation hasardeuse des faits et gestes du Ministre de l’Administration territoriale et de le Décentralisation » s'est plaint Choguel Maiga.
Un dialogue avec les généraux au pouvoir semble impossible. « Cela fait plus de deux ans que je demande à rencontrer les militaires pour qu’on s’assoit et qu’on discute de l’avenir politique de la transition sans y parvenir » a révélé le sexagénaire. Pour lui, « tout se passe dans l’opacité totale » et à son « insu ».
« J’ai le courage et l’honnêteté intellectuelle de le reconnaitre tout en le déplorant vivement » a-t-il ajouté, non sans s’inquiéter de la suite des évènements : « Nous étions bien partis, forts de l’appui de la Nation toute entière. Nous étions modèles. Aujourd’hui , ne sommes-nous pas en passe d’être dépassés ? ».
Boubacar K. Traoré, son bras droit, arrêté en mai dernier
En endossant ainsi le costume de l’opposant lors de cette rencontre avec les partisans de son mouvement le M5 RFP, le Premier ministre malien prend un gros risque. Inutile de rappeler que la junte n’apprécie pas beaucoup les critiques. La plupart des citoyens qui ont porté des voix dissonantes sont en prison. A titre d’exemple, Boubacar K. Traoré , président par intérim du M5-FRP a été placé sous mandat de dépôt en mai dernier, après avoir publié un mémorandum du Mouvement, très critique à l’égard des généraux au pouvoir.
Ce bras droit de Choguel Maiga a été inculpé pour « atteinte au crédit de l’Etat , outrage à magistrat et trouble à l’ordre public ». Dans le mémorandum, le M5 FRP dénonçait déjà l’isolement du Premier ministre au sein du gouvernement. Il révélait que Choguel n'avait pas été consulté sur des questions comme l’organisation de la campagne référendaire et le report des élections.
Il prend le risque de tomber en disgrâce
Durant tout ce temps, le Premier ministre, s’est tu. On l’a même vu défendre le report des élections arguant que le pays n’était pas encore stabilisé. « La phase de stabilisation doit atteindre un point de non-retour, un point suffisamment stable pour pouvoir organiser des élections » déclarait-il sur la télévision d’Etat en avril dernier. En sortant enfin du silence, il prend le risque de tomber en disgrâce. Le natif de Tabango semble désormais marcher sur des sables mouvants.
4 Commentaires
M. Maiga a pris ses responsabilités.
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