
Les jeunes de Paoskoto jugés, ce mercredi, ont été relaxés par le tribunal. Ils étaient poursuivis pour participation à une manifestation violente, rébellion et outrage à des agents dans l'exercice de leurs fonctions. Les manifestants dénoncent les factures excessives de Flex’Eau.
Heureusement, le tribunal a compris que ces jeunes sont plus des victimes que des coupables. Il reste à savoir si les autorités, partant du ministre de l’Hydraulique et de l'Assainissement au président de la République, sauront prêter une oreille attentive au monde rural, notamment les populations du Saloum et du Ndoucoumane.
Depuis plusieurs années déjà, il est difficile de rester un mois sans une manifestation d’un village ou d’une commune rurale contre Flex’Eau. En vérité, les villageois souffrent le martyr, ils vivent une malédiction dénommée Flex’Eau. Depuis l’arrivée de ce prestataire, le monde rural connaît des factures vertigineuses, parfois plus élevées que des factures d’eau à Dakar.
A titre d’exemple, une famille a reçu deux factures successives à 70 000 F chacune. La première a été payée le cœur gros. Il a fallu que le père de famille manifeste une détermination à ne pas payer un montant non consommé pour que la deuxième facture soit revue autour de 25 000 F. La population se plaint régulièrement de factures livrées sans que le compteur ne soit relevé. Par exemple, un agent a donné à une famille une facture sans aucun lien avec la consommation. Son seul argument était que les chiffres du compteur sont invisibles. A qui la faute ?
Lorsqu’on prend la peine de prêter attention à ce problème, on se rend compte que Pascotto, Ngodiba, Malem Hodar, Keur Madiabel, Dinguiray, Fass Barigo sont autant de villages qui ont manifesté contre Flex’Eau, sans que la liste ne soit exhaustive.
Ce qui est inquiétant, c’est que les populations ont manifesté, y compris des vieux de 60 à 70 ans et des vielles dames ; des associations de consommateurs, chefs religieux et autres leaders d’opinion ont alerté, sans succès.
Dans un article publié dans les mélanges en l’honneur du chercheur Momar Coumba Diop, Samba Ndiaye s’est intéressé à la professionnalisation de la gestion de l’eau et ses conséquences. « La mise en œuvre de la Dsp (délégation de service public : NdlR) au Sénégal ne risque-t-elle pas de conduire à la marchandisation d’une ressource commune comme l’eau ? Avec le retrait des dispositifs de représentation des usagers dans le processus de Spe (service public d’eau), les usagers-citoyens ne risquent-ils pas d’être réduits en abonnés-clients ? », se demandait-il. Et c’est exactement ce qui est arrivé.
Par exemple, le village de Ngodiba a eu son forage bien avant 2000. L’ouvrage est le fruit des cotisations des populations et de l’appui de Caritas. La population a su gérer pendant des décennies avec des factures largement à portée de bourse. Depuis l’arrivée de Flex’Eau, les habitants du village souffrent énormément. Une manifestation a été initiée suivie d’un refus de payer les factures. Des dizaines de pick-ups chargés de gendarmes ont débarqué un beau jour. Ils ont arraché les compteurs et parfois même les tuyaux. Depuis lors, une bonne partie du village qui refuse de payer ces factures injustifiées est retournée à l’ère des puits. Cela dure plus d’un an, alors qu’on est au 21ème siècle.
Il faut dire que jusqu’ici, l’Etat n’a rien fait pour aider les populations. Dans son article, Samba Ndiaye fait ce constat : « Le cadre contractuel entre l’État et les opérateurs privés souffre d’opacité : contrats non rendus public, rapports de l’opérateur mis sous le sceau de la confidentialité, redevabilité exclusive de l’opérateur envers l’Ofor excluant les dispositifs de représentation des usagers, répartition jusque-là peu connue des investissements, des responsabilités et des risques entre l’État et des opérateurs jusque-là peu connues, une marge trop grande laissée aux opérateurs (rente de monopole) ». On comprend dès lors pourquoi Flex’Eau avance avec l’assurance d’être en terre conquise.
Ce nouveau gouvernement prône la souveraineté. Or, l’eau figure parmi les denrées que tout pays sérieux assure lui-même la gestion. Le ministre Cheikh Tidiane Dièye était à Kaolack et Kaffrine en début janvier, il a écouté les récriminations des habitants des deux régions. Nous osons espérer que lui et ses supérieurs auront le courage de prendre les bonnes décisions au bénéfice d’une population déjà assez pauvre pour être la vache laitière d’une société étrangère.
3 Commentaires
Mais, grosse déception, vces prestataires (Flex'Eau, SDER, ...) ne font vraiment pas mieux pour le moment.
À redresser d’urgence sans un retour aux ASUFOR.
Eskey
En Janvier, 2025 (17:49 PM)YA DU JUB JUBBAL JUBBANTI LA BAS
Participer à la Discussion