La dévaluation du franc CFA dans le contexte actuel, Pr Malick Sané n’y croit pas. Selon l’économiste, Professeur Titulaire des Universités (FASEG/UCAD) et Directeur du Laboratoire de politiques commerciales, la situation d’aujourd’hui est différente de celle des années 1990 qui a abouti à la dévaluation de cette monnaie.
Il a été beaucoup question ces derniers jours d’une nouvelle dévaluation du Franc Cfa. Est-ce que vous y criez ?
Non. Pas du tout. Depuis quelques années, il est devenu récurrent de parler d'une éventuelle dévaluation du franc CFA dès l'instant qu'il y a des difficultés. Il convient de rappeler que l'économie n'est pas un long fleuve tranquille. Elle laisse apparaître des hauts et des bas. C'est ce que les économistes appellent des fluctuations économiques nécessitant de la part de l'Etat la mise en place de politiques économiques conjoncturelles (politique budgétaire et fiscale, politique monétaire et éventuellement une politique de change) notamment une dévaluation de la monnaie nationale en régime de change fixe.
La situation que nous connaissons aujourd'hui est différente de celle du milieu des années 1990 qui a abouti à la dévaluation du F CFA en janvier 1994.
Quelle est donc la situation qui fait penser que la dévaluation est possible ?
Aujourd'hui l'économie mondiale est en crise et cela depuis la pandémie de COVID-19 et la guerre entre la Russie et l'Ukraine. L'économie africaine n'est pas épargnée étant donné l'insertion de l'Afrique dans l'économie mondiale. La situation est pareille en Afrique de l'Ouest.
Cependant contrairement à 1994 où tous les pays étaient frappés par la crise notamment de la dette, il s'y ajoutait une crise économique avec des taux de croissance annuels moyens très faibles voire négatifs évoluant avec une croissance démographique souvent plus élevée entraînant un appauvrissement continu de la population.
Aujourd'hui, notamment en zone UEMOA, la situation est différente. On y observe des pays réalisant une croissance supérieure à 5%. Les taux moyens se situent entre 3 et 4%. Cela rend presque impossible d'arriver à un consensus pour une décision de dévaluation de la monnaie.
En effet, compte tenu des risques encourus suite à une dévaluation, c'est l'ultime décision à prendre quand on aura tout tenté sans résultats probants. Ainsi, avec les taux de croissance actuels, les pays n'ont aucun intérêt à procéder à une dévaluation dont les résultats sont incertains.
Le Fmi garde encore une influence importante dans nos pays. Est-ce rassurant ?
Le FMI intervient beaucoup dans nos économies et ceci depuis les années 1980 du fait de la permanence de nos difficultés économiques notamment lorsqu'il y a un déficit de la balance des paiements. Dans pareil cas, il est dans les missions du FMI de venir en aide à ces pays par le biais de prêts en DTS afin de rétablir ces paiements.
Cependant l'intervention du FMI ne peut survenir que si le pays fait appel à ses services. À partir de ce moment, le fonds va conditionner son intervention à la signature d'un document mentionnant le type de politique économique que le pays va mettre en œuvre conformément à la doctrine économique néo-libérale de l'institution.
Ainsi un pays ayant une situation économique saine peut ignorer jusqu'à l'existence du FMI.
En Afrique centrale, Paul Biya s’est montré alarmiste. Est-il possible de dévaluer pour la CEMAC en épargnant l’UEMOA ?
En principe oui. Le franc CFA d'Afrique de l'Ouest n'est pas le même que celui d'Afrique Centrale étant émis par des Banques centrales différentes.
Par ailleurs, si la situation des pays de la CEMAC est similaire dans le sens d'économie en crise alors qu'en Afrique de l'Ouest la situation est différente comme on l'a montré plus haut alors la zone UEMOA pourrait être épargnée.
En 1994, les économies des deux zones étaient dans la même situation pour entraîner une dévaluation globale. Les choses ne sont plus les mêmes aujourd'hui.
Les prescriptions de politique économique consisteront invariablement à tenter le rétablissement des grands équilibres par la compression des dépenses de l'Etat et l'augmentation de ses recettes. Il s'agira d'un côté de supprimer les subventions, d'appliquer la vérité des prix, de réduire le train de vie de l'Etat. En matière d'augmentation des recettes, l'Etat peut mettre l'accent sur la pression fiscale, la privatisation d'entreprises publiques, entre autres.
Ce sont les fameuses politiques d'austérité tant redoutées par les ménages et les populations les plus humbles.
5 Commentaires
Cfa
il y a 2 jours (12:48 PM)On doit le quitter .Quitte même à laisser ces pays le temps de réfléchir pour créer ensemble une monnaie totalement libérée de l'emprise de la France.
Changer Notre Monnaie
il y a 2 jours (12:52 PM)Participer à la Discussion