Le président du mouvement ‘’Mboolo Askan wi’’, Farba Senghor, n’a pas apprécié la situation qui prévaut présentement au sein de l’Apr. Même s’il écarte toute idée de «crise profonde», l’ancien ministre de l’Agriculture sous l’ère Wade, déclare, dans cet entretien avec Seneweb, que si les responsables de l’Apr veulent garder le pouvoir, ils n’ont qu’à revoir leur copie.
Qu’est-ce qui explique votre mutisme ?
Il n’y a pas de mutisme de ma part en ce qui concerne les développements de l’actualité nationale. Il ne sert à rien de parler à tout vent. Je m’efforce à chaque fois de donner des arguments qui se collent à la réalité.
Ces dernières semaines, je me suis plutôt consacré avec mes amis tels que Cheikh Sadibou Fall, ancien ministre de l’Intérieur, à la création d’un parti politique. Parce que notre mouvement (Mboloo Askan wi) va se muer, dès le début de l’année 2020, en un parti politique. Et nous sommes en train de recenser les délégués qui vont venir de chaque département du Sénégal pour l’Assemblée consécutive des fondateurs de notre structure.
Donc, votre silence n’est pas une expression de frustration ?
Tout le monde parle de récompense, mais est-ce que le Président peut récompenser tout le monde? Il y a d’ailleurs ceux qui l’ont accompagné qui sont en train d’exprimer leurs frustrations. Il y a les fondateurs du parti qui demandent plus. Si tout le monde demande une part, je pense qu’il aura des difficultés pour gouverner ce pays. Il a été choisi par les Sénégalais à l’issue d’une élection présidentielle. Donc, c’est le seul qui gouverne et qui nomme à tous les postes. Il doit tout faire pour partager sa vision et pour la mettre en œuvre avec des hommes compétents qu’il juge aptes à remplir des fonctions correspondantes aux domaines d’activité qui lui conviennent en tant que manager général.
Je ne demande pas à être récompensé, j’accompagne le Président par conviction, parce que je suis un libéral, je sais qu’il y a nécessairement une recomposition en 2024 après lui. J’estime que je dois l’accompagner et c’est en le faisant que je pourrais trouver la meilleure voie dans la mouvance présidentielle. Les postes, tout le monde en a besoin mais il faut être réaliste, tout le monde ne peut pas être servi.
Comment appréciez-vous la crise profonde au sein de l’Apr ?
On ne peut pas parler de crise profonde au sein du parti (Apr). Ce n’est pas une crise profonde des couleurs et des confrontations entre des groupes, ou peut-être des actions menées contre le pouvoir ou le responsable du groupe au premier chef.
Mais, il s’agit là de responsables qui se mettent en spectacle en prenant des positions qui sont à l’encontre de celle du président de la République ou qui secouent la stabilité du parti. C’est ça la question.
Maintenant, d’aucuns pensent que ces responsables qu’on peut vraiment compter sentent une menace autour d’eux, c’est la raison pour laquelle, ils ont tendance à affirmer à chaque fois leur existence en montrant qu’ils ont accompagné le président Macky Sall pendant les années dures jusqu’à la conquête du pouvoir. Et que légitimement, ils devaient être très proches de lui. C’est une réaction humaine. Mais, dans les circonstances actuelles où le Président a fait un mandat qui a été jugé positif, à mon vis ils devraient avoir des comportements beaucoup plus sereins.
Dans la mesure où ceux qui sont au premier plan en l’occurrence le président du parlement de la Cedeao, Moustapha Cissé Lô, occupe une position vraiment prépondérante qui est assimilable même à une position de chef d’Etat. Il ne faut pas scier, comme le disait Abdou Diouf, la branche sur laquelle, on est assis.
Si le parti est déstabilisé, le Président lui-même affaibli, les conséquences ne se limiteront pas au chef de l’Etat ou à quelques individus, cela pourrait affecter le pouvoir du président Macky Sall. Et c’est ce qu’il faut éviter.
Les Moustapha Cissé Lô, Moustapha Diakhaté et autres devraient prendre conscience de tout cela. Maintenant, s’ils ne veulent plus de pouvoir, c’est autre chose. Mais, s’ils veulent garder le pouvoir, ils devraient réfléchir sur les positions d’autant plus qu’ils peuvent interpeller les ministres, le président de la République lui-même. Ils doivent savoir que le Président a plus besoin de sérénité et de stabilité autour de lui, mais pas de tiraillements encore moins de division. Ce qui est bizarre, c’est qu’ils ont déjà le pouvoir et ils continuent à se battre pour le pouvoir.
Qu’est-ce qui peut donc expliquer une telle situation ?
Le problème fondamental de l’Apr, c’est une frustration. Ils sont frustrés de voir d’autres responsables émerger et peut-être (redoutent) de perdre du pouvoir. Il n’y a qu’une expression de frustration. Je leur conseille de cultiver la sérénité et que le Président les appelle un à un et discuter avec eux.
Le Sénégal est un pays en voie de développement et qui, peut-être, a enregistré beaucoup de retards par rapport aux pays asiatiques. Pour ce faire, il faut des hommes compétents, engagés, soucieux de l’intérêt national et du développent du pays. On ne conquiert pas le pouvoir pour soi.
Le pouvoir, nous devons le conquérir pour construire notre pays, résorber le gap, mais cela demande un effort, une prise de conscience extrêmement importante.
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