Un peu dans l’ombre depuis la baisse drastique des cas de Covid-19, le Pr Moussa Seydi, patron de la prise en charge des malades du nouveau coronavirus est de retour à la faveur de la deuxième vague de la pandémie au Sénégal. Et c’est surtout pour dire ses vérités au ministère de la Santé, comme il l’avait fait d’ailleurs au début de la pandémie au Sénégal.
Dans une interview avec le journal Le Quotidien, le chef du service des Maladies infectieuses de Fann accable le ministre de la Santé, Abdoulaye Diouf Sarr et son équipe. D’après l’infectiologue, le ministre et ses collaborateurs mettent trop de temps à réagir. « Nous sommes un peu lents dans notre réaction par rapport à la mise à disposition des centres de traitement des épidémies, au recrutement du personnel qui doit faire marcher ces centres de traitement, mais surtout de réanimation », souligne Pr. Seydi.
Pour lui, cette deuxième vague est bien différente de la première en matière de disponibilité du matériel médical et des ressources humaines. A titre illustratif, mentionne-t-il, lors de la première vague, le Sénégal n’avait qu’un seul centre de traitement des malades, celui de Fann avec 12 lits, une seule équipe de prise en charge et zéro lit de réanimation.
« Maintenant qu’on a presque 39 Cte (Centre de traitement des épidémies : Ndlr) qui peuvent être ouverts, des centaines de personnes formées dans la prise en charge de cette affection, qu’on peut mettre à disposition rapidement une cinquantaine de lits de réanimation, qu’on a certains produits disponibles comme l’hydroxychloroquine, l’azithromycine, la dexaméthasone, beaucoup d’autres produits que la Pna (Ndlr : Pharmacie nationale d’approvisionnement) nous donne, il n’y a pas photo », s’exclame-t-il.
Le problème se situe donc dans le temps de la prise de décision. Par exemple, regrette-t-il, à Fann, il n’y a actuellement que deux lits de réanimation qui fonctionnent, faute de personnel. Il révèle même que, hier mardi, à Fann, il a fallu faire beaucoup de gymnastique pour admettre des cas graves en réanimation ou dans un centre de traitement avec oxygène. Et pourtant, ce n’est pas faute d’avoir un personnel bien formé dans la prise en charge.
« Il y a une lenteur dans la remobilisation de ces ressources humaines, mais on n’a pas de problème de ressources humaines. Il suffit aujourd’hui de rappeler ces personnes, de leur faire signer des contrats pour qu’elles puissent travailler et faire fonctionner tous ces centres qui étaient ouverts dans la première phase », déplore Seydi.
Le spécialiste estime même que certains décès pouvaient être évités, si les ressources étaient disponibles à temps. A ses yeux, c’est une simple logique de cause à effet. « Quand vous avez un malade qui s’aggrave à domicile, vous mettez une heure, deux heures, trois heures, quatre heures de temps pour trouver un lit libre, alors que vous ne le prenez pas en charge, vous réduisez ses chances de survie. Je ne peux pas dire si ça a concerné un, deux malades, mais c’est absolument évident. Quand un malade a besoin d’être pris en charge, il s’agit d’un cas grave. Tout retard de prise en charge peut jouer sur le pronostic vital. C’est une évidence ».
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