Ça meurt dans le fleuve Casamance comme ça meurt dans l'Atlantique et sur les routes. Les cas de noyade dans cette étendue d’eau jadis douce, ne se comptent plus au bout des doigts. Le dernier cas en date est celui de Moustapha Sarr, âgé de 12 ans. Cet élève du cours moyen première année, est mort noyé à la plage de Kabeum, un des quartiers de la commune. Les récents accidents en mer survenu au large de Ouakam nous offre l'occasion de revenir sur les tragiques cas de Sedhiou.
Le tragique évènement s'est passé dans la matinée du mardi 18 avril. Moustapha Sarr, élève en classe de CM1 à l’école élémentaire N°6 située dans le quartier Moricounda, se baignait avec ses camarades en cette période de forte canicule qui prévalait sur la localité. Normalement, à cette heure, il devait être en classe, en ce jour ouvrable. Mais son maître n’avait pas assuré les enseignements ce jour-là. La raison, seul son directeur que nous avons tenté de joindre en vain et les enquêteurs en charge du dossier en savent plus.
Moustapha, en se rendant à la plage à l’insu de ses parents, ne soupçonnait guère qu’il avait rendez-vous avec la mort. C’est au moment de retourner à la maison après une bonne partie de baignade que son petit frère s’est rendu compte que son frère n'était pas parmi eux. Il alerta ses camarades. Ces derniers plongèrent de nouveau à la recherche de Moustapha. Les plus avertis des réalités de la plage se dirigèrent vite au niveau des trous qu’ils ont creusés à l’intérieur du fleuve pour obtenir une certaine profondeur. C’est là qu’ils ont trouvé le corps sans vie du jeune Moustapha.
Le jeune frère du défunt, ayant le numéro de téléphone du père adoptif en tête, le remet aux premiers secouristes. Alerté, le père Samba Aly Ndiaye, s’est très vite déporté sur les lieux qui grouillaient déjà du monde du voisinage. Après le constat des forces de sécurité et de défense, les sapeurs-pompiers de la 43ème compagnie d’incendie et de secours ont déposé le corps sans vie au centre hospitalier régional, Amadou Tidiane Bâ.
Samba Aly, inconsolable, le cœur meurtri témoigne : « Moustapha était très attaché à moi. Il m’accompagnait le week-end et les jours fériés et surtout pendant les grandes vacances soit au verger d’anacardiers, soit au champ. Nous restions aussi souvent devant la boutique pour discuter comme de vieilles personnes. Ces moments vont sans doute me manquer » a-t-il expliqué. Il se tut un instant, les yeux pleins de larmes, il se détourna pour les essuyer.
Lorsqu’il a retrouvé un calme précaire, il murmura encore quelques mots : « Moustapha m’a été confié depuis le cours d’initiation (CI). Je l’ai vu grandir et j’ai voulu faire de lui, comme moi, un mathématicien. Son intelligence précoce m’y encourageait. Voilà trois fois consécutives, qu’il se classe toujours premier de sa classe. C’est horrible de voir ce projet s’évaporer » grommela-t-il.
Moustapha Sarr, cinquième enfant de sa famille, est né à Thiologane, un village situé à dix kilomètres de Kaolack sur la nationale N°4. Ses parents biologiques sont des paysans qui vivent de l’agriculture. Son père biologique, Guissaly Aliou Sarr, parle d’une grosse perte témoignant que son fils était très dynamique et excellait dans tout ce qu’il faisait. « Nous sommes croyants, nous acceptons la volonté divine mais j’avoue que vivre sans Moustapha est insupportable notamment pour sa mère qui n’a même pas eu le courage de venir à l’enterrement à Sédhiou. Moustapha, dès qu’il vous voit une seule fois, il s’attache à vous comme si vous vous étiez connu il y a longtemps. C’était un garçon jovial, courtois, très éduqué surtout par ses parents adoptifs qui lui avait inculqué toutes les valeurs cardinales ».
Sur ses fréquentations de la plage, Samba Aly rappelle l’avoir bien corrigé il y a trois ans. Et depuis, il n’y allait plus. « Je ne sais quel hasard l’a mené ce mardi matin, s'interrogea-t-il.
Dans l’attente de la main généreuse de l’Etat ou des autorités locales, les parents ruminent amèrement leur désolation.
Toujours dans le ventre du fleuve, on note la disparition tragique de Sana Dramé, la cinquantaine révolue. C’est en octobre dernier que les populations de Sandinéry, un des villages de la commune de Karantaba dans le département de Goudomp (région de Sédhiou), furent plongées dans l'émoi et la consternation après le suicide par noyade du nommé Sana Dramé. Après ses ablutions, il s'est rendu à la mosquée. Après avoir accompli son devoir religieux, il s’est dirigé vers le fleuve Casamance, qui longe le village. Il a laissé ses habits à la plage puis s'est jeté à l'eau.
Constatant son absence prolongée, la famille a alerté le voisinage. Les recherches ont permis de retrouver ses habits qu'il avait abandonnés à la rive. Les sapeurs-pompiers, informés, avaient effectué pendant 48 heures des recherches sans succès. Ce n'est qu’au troisième jour, que les eaux du fleuve ont refoulé le corps sans vie du défunt père de famille de huit enfants.
Le 14 novembre 2022, le corps sans vie en état de putréfaction trop avancé d'une dame âgée approximativement d'une quarantaine d'années avait été découvert au village de Karantaba situé dans le département de Goudomp, par les forces de défense et de sécurité. Le mouvement des eaux aurait drainé le corps depuis le village de Babandiong jusqu'à hauteur du village voisin de Karantaba. Au constat de l'état de putréfaction du corps, la victime n'a pu être identifiée. Ainsi, elle a été enterrée, sur ordre des autorités compétentes sur place.
Le 28 janvier dernier, un élève de 9 ans, en cours préparatoire (CP) est mort par noyade au village de Sathioum dans le département de Goudomp. Moussaka Sonko, puisque c'est de lui qu'il s'agit, après la prière du vendredi, est parti conduire les vaches dans les rizières situées entre Sathioum et Samine. C'est en tentant de poursuivre une vache qui allait dans l'eau, que le jeune Moussa, ignorant la profondeur des eaux, s'y est noyé.
Ses compagnons auront tout tenté pour le sauver mais en vain. Moussaka Sonko, était élève à l'école élémentaire de Sathioum où maîtres et parents pleurent encore sa disparition brutale. C’est dire que le fleuve Casamance, à l’image de l’Atlantique, constitue un mouroir. Chaque année, des cas de suicide ou de noyade sont notés.
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