Politicien madré redouté par tous ses adversaires, le «boulanger» Laurent Gbagbo a fini par se faire rouler. Retour sur les huit erreurs qui ont provoqué sa chute.
Bluffé en 2000 par la façon dont Laurent Gbagbo lui avait soufflé le
pouvoir à la suite d’une élection présidentielle tumultueuse, le
général putschiste Robert Gueï l’avait surnommé le «boulanger» qui
«roule tout le monde dans la farine». A juste titre d’ailleurs. Pendant
les dix années qu’il a passées à la tête de son pays, alors qu’il
n’avait été élu que pour un mandat de cinq ans, Laurent Gbagbo a
toujours réussi à retourner en sa faveur les situations à priori les
plus défavorables. Un exemple parmi tant d’autres: en janvier 2003, le
président français Jacques Chirac croit lui avoir «tordu le bras» en
lui faisant signer les accords de Marcoussis censés mettre fin à la
grave crise née de l’invasion du Nord et d’une grande partie du Centre
de la Côte d’Ivoire par les rebelles emmenés par Guillaume Soro.
Accords que l’opposant historique à Félix Houphouët-Boigny, le premier
Président de la Côte d’Ivoire, s’évertue à détricoter méthodiquement
dès son retour à Abidjan. Avec un argument qui fait mouche.
La France, qui à l’en croire ne
l’aurait jamais accepté parce qu’il est un vrai nationaliste, lui a
forcé la main. Sa réputation d’homme politique madré quasiment
invulnérable lui collait tellement à la peau que peu d’observateurs le
voyaient perdre l’élection présidentielle de novembre 2010. Si après un
deuxième mandat «cadeau», comme disaient les Ivoiriens, Laurent Gbagbo
s’est enfin décidé à accepter la tenue du scrutin, c’est qu’il était
sûr de le gagner, murmurait-on sous cape y compris dans de nombreux
milieux autorisés. Il faut dire que l’ancien chef de l’Etat ivoirien
était tellement convaincu lui-même de son succès que son slogan de
campagne était sans ambiguïté: «On gagne ou on gagne.» En clair pour
lui, une défaite n’était même pas envisageable. Une certitude frisant
l’arrogance qui lui a fait commettre une série d’erreurs qui lui ont
été fatales.
Croire aux sondages sur mesure
La toute première erreur a été de faire aveuglément confiance à des
sondages sujets à caution qui lui ont été concoctés sur mesure pour des
raisons obscures par la Sofres et Euro RSCG. Tous le donnaient à coup
sûr gagnant dans tous les cas de figure, parfois même dès le premier
tour. Et lui de déclarer sourire aux lèvres à qui voulait l’entendre:
«Ils ne peuvent pas tous se tromper.» Sans jamais se demander avec quel
échantillon représentatif de la population ivoirienne ces sociétés
françaises ont-elles pu effectuer de telles enquêtes d’opinion dans un
pays coupé en deux.
Sous-estimer l'adversaire
Les résultats du premier tour auraient pu semer ne serait-ce que le
début d’un doute dans son esprit. Avec un peu plus de 38% des
suffrages, il était arrivé en tête devant Alassane Ouattara, qui avait
totalisé un peu plus de 32%. Or Laurent Gbagbo croyait dur comme fer
qu’il serait élu dès le premier tour, mais il digère vite cette petite
contrariété. D’autant que, dans son esprit, le président du
Rassemblement des républicains (RDR), Alassane Ouattara, est
l’adversaire rêvé. Un brillant technocrate certes, mais un «piètre
politique» dont il ne ferait qu’une bouchée. Et ce fut sa deuxième
erreur.
Contre toute attente, l’ex-directeur
adjoint du Fonds monétaire international (FMI), connu pour être un
homme policé, réservé, plutôt introverti et presque trop gentil, fend
l’armure et fait une excellente campagne. Au cours de laquelle,
totalement métamorphosé, il se lâche. Au point de chanter et de danser
en bras de chemise juché sur une estrade au cours d’un meeting dans un
quartier populaire d’Abidjan. Comme si sa longue traversée du désert
l’avait endurci et bonifié.
Compter sur les Baoulés
Troisième erreur de Laurent Gbagbo: il est persuadé que les Baoulés,
ethnie du sud dont est issu l’ancien président Henri Konan Bédié,
n’obéiront pas aux consignes de vote de ce dernier, qui a appelé à
voter massivement au second tour pour Ouattara le nordiste. Tout au
long de sa campagne, le chef de l’Etat sortant ne s’est d’ailleurs pas
gêné pour leur rafraîchir la mémoire. Leur rappelant les jours pas si
lointains où Ouattara et Bédié s’entredéchiraient. En pure perte. Les
Baoulés apportent en grande partie leurs suffrages à l’ancien Premier
ministre Alassane Ouattara.
Nier la détermination de l'Onuci
Le fondateur du Front populaire ivoirien (FPI), va commettre sa
quatrième faute en sous estimant la détermination de Choi Young-jin, le
représentant du secrétaire général des Nations unies en Côte d’Ivoire
(Onuci), à faire respecter les résultats des urnes tels que proclamés
par la Commission électorale indépendante (CEI). Malgré toutes les
tentatives d’intimidation et de déstabilisation dont il est l’objet, le
diplomate sud-coréen ne lâche rien. Une détermination partagée par la
Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao). Qui,
sous la houlette de son président en exercice, le chef de l’Etat du
Nigeria Goodluck Jonathan, apporte d’emblée son soutien au patron de
l’Onuci. Un soutien que l’organisation régionale assortit d’une menace
de faire partir le chef de l’Etat sortant par les armes au cas où il
persisterait à refuser de quitter le pouvoir.
Compter sur les autres chefs d'Etat
Cinquième erreur de Laurent Gbagbo: son secret espoir de voir les chefs
d’Etat de l’Afrique de l’Ouest se diviser au fil des jours et des
semaines fait long feu. Ne lui reste plus qu’à miser sur ses «amis»
d’Afrique australe, Jacob Zuma, président de l’Afrique du Sud, et José
Eduardo dos Santos de l’Angola, pour sauver son pouvoir lors d’un
sommet extraordinaire de l’Union africaine. Non sans un certain succès.
Puisque ces derniers finissent par dissuader la Cédéao de le déloger
par la force. Mais comme l’avait si bien dit Charles de Gaulle, les
Etats n’ont pas d’amis, mais des intérêts. Et il ne fallait pas être
grand clerc pour deviner que l’Angola et l’Afrique du Sud ne
sacrifieraient pas longtemps leurs ambitions et leurs intérêts sur le
plan international pour les beaux yeux d’un homme désormais mis au banc
de la communauté internationale.
Qui pouvait d’ailleurs douter un seul
instant que Luanda prendrait indéfiniment le risque d’hypothéquer ses
relations privilégiées avec les Etats-Unis qui, par la voix du
président Barack Obama, ont très vite reconnu Alassane Ouattara comme
le président élu de la Côte d’Ivoire? Dans la même veine, on voyait mal
Pretoria, qui ambitionne d’obtenir un siège permanent au Conseil de
sécurité des Nations unies, saborder ses chances d’y parvenir en
soutenant mordicus un mauvais perdant désormais dans le collimateur de
la grande institution internationale.
Ce ne fut donc pas une surprise de
voir Jacob Zuma et Dos Santos lâcher leur «ami» en rase campagne et
reconnaître à leur tour la victoire d'Alassane Ouattara. Les initiés
auront dû remarquer que c’est à la suite de son voyage officiel en mars
en France, au cours duquel il a rencontré son homologue Nicolas
Sarkozy, que le successeur de Thabo Mbeki a viré sa cuti.
Laurent Gbagbo aurait donc dû
comprendre que le vent avait définitivement tourné et saisir la
dernière occasion que lui offraient ses pairs africains de sortir
honorablement de la situation inextricable dans laquelle il s’était mis
tout seul. La mission conduite par le panel de quatre d’entre eux,
chargée de trouver une «solution définitive et contraignante» à la
crise postélectorale ivoirienne, est cette dernière bouée de sauvetage.
Mission qui confirme la victoire d’Alassane Ouattara.
Rester quand même, massacrer et ne pas craindre la Licorne
Enfermé dans sa tour d’ivoire, Laurent Gbagbo commet sa sixième erreur
en s’arc-boutant au pouvoir. Pire, en autorisant le 3 mars son armée à
tuer à l'arme lourde sept femmes lors d’une manifestation pro-Ouattara
dans le quartier d’Abobo à Abidjan. Et en faisant massacrer par ses
troupes le 17 mars entre 25 et 30 civils, selon l’Onuci toujours à
Abobo. Il a fait l’erreur de trop. La septième. Sans doute a-t-il pris
pour argent comptant, et c’est sa huitième et dernière bévue, la
déclaration faite trois mois plus tôt par Nicolas Sarkozy qui avait
estimé que «l’ancienne puissance n’est pas la mieux placée» pour
intervenir en Côte d’Ivoire.
Et pour une fois, c’est le «boulanger»
qui se fait rouler dans la farine par le chef de l’Etat français. Qui
fait déposer en compagnie du Nigeria une résolution au Conseil de
sécurité: la fameuse résolution 1975 adoptée à l’unanimité le 30 mars
et qui autorise l’Onuci et la Force Licorne à neutraliser toutes les
armes lourdes utilisées contre les civils par les Forces pro-Gbagbo. La
suite, on la connaît. L’Onuci et la Force Licorne pilonnent la
présidence de la République où se terraient depuis plusieurs jours
Laurent Gbagbo et son épouse Simone entourés du carré de leurs derniers
fidèles. Un déluge de feu qui ouvre la voie aux Forces républicaines
d’Alassane Ouattara, qui pénètrent dans la résidence présidentielle et
arrêtent tout ce beau monde le 11 avril.
14 Commentaires
Deuuuuuuuuuuuuuuuxx
En Mai, 2011 (13:21 PM)Deu
En Mai, 2011 (13:23 PM)Nas Fan De Gaddafi
En Mai, 2011 (13:28 PM)????????????
En Mai, 2011 (13:31 PM)Undefined
En Mai, 2011 (13:44 PM)Undefined
En Mai, 2011 (13:57 PM)Kesako
En Mai, 2011 (14:23 PM)Pendant 4 mois vous nous avez bassiné avec vos inepties, avec votre esprit tordu et torturé maintenant cela suffit !
Le temps des prestigitateurs est fini, le temps de la palabre aussi, une page douloureuse de la Cote d'Ivoire est tournée et définitivement tournée et tant mieux pour la Cote d'Ivoire!
Maintenant si vous etes Ivoirien , votre pays a besoin de paix, aidez le à retrouver la paix et surtout chercher à participer à son développement, et à le redresser car Laurent Gbagbo l'a laissé dans un état catastrophique à tous points de vue, économique, social et politique!
Une chance extraordinaire s'offre cependant pour le pays, avec Alasane Ouattara, dont l'expertise, la compétence et l'amour de son pays non fin , ni calculé, mais sain et lucide, sortiront dans les 5 ans le pays, au bord du précipice ou il se trouve actuellement!
Soyez enfin utile au lieu de prérorer et délirer à longueur de thémes sur Seneweb!
Dieu bénisse l'Afrique !
Undefined
En Mai, 2011 (14:37 PM)Rapel
En Mai, 2011 (15:02 PM)Vera
En Mai, 2011 (15:52 PM)RECTIFICATIF
ALASSANE DRAMANE OUATTARA est gouverneur de la France en CI pas président
Le Chef Coutumier
En Mai, 2011 (16:14 PM)Undefined
En Mai, 2011 (23:30 PM)Indefinited
En Mai, 2011 (01:39 AM)C'est Quoi Ton Blem
En Mai, 2011 (14:00 PM)Participer à la Discussion