« Il était comme le coq qui croyait
que le soleil s’est levé
pour l’entendre chanter »
George ELIOT
que le soleil s’est levé
pour l’entendre chanter »
George ELIOT
Le sentiment d’exaspération qui s’était emparé des hiérarques du Pds est en train de partout se transformer en une révolte généralisée. On n’en peut douter. Depuis que Pape Samba Mboup a déclaré la guerre au « mouvement », le Pds tout entier s’est mis en ordre de bataille. Comme s’ils s’étaient passé le mot, les libéraux contestataires ne laissent plus aucun jour passer sans déverser leur colère sur la place publique et dire à quel point ils exècrent la Génération du concret. Les troupes abandonnées à elles-mêmes, qu’elles soient à l’Assemblée nationale, au Sénat ou au Conseil économique et social, ne veulent plus se laisser abuser. Il faut être un trop parfait courtisan pour marquer de la surprise à entendre les cris d’indignation et les appels à la révolte. On les entend jusque dans les couloirs du palais de la République.
Le système qu’avait instauré Abdoulaye Wade à l’entame de son magistère agissait sur deux leviers psychologiques qui ont assuré jusqu’ici sa pérennité, l’espoir et la crainte. Mais il a atteint ses limites quand celui qui dispensait les satisfécits et imposait les blâmes ne les peut plus. Il n’y a plus rien à espérer, plus rien à craindre. Le chef de l’Etat et son fils ne suscitent que du mépris à leur passage. Ils ont tenté de se défaire d’Aminata Tall et de Souleymane Ndéné Ndiaye, avant de se résigner devant la clameur qu’ils ont suscitée. C’est maintenant sans complexe que le Premier ministre revendique son amitié avec Macky Sall, ses relations avec Youssou N’dour, Bara Tall et Idrissa Seck, en laissant entendre à qui le veut qu’il ne laissera personne utiliser l’appareil d’Etat pour régler des comptes politiques.
Il est fini le temps où consentir était un loisir avantageux et contester, un jeu dangereux. La menace est toujours présente. Nombre de gens paient encore pour leur courage comme viennent de le faire, à des kilomètres de distance, un diplomate chevronné et un agent émérite, tous deux coupables de ne pas sacrifier leur honneur pour le bonheur de la fratrie présidentielle. Il est reproché au premier d’agir pour le compte de Cheikh Tidiane Gadio, au second de prêter sa tête et sa plume à Pape Diop. Mais la colère engendrée par l’injustice et les humiliations a pris le dessus sur la crainte des sanctions et de la déchéance matérielle. Tout homme frustré devient ainsi un homme radicalisé.
Le président de la République est le premier responsable de cette vague de mécontentement d’une ampleur jamais égalée. L’acte de trop a sans doute été la désignation de Farba Senghor comme coordonnateur du Pds, suivie de la promotion exclusive d’illustres inconnus. Mais Karim Wade y a mis du sien. Car s’il y a un domaine dans lequel le fils du président de la République s’illustre savamment, c’est bien dans l’art de se faire des ennemis. Les attaques contre Souleymane Ndéné N’diaye à peine estompées, il avait déjà engagé la guerre contre Samuel Sarr et disposé ses troupes contre Pape Diop. Cheikh Tidiane Sy savoure son retour au ministère de la Justice et se fait un malin plaisir à lancer la Dic aux trousses des « karim boys » de Ndioum et de Colobane. Madické Niang souffre de se faire tout le temps doubler. Même Habib Sy, qui se présente opportunément comme un « concrétiste », n’en finit pas de pester contre celui qui lui a pris le « Ministère des Infrastructures, de l’Équipement, des Transports terrestres et des Transports maritimes intérieurs » qu’il occupait.
Le fils du président de la République ne fait jamais l’hypocrite. Il n’aime pas ses ennemis et les combat avec abnégation. Cette logique implacable s’applique aussi à ceux qui s’évertuent à lui chercher du bien. Si bien qu’on le croirait voué au même sort que le scorpion de la fable, obligé de mordre tous ceux qui tentent de lui sauver la vie.
Ce qui est en train de se passer est le résultat de plusieurs années de frustrations contenues, d’humiliations subies pour le plaisir de l’insurpassable fils. Ebloui par Karim Wade « la lumière », le président de la République s’est laissé aveugler. C’est ainsi que pensant sa victoire aux élections locales certaine, il s’en est allé vendre les mérites de son fils à Nicolas Sarkozy, qui s’est tordu de rire en apprenant les brillants résultats du « meilleur des sénégalais » aux élections locales de mars 2009.
Dans les prochaines semaines, la même campagne qui avait été engagée contre Macky Sall va être menée contre Pape Diop, sous la conduite du neveu Doudou Wade. Le président du Sénat avait, lors du vote de la loi limitant le mandat du président de l’Assemblée nationale à un an, demandé l’application du même principe au Sénat. Mais cela n’a pas suffi à rassurer Abdoulaye Wade. Depuis trois ans, les affidés de la Génération du concret rodent dans les rues de Dakar et manœuvrent inlassablement pour déstabiliser l’ancien financier du Pds. Il a réussi à rassembler en face de lui tous ceux qui croient avoir été injustement traités, allant de Macky Sall à Idrissa Seck, en passant par Samuel Sarr, Abdou Fall, Babacar Gaye, Pape Samba Mboup et toute cette masse silencieuse qui rêve de le voir à terre pour l’achever. Quoi qu’ils fassent, la bataille est maintenant inévitable entre le Pds authentique et un Pds composé de Paabi, Doom jo, Sohna si, conduits par Farba Senghor, leur cocher de fiacre.
Abdoulaye Wade a la main mise sur l’Etat, mais il n’a aucune prise sur les hommes. C’est le grand enseignement de ces dix dernières années pendant lesquelles rien n’a été négligé pour offrir le pays à Karim Wade. La suppression du poste de numéro deux dans le Pds, les centaines de milliards engagés dans les chantiers de l’Anoci, son ministère gigantesque qui lui octroie près de la moitié du Budget général de l’Etat, tout a été fait dans le seul but de l’imposer aux Sénégalais. Des entreprises ont été liquidées, des familles disloquées, de pauvres innocents emprisonnés pour ce piètre résultat. Le président de la République a fiance en un fils qui se révèle au final, un incapable. Mais à la décharge de Karim Wade, le président de la République n’est lui-même capable de rien. Aucun coup ne lui réussit. Tout ce qu’il échafaude finit par s’effondrer. Le débat sur sa candidature qu’il ne veut plus entendre, c’est lui qui l’a appelé de tous ses veux, en se déclarant candidat à trois ans de la présidentielle. Il trouve maintenant malsain qu’on lui rappelle les dispositions de la Constitution et ses propres propos sur le sujet. Il a disloqué son parti en croyant réussir une prouesse politique, voilà que le Pds se retourne contre lui. Il fait preuve de la même ingéniosité en détournant l’argent du contribuable, mais il se fait toujours prendre. Il est normal qu’à ce stade, la moindre lumière l’éblouisse.
SJD
P.S : J’ai trouvé les recommandations de la Cena sur le vote des sénégalais de l’extérieur monstrueuses et choquantes. Au Sénégal, le vote n’est pas obligatoire, il procède d’un libre choix. Dire qu’on va supprimer le vote des Sénégalais de l’extérieur à cause d’un taux de participation très bas, c’est se dispenser de toute réflexion sur les raisons pour lesquelles les citoyens ne se livrent pas à cet exercice hautement citoyen, surtout quand le régime en place rend difficile l’obtention de la moindre pièce d’identification. Cela voudrait dire que quand les populations de Diourbel ne seront pas nombreuses à aller voter, il faudra supprimer le vote à Diourbel. C’est de la pure folie.
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