Deux ou trois jours avant l’installation officielle du président Macky Sall, un journaliste qui animait une émission radiophonique dont j’étais l’un des invités, me demandait ce que je pensais du nouveau gouvernement qui allait être formé. Je lui répondais qu’il était difficile de donner un point de vue sur un gouvernement qui n’était pas encore en place, mais que j’en avais tout au moins une idée, une vision.
Il devrait être formé – c’était en tout cas mon souhait
ardent –, d’hommes et de femmes qui allient, entre autres qualités, la
compétence, l’expérience, l’esprit d’entreprise et la bonne moralité. Et
j’ajoutais, pour me faire plus concret, qu’à la place du nouveau président, je
ne nommerais sûrement pas Mbaye Ndiaye ministre, mais que je l’enverrais plutôt
à l’Assemblée nationale où il avait déjà acquis une certaine expérience. Je ne
nommerais pas non plus, à certains postes stratégiques, des hommes ou des
femmes qui n’en avaient pas le profil, malgré la proximité que je pouvais avoir
avec eux (elles).
Le tout nouveau
président de la République officiellement installé nomma son premier
gouvernement où figurait en bonne place Mbaye Ndiaye, en qualité de Ministre de
l’’Intérieur. Ce gouvernement, ainsi que trois nominations aux postes
stratégiques dont j’ai fait état plus haut, furent ma première déception de l’Alternance
du 25 mars 2012. Le temps allait me donner rapidement raison. A l’occasion d’un
premier réaménagement, Mbaye Ndiaye quittait le gouvernement et devenait
(curieusement) Ministre d’Etat auprès du président de la République. A côté des
titulaires des trois postes stratégiques, furent nommés plus tard, en qualité
d’adjoints, des administrateurs civils de classe exceptionnelle ou qui n’en
étaient pas très loin. En vérité, si on ne se souciait que de bonne
gouvernance, d’efficacité administrative, les seconds devraient être les
titulaires.
Pour revenir à
notre ami Mbaye Ndiaye, qui sert de prétexte à cette contribution, il n’avait
vraiment pas le profil de l’emploi et en avait rapidement administré la preuve.
Aujourd’hui, en plus d’être Ministre d’Etat auprès du président de la République,
il est le Directeur des structures et Président de la Commission d’implantation
de l’Alliance pour la République (Apr). Il est apparemment bien plus à l’aise
dans cette fonction politique – ou politicienne – qui consiste, pour
l’essentiel, à massifier l’Apr. Pour s’en convaincre, il faut lire l’interview
qu’il a accordée au journal « Le Quotidien », dans son édition du
lundi 25 février 2013, pages 8 et 9. Cette interview nous révèle vraiment qui
est cet homme que le président Macky Sall avait nommé au poste stratégique de
Ministre de l’Intérieur. Son premier souci est de massifier son parti et, pour
y arriver, enfourche sans état d’âme le cheval de la détestable transhumance.
Sa stratégie, c’est de débaucher des militants d’autres partis et d’organiser
des meetings de ralliements. Il ne s’en cache pas et en est même très fier.
C’est ainsi qu’il déclare sans gêne ceci : « Nous accueillons avec fierté Malick Guèye et Khouraïchi Thiam. »
Accueillir avec fierté Malick Guèye et Khouraïchi Thiam ! Je ne
m’appesantirai vraiment pas sur cette déclaration qui anéantit déjà tous les
espoirs que l’on pouvait placer dans l’Alternance du 25 mars 2012. Le parcours
politique tortueux de ces deux individus est suffisamment connu des
Sénégalaises et des Sénégalais.
Le même Mbaye
Ndiaye se glorifie que « plus de 33
anciens députés du Pds dont Abdoulaye Sène ont rejoint l’Apr ». Ces
mêmes députés qui ont modifié la Constitution et fixé, à partir de ce moment-là
et par voie du Règlement intérieur de l’Assemblée nationale, la durée du mandat
du président de cette institution à 1 an au lieu de 5 précédemment, rien que
pour se débarrasser de ce dernier, en l’occurrence Macky Sall, qui refusait de
démissionner !
L’ancien
Ministre de l’Intérieur fait état aussi de son ambition de briguer la Mairie de
Dakar, ce qui est son droit le plus absolu. Mais là où le bât blesse, c’est
quand il appelle Khalifa Ababacar Sall à rejoindre l’Apr, s’il veut rester Maire
de Dakar. Et il lâche cette autre déclaration : « Nous ne pouvons pas être à la tête du pays
et laisser un autre parti diriger la capitale. » Est-ce vraiment
celui-là qui fut Ministre de l’Intérieur et qui est aujourd’hui Ministre
d’Etat ?
D’abord, l’homme
semble n’avoir aucun respect pour Khalifa Ababacar Sall. Ce dernier a quand
même un parcours et une expérience politiques respectables. Même si, par
extraordinaire, il devait rejoindre l’Apr, ce ne serait quand même pas aussi
facilement, sur un simple appel d’un Mbaye Ndiaye. Ce dernier va plus loin
encore quand il déclare que l’Apr – car, c’est d’elle qu’il s’agit – ne peut pasêtre à la tête du pays et laisser un autre parti diriger la Capitale.
D’abord, ce n’est pas un parti, mais bien une coalition qui dirige la Capitale
nationale. Ensuite, que fait-il du droit des électeurs à accorder leur
confiance à qui ils veulent ? En outre, oublie-t-il déjà que, des
élections locales du 22 mars 2009 au 25 mars 2012, cette même Capitale
nationale est dirigée par Khalifa Ababacar Sall, même si l’ancien vieux
président politicien lui mettait tous les jours des bâtons dans les
roues ? Ne sait-il pas que, dans une grande démocratie comme la France,
Jacques Chirac est resté Maire de la ville de Paris pendant tous les deux
septennats de François Mitterrand, et que le président Nicolas Sarkozy a « cohabité »
avec Bertrand Delanoë de 2007 à 2012 ?
Notre ancien
Ministre de l’Intérieur a même un droit de regard sur le parti qui devra
prendre le relais de Macky Sall. En tout état de cause, ce ne peut pas être le
Parti socialiste. Ce serait un rêve, selon lui. D’abord, ce n’est pas un parti
qui prendra le relais de Macky Sall, mais bien un homme ou une femme. Ensuite,
M. Ndiaye oublie toujours le peuple, le seul détenteur du pouvoir et qui le
confie à qui il veut. L’homme est tellement partisan, tellement obnubilé par
l’Apr, qu’il ne parle que de parti, ne sachant pas que la période est dépassée,
où un seul parti politique dirigeait le pays ou la Capitale nationale. L’heure
est désormais aux coalitions politiques. Mbaye Ndiaye est le seul à ne pas le
savoir.
L’homme met
aussi en évidence ses limites en matière de connaissance de l’Etat quand il
révèle, dans son interview, que le président de la République l’a consulté pour
le Conseil économique, social et environnemental, mais qu’il n’était pas
intéressé. En d’autres termes, s’il était intéressé, Madame Aminata Tall ne
serait peut-être jamais présidente de cette institution. Elle ne serait donc qu’une
présidente par défaut ! Que pensera la « dame de fer » de cette
révélation ?
L’interview de
Mbaye Ndiaye est riche de bien d‘autres surprenantes déclarations et
révélations qui attestent que, malgré ses longues années de militantisme
politique, il n’a pas les qualités d’un homme d’Etat. C’est un politicien, un
politicien médiocre et qui le reste. Sa seule préoccupation est de reconstituer
le Pds autour du président Macky Sall. Ce dernier ne doit pas accepter de
tomber facilement dans le piège de la détestable transhumance, ni dans les
autres pratiques malsaines qui étaient les fondements de la gouvernance des
Wade. La massification d’un parti ne devrait pas être un objectif national. Les
nombreux meetings de ralliements et de fusion de partis squelettiques dans
l’Apr sont loin, très loin de nos préoccupations.
Le 25 mars 2012,
nous nous sommes débarrassés du vieux président prédateur et avons porté
massivement nos suffrages sur le candidat Macky Sall, qui s’engageait à
gouverner autrement le Sénégal, dans la vertu, la sobriété, la transparence et
l’efficacité. Nous n’oublions surtout pas son slogan « La Patrie avant le
parti ». Aujourd’hui, nombre de nos compatriotes commencent à se poser des
questions. Ils ne s’attendent certainement pas à ce que tous les problèmes
soient réglés tout de suite. Ils souhaiteraient, cependant, une vision claire,
des objectifs précis et des débuts de solutions rassurants et, en particulier, une
rupture nette d’avec la nauséabonde gouvernance des Wade.
Le président
Sall est certainement bien fondé à avoir un œil sur les élections locales de 2014
et sur sa réélection en 2017. Pour autant, ses troupes, ni par ailleurs
d’autres, ne devraient pas installer le pays dans une campagne électorale
prématurée, qui nous éloignerait de l’essentiel de nos préoccupations. Ce que
nous attendons de lui et de son gouvernement, c’est qu’ils remettent le pays au
travail, prennent à bras le corps les nombreux problèmes qui
l’assaillent : dette (intérieure comme extérieure) pesant de plus en plus
sur nos maigres finances publiques, faible croissance du Pib, chômage et
sous-emploi qui frappent en particulier les jeunes, prix des denrées de
première nécessité toujours élevé, distribution de l’énergie électrique encore
défaillante, secteurs pourvoyeurs
potentiels d’emplois comme l’agriculture, l’élevage, la pèche, le tourisme,
l’artisanat et l’industrie (pour ne citer qu’eux) attendant d’être boostés,
crises continuant de perturber sérieusement l’éducation et la santé, etc.
C’est sur ce
terrain-là que nous attendions le président Macky Sall, plutôt que sur la
massification de son parti par la détestable transhumance. Ce qui fera la
différence en 2014 et en 2017, ce ne sera sûrement pas la taille de l’Apr ni,
par ailleurs, les pratiques politiciennes et clientélistes qui nous ont
empoisonné l’existence pendant douze ans. Le 25 mars 2012, l’ancien vieux
président politicien l’a appris à ses dépens, malgré les cinq millions de
militants dont se réclamaient ses troupes. L’écrasante majorité des citoyens et
des citoyennes qui donnent le pouvoir sont hors des partis politiques. Et ils
sont plutôt portés vers une bonne gouvernance, avec des hommes et des femmes de
qualité, que vers des activités purement électoralistes.
Dakar, le 28 février 2013
Mody Niang,
e-mail : [email protected]
33 Commentaires
Ce Monsieur
En Février, 2013 (21:00 PM)Khoff
En Février, 2013 (21:26 PM)CA UN CONNARD NE PEU PAS LE COMPENDRE. BONNE CONTINUATION DOYEN...
Benawaay
En Février, 2013 (21:44 PM)QUE LE BON DIEU NOUS DONNE UN PRÉSIDENT QUI NE PENSE PAS SE FAIRE RÉÉLIRE
QUE LE BON DIEU NOUS DONNE UN PRÉSIDENT SANS PARTI POLITIQUE
ET PUIS Y'A PAS CETTE SEULE FAÇON DE GOUVERNER.
D'OÙ VIENT LES FONDS QUE DETIENNENT LES PARTIS POLITIQUES?NE ME DITES PAS DES COTISATIONS ET AUJOURDHUI,LA PERMANENCE DU PDS EST SANS ELECTRICITÉ,EAU ,LES SALAIRES N'EN PARLONS PAS.
MERCI MODY
Lissale
En Février, 2013 (21:53 PM)Maton
En Février, 2013 (21:58 PM)Pape
En Février, 2013 (22:01 PM)Ahmadou_analyste
En Février, 2013 (22:37 PM)Mes encouragements!
Veille
En Février, 2013 (22:39 PM)Doro Gangue
En Février, 2013 (22:55 PM)Naar
En Février, 2013 (22:58 PM)Kity
En Février, 2013 (23:01 PM)Mahouradia
En Février, 2013 (23:06 PM)Souvenons-nous également du caractère critique de l'opinion sénégalaise, les plumes commencent à s'éguiser donc à s'exprimer, ceci est prémonitoire d'un doute qui s'installe, ce qui fût le cas sous le régime de Wade;
Donc au Président Macky Sall de rapidement se resaisir pour changer de cap;
Il faut s'entourer de compétences avérées, promptes à produire des résultats rapides.
M. Mody NIANG est un fin analyste du monde politique, bien des compatriotes dans la diaspora, notamment en France apprécient sa hauteur de vue très objective !
Pour preuve il ne s'est pas mis à critiquer le régime tout de suite, mais au terme d' un an pratiquement...
Le Président dispose encore de la faveur de pouvoir réorienter sa politique, celle économique en particulier.
Il ne faut en aucun cas qu'il tombe dans les travers de faire de la propagande politique pour être élu, et de continuer cette même propagande durant son mandat, cela n'a jamais été productif, pour preuve le cas de WADE
Bravoo
En Février, 2013 (23:08 PM)bravo Mr NIANG
Gora
En Février, 2013 (23:41 PM)Wédi
En Février, 2013 (23:57 PM)Suxxali Kaolack
En Mars, 2013 (01:12 AM)-le palais et les institutions de la Rep sont maintenant sacralises
-un ami ancien ministre de Wade m.a appele ce matin pour me dire son tetonnement de voir toujours que le President VOYAGE ( Abidjan )avec une tres petite delegation , et plus de voyage pour recevoir des deco ou des prix
-l'OFNAC est en place
-plus de ministres en 1ere classe dans les avions qd il y a classe affaires
-limite au strict minimum des sommes allouees aux chefs religieux
- pas de complainsance aux DGs ou Ministres incompetents (AIBD boss debarque)
-baisse de la facture tel et utulisation judicieuse et rationnelle des fonds politiques
etc
Suxxali Kaolack
En Mars, 2013 (01:29 AM)-l’OFNAC est en place
-plus de ministres en 1ere classe dans les avions s’il y a classe affaires
-limite au strict minimum des sommes allouées aux chefs religieux
- pas de complaisance aux DGs ou Ministres incompétents (AIBD boss débarqué)
-baisse de la facture tel et utilisation judicieuse et rationnelle des fonds politique
Précision
MBAYE NDIAYE a le droit de massifier son parti et de demander a tout le monde de rejoindre son parti l’APR mais n’oubliez pas les prébendes c’est Macky qui les donne selon différents critères et non l’adhésion a son parti . APR est ouvert a tout le Monde mais l’Etat n’est ouvert qu’aux compétents et aux hommes vertueux
Boumiputra
En Mars, 2013 (02:45 AM)Je ne suis pas de l'APR moins un sympatisant de Mbaye Ndiaye, mais un parti politique meme etant le parti au pouvoir a le droit comme une association privee de derouler sa strategie de massification pour conserver le pouvoir. D'autant plus que ce sont les electeurs senegalais qui decideront au moment venu par rapport a leur satisfaction de leurs vecus quotidien par le gouvernement. Et ici j'ai bien preciser le gouvernement et non pas le parti APR.
Mody niang fait une confusion entre le parti qui conteste les elections locales et le gouvernement. Ce sont les actions du gouvernement qui merite de se focaliser et demande des critiques constructives pour mieux les pousser a travailler de maniere efficace et efficient pour l'interet de la nation.
Mody niang l'a bien precise, Mbaye ndiaye est devenu un charge de reorganiser l'APR. Et c'est de bonne guerre qu'il prepare le terrain et les militants pour les prochaines echeances electorales. Au meme moment entre adversaire politique de differentes formations de se lancer des piques. Le pourquoi cet appel fait a Khalifa sall.
En fin, ceci est dans l'ordre normal des regles en politique, et Mody pouvait economiser son energie et ses quelques neurones utilises dans la reflexion pour debattre des sujets plus delicats et plus importants pour le citoyen senegalais comme le financement couverture medicale universelle, l'energie, comment resoudre les difficultes de l'ecole ou la legitimite de la crei etc...
Boumiputra
Cheikh Mara Ndiaye
En Mars, 2013 (06:39 AM)De meme, je constate qu' il ne dit rien d' Abdoulaye Diop, l' ex-ministre de l' économie , sans qui le pillage des deniers de l ' Etat n' aurait pas été possible.
Par ailleurs, certains membres de son très proche entourage commencent à construire des chateaux et à brasser des millions sans que rien puisse expliquer comment ils ont pu devenir si riches en quelques mois de présence à la présidence. C ' est à croire que Macky n' a pas retenu les leçons de ses prédécesseurs surtout que pour lui les choses (la contestation de son pouvoir) ne vont pas trainer.
Enfin, il ne nomme que des DG et PCA Toucouleur. Pourquoi?
Nenewaay
En Mars, 2013 (07:54 AM)Unitecentrale
En Mars, 2013 (08:59 AM)Nere
En Mars, 2013 (09:09 AM)Cheikh Mara Ndiaye
En Mars, 2013 (09:22 AM)Elyta
En Mars, 2013 (09:23 AM)Poulotfall
En Mars, 2013 (09:27 AM)Xarebi
En Mars, 2013 (10:25 AM)Elysse Bis
En Mars, 2013 (10:37 AM)Que tous ceux qui ont atteint l'age de la retraite,...se..retirent...de la vie publique !!!
...POINT..BARRE.....!
WASSALAM...a... tous., au pays....!
Elysee Bis Bis
En Mars, 2013 (10:55 AM)Vouloir s'accrocher , et ...encre detourner, voler , dillapider ,... pour combien de temps encore ???!!!
Ces vieux merdeux , qui ont passe toute leur miserable existence , a se nourrir , et a sucer le sang
du peuple senegalais , doivent degager , deserter , et abandonner la chose politique, bien vite ... !
S'ils ne le font pas volontairement , et de bon gre , il faudra leur servir des receptions houleuses , sulfureuses,
et des immondices puantes , sur la figure ! Le temps de l'arrivee d'une nouvelle classe de jeunes politiciens ,
bien honnetes , serieux, dedies et efficaces , est venu ! ..Rester inerte comme des moutons de tabaski , que les choses changent , ou s'ameliorent , c'est de l'utopie dangeureuse et lache !..WASSALAM..a mes freres et soeurs !
NB......Y EN A RAS LE BOL, .....DE CES ....VERMINES SOCIALES ..., BAKHOGNES...ET.... LIMACES...!
Mody Niang
En Mars, 2013 (11:07 AM)Anna
En Mars, 2013 (13:59 PM)Remo
En Mars, 2013 (15:33 PM)Momar Louga
En Mars, 2013 (16:35 PM)Lili
En Mars, 2013 (06:59 AM)Participer à la Discussion