Le sommet de Lisbonne vient de baisser les rideaux. Il l’a fait malheureusement dans un air de promesses non tenues. Et pourtant, Lisbonne « la belle » était parti pour être le lieu d’une rupture historique, le moment qui marque la fin attendue d’une séquence : le pacte colonial et le début d’un partenariat souhaité et fécond. Il y a là encore un rendez vous manqué. IL faut à présent replacer le débat sur les Accords de Partenariat Economique (APE) dans son vrai contexte et surtout l’extirper de la tendance presque maladive de faire en tout de la politique politicienne.
Les Accords de Cotonou qui sont le cadre global actuel de coopération entre les Pays d’Afrique, Caraïbes et Pacifique doivent arriver à terme le 31 décembre 2007. Les protagonistes se sont donc retrouvés à Lisbonne pour combler le vide que va occasionner cette situation. L’Union européenne propose la fin du cadre global et l’instauration d’accords bilatéraux basés sur le libre échange que sont les accords de partenariat économique (APE) aux quels l’Afrique oppose un système intégré de coopération qui s’appellerait Accord de Partenariat pour le Développement (APD) qui cherche à tempérer le libre échangisme au profit des impératifs de développement des économies Africaines. C’est cette seconde position qui est défendue par la majorité des Chefs d’Etats africains avec à leur tête le président Abdoulaye Wade. Au demeurant, ce que le Président sénégalais veut pour l’Afrique c’est la formulation concertée de mécanismes qui devraient être les nouveaux outils de coopération entre l’Union Européenne et l’Afrique.
Cette démarche postule nécessairement la déconstruction des paradigmes existants et leur reconstruction dans une perspective nouvelle : celle du monde tel qu’il est aujourd’hui. Un monde marqué par une interdépendance accrue des économies, une solidarité obligée dans la gestion des biens et des défis publics mondiaux (environnement, sécurité de la planète, violence etc..) et qui s’accompagne d’une atomisation progressive de la puissance au sens international du terme. Il s’agit donc maintenant de reformuler le système de manière à ce qu’il contribue plus efficacement à éviter à l’Afrique une marginalisation économique continue en lui donnant une chance réelle de reprendre en main enfin son initiative historique et de redresser les torts qui lui ont été faits. Mieux que de demander une quelconque compensation pour les crimes commis lors de la Traite negriére ou encore de l’Esclavage, les propositions soutenues par le Président Wade et ses pairs sont une occasion de redresser les torts en créant de manière digne et équitable les conditions d’une renaissance économique et donc politique de l’Afrique. Il s’agit en effet pour l’Europe de donner les gages de sa volonté réelle d’aider au décollage économique de l’Afrique en appliquant pour tous ses pays la généralisation d’un mécanisme par ailleurs déjà connu en droit économique international : la clause de la nation la plus favorisée. Elle consiste pour les pays riches d’accorder des facilités d’entrée dans leurs marchés aux produits d’un pays généralement du sud pour une durée déterminée. Dans les négociations en cours, il est vital pour l’Afrique d’éviter à tout prix la stratégie des cuirasses, car il est de notoriété publique que la meilleure façon pour les faibles de perdre une bataille contre les puissants c’est d’y aller en ordre dispersé. Les accords bilatéraux préconisés seront en l’espèce déstabilisatrice pour des économies très fragiles dont les équilibres ont été restaurés aux prix de grands sacrifices. Il faut donc dépassionné et décomplexé le débat pour construire un cadre d’échanges gagnant- gagnant. Les Accords de Partenariats pour le Développement (APD) tels que préconisé par le Président Sénégalais sont à notre avis pertinents et renferment des avantages multiples pour les deux parties. Pour l’Afrique, le nouveau partenariat que postule les (APD) permettra entre autres, de corriger le gap économique et donc la dépendance de l’Afrique par l’amélioration de sa place et de son apport dans le commerce mondial.
* Une possible délocalisation vers l’Afrique de certaines activités économiques devenues d’ailleurs peu rentables pour l’Europe, d’où un transfert de technologies et de compétences.
*La réduction de la saignée migratoire, de la fuite des capitaux qui trouveront des lieux d’investissements sur place et celle des cerveaux qui trouveront également du travail sur place.
Pour l’Europe, les conséquences des APD pourraient être :
*La réduction du flux migratoire à ses portes,
*la réduction progressive des aides financières diverses à l’Afrique qui deviendra progressivement un partenaire capable de fournir des services et des produits de qualité et aux normes européennes
*La réduction de l’insécurité et des différentes formes de violence (terrorisme etc.…)
Voilà à notre avis les données du problème dont la solution doit être trouvée pour le bien des uns et des autres. Il est donc urgent de lancer sur ces points un débat serein et informé pour que l’Afrique et l’Europe ne se laissent pas encore une fois piégées. Car cette dernière n’a rien à gagner à voir l’Afrique divisée et en proie avec les démons de la pauvreté et de l’insécurité. Mais, c’est surtout une responsabilité des élites africaines et de la diaspora d’appuyer l’effort de correction des diverses injustices subies par le continent et lui permettre la reconquête d’une place digne d’elle dans le concert des nations. Ce débat auquel nous invite le Président Abdoulaye Wade demande de la hauteur ; il demande surtout un sens élevé du rôle que les élites africaines et de la diaspora doivent jouer dans la reconfiguration déjà avancée du monde. L’Afrique ne peux plus se permettre de « rater » encore des rendez vous pour des questions mesquines d’intérêts nationaux.
C’est pourquoi, en phase avec les positions du Président Abdoulaye Wade nous lançons un appel pour une large Coalition des africains, de la diaspora et des amis du continent pour une campagne de sensibilisation sur les risques que constituent les (APE) pour les pays africains et pour l’ouverture de vraies négocions sur un partenariat nouveau et juste entre l’Union Européenne et l’Afrique. Un comité international crée sous l’égide de la Convention Citoyenne et Panafricaine-CCP- (Fédération de France) parrainée par le Ministre d’Etat Cheikh Tidiane Gadio est déjà à pieds d’œuvre.
Ce Comité d’initiatives s’apprête à organiser un grand forum sur la question en Janvier 2008 à Paris. Nous invitons tous les africains de la diaspora nouvelle et ancienne à nous rejoindre dans cette campagne.
Aboubakry BA
Président de la CC-P France
Contact : [email protected].
0 Commentaires
Participer à la Discussion