Le gouvernement sénégalais semble avoir visiblement entamé une nouvelle stratégie de communication au regard des dernières sorties des autorités publiques, en l’occurrence celle du chef du gouvernement, Macky Sall, qui a profité de sa visite à Paris pour essayer de redorer le blason d’une image putréfiée par des scandales politiques et financiers, principalement.
Dans cette guéguerre communicationnelle, une des erreurs fatales au Premier ministre, voulant disculper la portée des articles de la presse française sur le bilan de l’alternance au Sénégal, a été de vouloir charger l’opposition et les médias sénégalais. Dans la forme, cette accusation porte aussi un grand tort à la presse française qui se serait appuyée alors sur de mauvaises sources. Une façon de leur enseigner en filigrane le “b-a ba” du métier qui consiste à se diriger vers la bonne source.
Et pourtant, difficile aura été cette mission du Premier ministre dans la capitale française, car n’ayant pas réussi à convaincre les potentiels bailleurs de sa fameuse «stratégie de croissance accélérée». Une trentaine d’entreprises françaises, pas totalement convaincues des perspectives de croissance annoncées avec les nombreux aléas de la conjoncture internationale (hausse du prix du pétrole et dévalorisation des ressources agricoles), avaient seulement répondu à l’appel des autorités sénégalaises. Des autorités qui semblent vouloir recentrer leur politique de partenariat sur la France après des années de tâtonnement post-alternance.
Après avoir voulu redéfinir ces relations et remettre les Américains en pôle position, Dakar se rend compte au fur et à mesure des orientations du Département d’Etat où le pragmatisme et l’intérêt commandent avant toute option. Les attentes de décaissement pour la réalisation de la Plate-forme de Diamniadio semblent en témoigner. Aussi, la non-participation du président sénégalais au Sommet du G8 tenu récemment à Saint-Pétersbourg en Russie, une première depuis l’alternance, semble-t-elle avoir donné un coup de frein à cette orientation de vouloir toujours se placer au-devant de la scène internationale au détriment des priorités nationales.
Face à cette machine qui semble grippée par les nombreuses mauvaises orientations et erreurs, les sorties publiques des autorités sénégalaises ne confortent pas l’option d’une politique responsable et cohérente pour mettre le pays sur de bons rails. Vouloir coûte que coûte jeter l’anathème sur la presse sénégalaise traduit une fuite en avant de ces mêmes autorités qui se refusent à admettre l’évidence.
En effet, avec une kyrielle de «conseillers en communication», terme à revoir d’ailleurs au Sénégal dans la mesure où ce métier et celui du journalisme sont tellement différents, la machine semble être rouée. Si les conseillers, dont la plupart officiant dans les sphères de l’Etat, cherchent vaille que vaille à vouloir présenter un visage rayonnant de leurs structures en essayant de noyer la véritable information, le journaliste essaie par contre de chercher l’information dans toute sa dimension.
Les limites entre la frontière de l’information et de la communication sont devenues très floues désormais avec les nombreux enjeux qui sous-tendent le champ de l’information devenu stratégique pour réussir dans les autres domaines (politique, économique, financier, culturel, sportif et diplomatique, entre autres) et les contrôler. Il convient aussi de dire que l’information n’est plus seulement un transfert de connaissances, mais relaie aussi des jugements, écartant ainsi toute forme de neutralité. L’information n’est donc pas uniquement un outil de connaissance, mais plus un spectacle frisant les règles des comédies classiques.
Durant tout son magistère, le Président Wade a essayé d’être médiatiquement présent afin que les citoyens lui attribuent en réaction les bienfaits des actions du gouvernement, oubliant par là que cette implication ne doit jamais être totale dans la mesure où tous les actes et intentions posés par l’exécutif ne réussissent pas toujours. Le retour de bâton est alors fatal comme cela se passe actuellement. En ne réussissant pas un parfait dosage ou équilibre, le gouvernement aura failli dans sa politique de communication et les attentes redoublées des électeurs et des populations sont devenues plus grandes.
Il ne saurait en être autrement cependant avec un ministère en charge de l’Information, croyant que plus les caravanes sont mises en branle, plus les populations sont impressionnées. Enorme leurre, en effet, dans la mesure où ces caravanes, loin d’apporter aux populations leurs besoins essentiels, les confinent en de simples receveurs qui ne peuvent donc cautionner de façon inactive des infrastructures qui ne semblent pas pouvoir résoudre leurs besoins quotidiens.
Il ne s’agit pas d’inonder les rédactions de communiqués et les téléspectateurs d’images pour croire que l’on communique et que les populations adhérent au projet mis en exergue. S’il est devenu évident que la rareté de l’information du XIXe siècle a fait place depuis à une surabondance, il n’en demeure pas moins que dès que le juste équilibre est faussé, toute la politique mise en branle échoue et haro sur les bouc émissaires. Au Sénégal, le gouvernement semble avoir trouvé deux coupables permanents tout désignés, la presse et l’opposition. Quoi de plus naturel et facile pour des autorités actuellement sans boussole et flirtant au quotidien avec des scandales qui ont fini par décrédibiliser toute l’ossature administrative et juridique de nos institutions.
Pape Karim SEYE Miremont Genève - Suisse [email protected]
1 Commentaires
Allons Y Molo
En Octobre, 2010 (18:37 PM)Participer à la Discussion