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[ Contribution ] L’ERREUR DE WADE ET LA MEPRISE DE TANOR - À propos du Benno et du Sopi

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[ Contribution ] L’ERREUR DE WADE ET LA MEPRISE DE TANOR - À propos du Benno et du Sopi

Face à la percée du Benno et doutant du Sopi, son talisman, mais n’osant pas s’en débarrasser, Me Abdoulaye Wade, Secrétaire Général du Parti Démocratique Sénégalais (PDS), a proposé un slogan équivoque, mi-figue, mi-raisin, son « Sopi pour demain » que je n’arrive toujours pas cerner. Mais je sais que les sénégalais veulent le changement pour aujourd’hui. Ils sont fatigués de l’attendre, de se le faire promettre.

Quant à M. Ousmane Tanor Dieng,  Secrétaire Général du PS, dans une interview faite en marge de la dernière université d’été du Parti Socialiste (PS) et publiée dans la presse, il a déclaré ceci : « le Benno a remplacé le Sopi dans le cœur des sénégalais.» Une méprise impardonnable de la part d’un homme d’État de son niveau. Car le Benno n’est pas le contraire du Sopi. Et dire « oui au Benno », ne signifie pas « non au Sopi. »

Ainsi, Wade et Tanor, qui ne savent peut être pas que le peuple sénégalais est devenu majeur, se trompent tous les deux comme seuls savent se tromper les hommes politiques, maitres de la ruse, des combines et des faux fuyants. Or en politique, disait Wade, l’opposant, une erreur d’appréciation ça se paie cash.  Wade et Tanor oublient que le Sopi et le Benno sont des aspirations du peuple, des rêves qu’ils ont eu (eux et leur groupe), chacun en ce qui le concerne, le génie de deviner, d’interpréter et de proposer aux sénégalais qui leur ont répondu « oui, c’est cela que nous voulons », puis se sont tu et ont attendu … Ils attendent toujours.

Le peuple parle

En effet, il arrive dans la vie des peuples des moments qui sonnent comme des réveils, des moments qui ressemblent à des résurrections. En ses instants magiques, le corps social semble doté d’une âme et d’un cœur qui bat, et les hommes qui le composent acquièrent un supplément de dignité. Car la voix du peuple, en ses instants-là, se fait pathétique.
Oui, le peuple parle.  Sa parole inarticulée qui est d’or exprime, tout comme celle des individus qui le composent, des craintes, des désirs, des peurs, des colères et des rêves. Être un bon dirigeant, c’est être doté d’oreilles capables d’entendre la voix de son peuple et de s’en inspirer. C’est être capable d’écouter le silence de son peuple. Car le silence qui fait le rythme de la parole contient autant de vérités qu’elle.
Hélas, rarement les dirigeants entendent et comprennent la parole de leur peuple, occupés qu’ils sont par les bruits de la foule vaine et menteuse. Rarement les dirigeants écoutent les battements de cœur de leur peuple, leur frémissement d’âme occupés qu’ils sont par les chants d’éloges et les trompettes des ripailles. Occupés qu’ils sont à s’émouvoir de leur pouvoir et à le tester sans cesse, jusqu’à l’émousser, hélas ; à s’enorgueillir des cliquetis de leurs atours.
Le peuple parle. Mais sa silencieuse voix est souvent noyée par la clameur des cités, le brouhaha des marchés, les avis de conseillers, d’experts et autres « wax sa xalaat »1 ou « wax lo xamul »2, par les ambitions et les tumultes des meetings politiques… Alors, pour se faire entendre, il lui arrive d’élever la voix et de crier sa colère par le biais du médium des urnes comme il a eu à le faire un certain 19 mars 2000 et le 22 mars 2009.

Le Sopi dont rêve le peuple

Le 19 mars 2000, le peuple sénégalais a imposé son désir de changement chanté des décennies durant, en vain. Sa voix fut bruyante. Elle fut entendue jusqu’au-delà de nos frontières. Mais son désir ne fut pas compris, me semble-t-il. Car le changement dont rêvait le peuple et dont il rêve toujours ne signifie pas seulement changement d’hommes à la tête de l’État, ni accomplissement de la routine étatique. Il signifie aussi et surtout changement du mode de gouvernance et de gestion des affaires publiques, changement de notre façon de voir et de faire la politique, changement de nos mauvais comportements.
Le changement dont rêvait le peuple, dont il rêve toujours signifie : la fin de l’impunité, de la mal gouvernance, de la corruption, de l’accaparement des richesses, de l’enrichissement illicite, de l’arrogance, de la suffisance, de la gabegie, de la tricherie, de la promotion des anti-modèles et de la gestion solitaire du pouvoir. La fin du mal être des populations de nos villes et de nos campagnes. Le changement dont rêve le peuple est positif. Car on peut changer en avançant, mais on peut aussi changer en reculant ou en pourrissant telle une charogne. Le changement dont rêve le peuple et qui implique la conquête ou la reconquête, la création ou la recréation ne peut se faire que dans l’entente et l’union de tout un peuple au profit de tous.
C’est cette vérité, me semble-t-il, que les sénégalais ont exprimée le 22 mars  en votant Benno qui signifie entente ou union. Ce n’est pas que le Sopi a perdu de sa saveur (que le sopi est sapi, comme le pensent certains) ; ou que le peuple n’en veut plus. Non. Le peuple rêve toujours du changement véritable. Il l’attend avec impatience. Il le fredonne chaque jour. La vérité est que, déçu par l’alternance, il a choisi le Benno pour que soit le Sopi. Car semble nous dire le peuple : « Unissez-vous pour le changement : le Sopi est l’affaire de tous. Pas seulement celui du pouvoir, de l’opposition ou de la société civile. Mais de tous. »

Le Benno qu’a choisi le peuple

Seulement, le Benno qu’a choisi le peuple implique l’union des cœurs. Il exclut les batailles de positionnement et autres comportements fratricides qu’on a pu constater dans les rangs de la coalition Sopi 2009 pendant les investitures et pendant la campagne électorale et dans ceux de la coalition Benno siggil Sénégal au lendemain du vote. Car avec la victoire du benno s’est vérifié, une fois de plus, l’adage qui dit : « Le meilleur moyen de fâcher des amis est de leur offrir une victoire commune, de leur jeter les graines du pouvoir à se partager. » Il en fut de même en 2000. L’Alternance marqua la fin du Fal 3.
En vérité, le Benno qu’a choisi le peuple ne ressemble pas au pacte des hyènes ni à celui des chacals. Il n’a rien à voir avec l’entente des gangsters ni avec celui des bandits de grand chemin. Car il ne s’agit pas d’un gâteau ou d’un quelconque butin à se partager armes à la main. Il s’agit bien plutôt de collaboration en vue d’une œuvre à réaliser, d’hommes et de femmes à soulager, d’un peuple à secourir. Il s’agit de générosité, d’humilité, de patriotisme et de compétence. Il s’agit d’oubli des égoïsmes, des rancœurs, des amours propres, de la compétition malsaine et de l’esprit de rivalité et de vengeance. Il s’agit de fraternité.
Hélas, déjà, des élus du Benno font du Jiiro4 en se décrétant indigents tout en s’appelant « les nouveaux maitres » et transforment les hôtels d’arrondissement en hôtels privés, tandis que les partisans du Sopi eux se prosternent devant la statue dite de la renaissance africaine, en rêvant de leur réélection en 2012.

Le Benno Sopi Sénégal

Il est temps que l’on se réapproprie les valeurs du patriotisme, de la démocratie et de la bonne gouvernance, les valeurs positives africaines comme souhaité par la Charte de la jeunesse initiée par l’Union africaine. Il est temps que l’on se réapproprie ce passage de notre hymne national qui nous demande d’unir la mer et la source, d’unir la steppe et la forêt. Car, et c’est cela, je le crois, la leçon du 22 mars 2009, un simple rappel : Nous sommes UN PEUPLE, tendant vers UN BUT et partageant UNE même  FOI.
Vivement que le pouvoir et l’opposition comprennent ce message du peuple, la seule constante et unique vainqueur, qui les observe en attendant de les rejuger. Vivement que le Président de la République ouvre des négociations pour une union sacrée du pouvoir et de l’opposition en vue de la réalisation des changements dont rêve le peuple sénégalais. Vivement le Benno Sopi  Sénégal.
Et c’est possible, parce que nécessaire. C’est possible parce que rappelle Antoine de Saint-Exupéry : « La pierre n’a point d’espoir d’être autre chose que pierre. Mais de collaborer, elle s’assemble et devient temple.» Et, comme dit dans La charte du Mandé 5: « Rien ne vaut l’entente : Par l’entente s’édifia le monde. Par l’entente  finira le monde. » C’est possible. Car, chante le poète 6: « Quand vient le soir  pour qu’un ciel flamboie le rouge et le noir ne s’épousent-ils pas ? » C’est possible… Il nous suffit d’y croire, de le vouloir, et le miracle du Benno Sopi Sénégal s’accomplira.

ABDOU KHADRE GAYE,  Président de l’Entente des
Mouvements et Associations de Développement (EMAD),
Auteur de « Yaay Kan » et de « Les Chantiers de l’Homme »
Email : [email protected]

1.      Dire son avis
2.      Dire ce dont on ne sait rien
3.      Front pour l’Alternance
4.      Le fait de profiter d’une chose à qui mieux mieux
5.      Ou charte de Kurukanfuga, proclamé par Soundjata Keita, fondateur de l’empire du Mali en 1222
6.      Il s’agit du chanteur Belge Jacques Brel



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