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[ Contribution ] Mensonges et vérités sur Senelec

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[ Contribution ] Mensonges et vérités sur Senelec

Mensonges et contrevérités ont formé la pierre angulaire des interventions du ministre de l’énergie, Samuel Sarr lors de son face à face avec les députés qui examinaient son budget.

C’est injuste que cet homme ait tenté de faire croire aux parlementaires que la fraude (qu’il met pour l’essentiel sur le dos des consommateurs), est l’élément décisif dans l’enlisement de Senelec. Les mensonges sont aussi utilisés depuis quelques jours pour faire croire au peuple que la compagnie Greenwich Turbine Inc. (GTI) est la principale source des coupures de courant alors que la mue de Senelec en holding est une nouveauté et un remède miracle à l’hémorragie électrique dont souffre cette société. Rien que des contrevérités! La réalité est tout autre.

Disons d’emblée que la holding n’est pas une nouvelle trouvaille mais un aboutissement tardif (elle devait voir le jour depuis le mois de Mars dernier) d’un processus entamé depuis 2007 à Paris. A l’époque, Wade devenu impopulaire malgré une réélection surprise ne pouvait que céder à la pression des bailleurs de fonds dont le lobbying devenait insoutenable pour son régime. Il faut dire que les coupures de courant étaient au pic de leur violence et la Banque Mondiale avait confirmé Senelec comme le monstre ayant "plombé les finances publiques un an plus tôt entraînant (...) une baisse de la croissance économique et surtout une baisse des fonds alloués aux dépenses sociales, notamment l’éducation et la santé". Un parterre de bailleurs du Sénégal dont l'Agence française de développement (AFD), la coopération allemande (GTZ), la coopération luxembourgeoise, la Banque africaine de développement (BAD), la Banque islamique de développement (BID) et la Banque européenne d'invest!
 issement (BEI) convoque le gouvernement à Paris le vendredi 5 Octobre 2007. Ces "partenaires" tordent le bras au régime de Wade qui voulait maintenir la situation informelle pour continuer à sucer Senelec.

Au sortir de la réunion, c’est Michel Layec, le chargé de l'énergie en Afrique à la Banque mondiale qui vend la mèche : la privatisation de Senelec est programmée dans le plan de restructuration du secteur énergétique du Sénégal. Mr. Layec ajoute que la réforme de Senelec et d'autres entreprises publiques du secteur de l'énergie du Sénégal sera conduite en même temps que la construction de centrales électriques. Il conclut que "des appels d'offres vont être lancés pour la construction d'une centrale en 2008 et d'une autre en 2009". Le gouvernement du Sénégal était alors sommé de produire une lettre de politique de développement du secteur de l’énergie qui sera actualisée et validée avec tous les partenaires. Le but était de forcer des changements institutionnels à Senelec avant que l’investissement privé trouve sa place dans le nouveau dispositif.

Dans la foulée, le premier ministre de l’époque, Cheikh Hadjibou Soumaré annonce un plan de réhabilitation jusqu’à l’horizon 2012 qui prévoit un programme d’investissements de 520 milliards FCFA afin de renforcer les capacités de production de 600 Mégawatts et réduire la dépendance vis-à-vis du pétrole par la diversification des sources d’énergie. Un an plus tard, Le 28 Octobre 2008 Samuel Sarr indique dans le cadre d’un atelier sur l’évolution institutionnelle de Senelec, que le schéma de la holding est en conformité avec les dispositions prévues dans la loi 98-94 du 14 avril 1998. Il dira d’ailleurs, "après le rétablissement du déséquilibre en l’offre et la demande, et les investissements massifs de 520 milliards de nos francs, il nous a été recommandé de définir l’avenir de Senelec".

Dès mars 2009, les activités transport, production et distribution auraient dues être séparées. Dans ce schéma, le gouvernement devait veiller sur la filiale transport, à la participation publique majoritaire, et à son contrôle stratégique par l’État, à côté du secteur privé national et étranger, des consommateurs et des travailleurs. Pour le démarrage effectif en fin juin 2009, il était prévu de finaliser la mise en oeuvre des études stratégiques juridiques et organisationnelles, les mesures d’accompagnements institutionnelles, politiques et sociales, le business-plan de chaque filiale, les mécanismes tarifaires appropriés et le renforcement de la Commission de régulation du secteur de l’électricité. Ensuite venait le choix de partenaires privés et leur participation, entre juillet et décembre 2009, dans les filiales de la holding. Comme on le voit donc, la matérialisation de cette opération a connu un retard de huit mois. Voilà la vérité !

Acculez Samuel Sarr ou ses gourous ; ils s’envolent aussitôt dans un jargon confus de faux technocrates empreint de chiffres, de pourcentages, d’études, de projets et autres séminaires à n’en pas finir. Le but est de travestir la réalité des faits, de donner du tournis au public et de lasser leur auditoire. Ils se livrent ainsi à leur jeu favori. La fuite en avant et l’exaltation de l’incompétence dont Senelec est la seule dépositaire. La tordue prestation de Samuel Sarr au parlement et la signature de la convention mettant en place la holding ne sont qu’une combinaison au timing calculé pour doper l’opinion de contrevérités. La supercherie ne doit plus continuer. Cela dit, il n’y a aucun doute que la création de la holding offre de meilleures perspectives même si cela reste sujet à plusieurs préalables dont la transparence et l’efficacité dans l’évolution et la mise en oeuvre de cette opération. Mais il y a fort à parier que les investisseurs libéraux (qui ont déjà fait main basse sur les fleurons de l’économie nationale) se partagent la part sénégalaise du gâteau Senelec dans sa version holding. Pour s’en rendre compte, il n’y a qu’à fouiner du côté du port, de la vallée du fleuve, de la Goana, de l’aéroport Blaise Diagne, du foncier à Dakar, du bateau Aline Sitoé Diatta, de l’immobilier côtier, de la nouvelle finance opaque, de l’agro alimentaire, du minier, du transport terrestre, aérien, et j’en passe.

Si la crise financière et la hausse du prix du baril peuvent être des circonstances atténuantes, donc une aubaine pour Senelec, il n’en demeure pas moins que le mal de cette société est son écart dans sa mission de service publique pour devenir un instrument politique à la solde du pouvoir et de ses lobbies. Les choix des dirigeants, les règles de fonctionnement institutionnelles et les stratégies marchandes de Senelec n’ont jusqu’ici été que le reflet des intérêts du pouvoir et de ses proches même si des groupes de pression dans le pays se battent pour influer de façon relative sur l’opacité qui cimente l’emprise de Samuel Sarr et compagnie. Le journal pro-gouvernemental Express News révélait par exemple dans sa livraison du 07 Septembre 2009 que "les agents de Senelec ne paient pas le courant". D’après la publication, "au moment où les consommateurs suent eau et encre pour payer leurs factures d’électricité (…) les agents de Senelec eux ne paient que 10 % de leur consommation défalqués sur leur salaire. Et pour les agents bénéficiant de logements de fonction, c’est l’exonération totale". Une véritable monstruosité!

Le pilotage à vue de cette société l’a transformée en vache à lait avec un mode de management fait d’improvisations et d’approximations dont le résultat est l’incapacité chronique à fournir de l’électricité dans les normes. Les guerres frontales et autres chantages rythment la marche de Senelec. Clédor Sène, condamné puis gracié dans l’assassinat en 1993 de maître Babacar Sèye accuse en Septembre dernier le ministre de l’Energie Samuel Sarr d’entretenir les délestages du mois d’Aôut pour faire l’oeil doux à son père adoptif Pierre Aïm sur le dos des Sénégalais.

Des dépenses de prestiges inopportunes aux nominations politiques, tout est fait pour truffer Senelec de courts circuits dangereux pour l’économie nationale. Rien que pour l’OCI, la Senelec s’est arrangée pour satisfaire les caprices du fiston en quête de pistonnage. 460 millions FCFA furent dégainés pour un réseau de 20 kilomètres permettant une alimentation sécurisée de l’ensemble des sites devant recevoir des hôtes. Mbacké Seck, le chef du département Equipement de réseau de la Senelec racontait fièrement à l’époque que la
Senelec a pris des dispositions pour mettre à contribution plus de vingt groupes secours de 1200 Kva dans les sites ciblés comme les hôtels Sea Plazza, Terrou Bi, Cap Manuel, Mamel en plus de deux départs qui seront issus du poste 30 kilowatt de Hann. Quand il s’agit de satisfaire les désirs égotiques de Papi et de son fiston adoré, la Senelec ne lésine jamais sur les moyens.

Autres errements phares de l’incompétence des dirigeants de cette entreprise, c’est la signature Jeudi 24 Janvier 2008, à Dakar, avec Norland Suzor, président-directeur général de la société suédoise Nykomb Synergetics d’une convention d’achat d’énergie de 25 ans d’un montant de 118 milliards FCFA pour la réalisation d’une centrale électrique à charbon à Sendou (Bargny) de 125 Mégawatt suivant la formule Build own operate. Cette formule permettait à la société suédoise d’investir et de s’approprier la centrale pendant une période donnée qui mettrait les citoyens à sa merci avant de la transférer à l’état. Une opacité totale couvre les suites de la signature de cette convention.
Les nominations et les limogeages à la tête de cette société sont l’objet d’affrontements féroces. Lorsqu’il fut limogé de son poste de directeur général de Senelec, Samuel Sarr en voulait littéralement à Macky Sall qu’il traitait "d’incompétent et de complexé. Les gens ont vu que j’ai beaucoup réalisé et le Premier ministre avec qui je ne m’entends pas du tout m’a fait la guerre", disait Samuel Sarr. Purs affabulations puisque les coupures avaient empiré sous sa direction. Pour l’occasion, "une clause léonine" (sujette à débat) lui offre gracieusement une prime de 400 millions FCFA avec à la clé une promotion au rang de ministre quelques semaines plus tard. Aujourd’hui, Mr Sarr évoque la clause léonine pour s’en prendre à l’ancien régime et masquer son incompétence à gérer le dossier scandaleux de GTI qui coûte selon ses propres termes 800 millions FCFA au contribuable chaque mois, soit une perte cumulée de 23 milliards FCFA. Samuel Sarr oublie que l’ancien régime a déjà été sanctionné pour ses erreurs. En plus, une clause léonine est de facto ineffective lorsque la partie fournisseuse se soustrait à son obligation contractuelle de remplir ses engagements. GTI est absente du circuit depuis Juin dernier. A qui est donc réellement destiné l’argent versé à GTI depuis l’incapacité de cette société à fournir du courant à Senelec?

C’est bien que ce ministre annonce un projet de loi sur la pénalisation de la fraude à l’électricité qui coûte à l’en croire 20 milliards FCFA aux contribuables, et un autre sur la défiscalisation de tout matériel relatif aux énergies renouvelables. Espérons que les releveurs véreux, les caissiers et cadres corrompus ainsi que les falsificateurs de compteurs de Senelec ne passeront pas par les mailles du filet. D’autre part, nous attendons de voir le profil de ceux qui vont importer le matériel défiscalisé relatif aux énergies non renouvelables.

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