Mercredi soir, ils ont validé la première étape de l’examen du projet de loi visant à autoriser Theresa May à lancer les négociations de sortie de l’UE, en votant par 498 voix contre 114 la prolongation de l’étude du texte devant la chambre des Communes la semaine prochaine.
Mais, au Parlement de Westminster, splendide édifice gothique aux plus de mille pièces, l’atmosphère était étrange. Les débats sont passionnés, parfois enflammés, mais le sentiment qui domine, c’est la résignation.
Plus des deux tiers des députés ont voté contre le Brexit lors du référendum du 23 juin 2016. Ils sont désormais devant un cas de conscience : refléter le choix de leurs électeurs ou suivre leur intime conviction.
« Pas d’autre choix »
La plupart, gauche et droite confondues, disent n’avoir « tout simplement pas d’autre choix »que d’appliquer la volonté du peuple, même lorsqu’ils ne sont pas d’accord.
« J’ai été un avocat passionné d’un maintien dans l’UE et j’y ai sacrifié ma place au gouvernement. Mais je défends tout aussi ardemment le fait que nous sommes une démocratie », explique l’ancien ministre des Finances George Osborne.
« J’ai voté contre le Brexit mais je vais approuver le projet de loi », autorisant le gouvernement à déclencher la procédure de divorce, acquiesce sa collègue travailliste Emma Reynolds. « Certains appellent ça de la couardise. Moi j’appelle ça la démocratie. »
Le Brexit ? « Une folie »
L’exercice n’est pas indolore. Pas évident de donner son aval à un processus dont on est persuadé qu’il mène à sa perte. « Même si j’accepte le verdict (des urnes), je crains que les conséquences ne soient catastrophiques pour notre économie et notre société », glisse la députée du Labour Margaret Beckett, visiblement torturée.
« L’Histoire ne sera pas tendre avec ce Parlement et ce gouvernement. Comment a-t-on pu offrir aux électeurs une alternative qui affaiblit notre nation ? Les générations futures vont nous maudire pour cette folie », s’émeut la parlementaire torie Anna Soubry, qui approuvera le texte avec « le cœur lourd ».
Certains députés europhiles n’y arrivent pas : consommer la rupture avec le continent est au-dessus de leurs forces et ce même si les électeurs de leurs circonscriptions ont massivement voté en faveur d’une sortie de l’UE.
Plusieurs rebelles travaillistes comptaient ainsi défier leur leader Jeremy Corbyn qui a appelé à approuver le texte.C’est notamment le cas de Paul Farrelly, élu de Newcastle-under-Lyme. « Je ne m’assieds pas sur le vote de la majorité. J’estime juste que dans ce cas précis la majorité à tort », dit-il.
« L’an de grâce 2016 »
« On lutte avec nos consciences, c’est dur », tranche l’ancien leader de l’opposition travailliste Ed Miliband avec gravité. Pour les eurosceptiques historiques, en revanche, c’est simple. Le jour de gloire est arrivé.
« Ce jour va entrer dans les annales de l’Histoire britannique comme celui où on aura entériné la décision noble, courageuse et glorieuse que le peuple a prise en ce jour légendaire du 23 juin de l’an de grâce 2016 », lance le député conservateur Jacob Rees-Mogg, réputé pour son lyrisme.
« Je n’aurais pas cru vivre ça de mon vivant », renchérit son collègue Peter Bone, extatique de voir le combat d’une vie prendre corps sous ses yeux.
« Totalement irresponsable »
À l’autre bout de l’échiquier politique, les nationalistes écossais du SNP n’ont pas plus de cas de conscience à gérer : tout comme les électeurs écossais, ils sont farouchement opposés au Brexit et voteront contre.
« Les gens pensent que la Chambre des Communes sait ce qu’elle fait mais tout ce qu’elle fait, c’est croiser les doigts en espérant que tout ira bien. C’est totalement irresponsable », grince le député SNP Angus Brendan MacNeil.
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