Contrairement à ce que l’on peut penser, l’Afrique de l’Ouest n’est pas une grande pourvoyeuse de migrant vers l’Europe. Au contraire, l’Europe reste une destination secondaire pour les migrants ouest-africains. C’est ce qui est ressorti de l’étude menée et présentée dans le cadre de la conférence internationale sur le thème «Migrations, Gouvernance et Développement en Afrique de l’Ouest: le temps de l’action». Une rencontre organisée par l’Institut Africain de la Gouvernance (IAG), la Coalition pour le Développement en Afrique et l’Initiative Prospective Agricole et Rurale (IPAR). La cérémonie d’ouverture a été présidée par le président de la République, Macky Sall.
L’Afrique refuse d’être considérée comme le point de départ des «vagues d’envahisseurs» de l’Europe et des autres continents. Au contraire, la sous-région ouest africaine est l’une des rares régions où la plupart des flux migratoires sont de type intra-régional et communautaire. «Les États membres de la CEDEAO sont aussi bien des pays d’émigration que d’immigration», note le document de cadrage de la conférence internationale sur le thème «Migrations, Gouvernance et Développement en Afrique de l’Ouest : le temps de l’action». À en croire les résultats des recherches présentés dans le document, sur «100 migrants ouest-africains, 70% restent en Afrique, avec 61% qui sont dans les pays de la sous-région». Seuls 30% de ces migrants sortent de l’Afrique pour se retrouver en Europe 15%, en Amérique du Nord 06% et les 09% dans divers pays.
Tout cela pour dire que, malgré le tapage médiatique, les migrations ouest-africaines vers l’Europe demeurent minoritaires et que «l’Afrique reste donc la première destination des migrants africains, avant l’Europe». Néanmoins les migrations à l’intérieur des frontières ouest africaines demeurent une problématique majeure avec l’exacerbation de l’exode rurale qui a vu la population urbaine de la sous-région passer de 10 millions à 128 millions en 45 ans. Un phénomène qui charrie de nombreux problèmes liés aux «facilités administratives, aux opportunités d’insertion économique et sociale, d’accès aux services sociaux et surtout de sécurité ou de respect des droits humains pour les migrants». Une situation aggravée par le contexte de crise économique, de changements climatiques et de menaces terroristes.
D’où l’objet de la rencontre, selon Abdoulaye Diané, président de l’Institut Africain de la Gouvernance, qui «s’inscrit dans la vocation de l’IAG et de la Coalition pour le développement en Afrique (CODA) à toujours susciter un dialogue politique de haut niveau sur les défis majeurs et les enjeux critiques de gouvernance et de développement dans notre continent». Il s’agit, à en croire M. Diané, de «lancer une initiative africaine, une initiative endogène pour pousser la réflexion et hisser l’action, sur ce thème, à hauteur des véritables enjeux dont les migrations sont potentiellement porteuses pour toutes les sociétés et pour chaque individu».
AVEC LES AMALGAMES, LES MIGRATIONS SONT PASSEES DE FAIT NATUREL PROFITABLE A UNE VERITABLE PREOCCUPATION…
Pour lui, les migrations demeurent un phénomène inhérent à la nature humaine et qui a besoin d’être encadré pour en tirer le meilleur profit pour le bonheur de toute l’humanité. «Les migrations sont un fait naturel, l’humanité a toujours été en mouvement. Et, c’est ainsi que nous avons pu, au fil du temps, peupler la terre, métisser et même nous mondialiser. Pour l’être social qu’est l’homme, pour les sociétés politiques qui forment les nations civilisées, vivre c’est bouger, c’est s’ouvrir, c’est aller vers les autres, accueillir chez-soi, c’est recevoir et donner. Vivre, c’est donc la rencontre féconde des autres dans l’incarnation des valeurs humanistes et de solidarité».
Une vérité malheureusement mise à rude épreuve par les conclusions hâtives et péremptoires qui ont tendance à mettre sur le compte des migrants tous les maux et défis de la gouvernance. «Les migrations croisent des défis de taille dans le développement et la gouvernance des états et du monde, notamment au plan politique, économique, social et culturel. Défis que nous avons très souvent vite fait d’imputer aux émigrants. Avec des amalgames tenaces seulement entretenues, les migrations sont passées de ce fait naturel, potentiellement profitable à l’humanité à un véritable sujet de préoccupation voire d’attention des États», a expliqué le président de l’IAG.
Autant de malentendus et jugements erronés qu’il urge de régler pour faire tomber les barricades politiques, psychologiques et physiques qui «font obstacle à une bonification des migrations dans l’entreprise de construction d’un monde simplement plus humain». Très optimiste, le président de l’IAG voit dans la prise en charge réelle de la question des migrations une opportunité pour régler les questions existentielles essentielles qui étreignent l’humanité et le monde. «En vérité, l’humanité fait face à des mutations profondes qui, parce que mal appréhendées, génèrent des défis qui fragilisent et compromettent finalement sa quiétude et son équilibre. Malheureusement, l’humanité dispose d’atouts majeurs qu’elle peine très souvent à transformer durablement en leviers pour se réaliser pleinement, se garantir un futur confortable. Justement, par les migrations, nous avons l’opportunité de poser et de régler la quête de sens d’un monde en pleine tourmente. C’est tout cela l’ambition de la conférence», a-t-il expliqué.
1 Commentaires
Anonyme
En Octobre, 2016 (19:39 PM)Participer à la Discussion