Quel terrible coup du destin ! C’est à la veille de la Fête de la musique que Mamadou Konté a tiré sa révérence. Tranquillement, hier à l’hôpital Principal de Dakar, Mamadou a faussé compagnie à ses camarades. Mais s’il pense n’avoir pas ainsi à jouer sa partition dans le cadre de cet événement musical, il s’est sûrement trompé : il en a déjà donné le ton. Mamadou Konté s’est éteint ce mercredi 20 juin dans la soirée après avoir, il y a moins de trois semaines, encore pris part à un grand séminaire sous-régional sur les stratégies de la lutte contre la piraterie et la contrefaçon des œuvres de l’esprit organisé sous l’égide du ministère de la Culture et du Patrimoine historique classé. On n’a pas fini de pleurer Sembène Ousmane, l’homme à la pipe, voilà qu’on pleure Mamadou Konté l’homme au chapeau.
C’est en 1978 que Mamadou Konté a créé le Festival Africa Fête à Paris afin de sensibiliser l’opinion à la condition des travailleurs immigrés en France. Il organise dans la foulée un premier concert avec entre autres Claude Nougaro et Pierre Akendengué. Le festival sera repris chaque année, et assurera la découverte de jeunes talents et leur développement de carrière. Parmi eux des célébrités actuelles comme Baba Maal, Manu Dibango, Touré Kunda, Kassav, Angelique Kidjo, Salif Keita, Ismaël Lo, etc. Huit années après a lieu une édition américaine du festival, réalisée en partenariat avec le célèbre label de Chris Blackwell qui a propulsé la carrière de Bob Marley : Island Records. Le festival Africa Fête Itinérant en Amérique sera vite un véritable succès et traversera ainsi une quinzaine de villes des Etats-Unis en 1998 rassemblant, selon plusieurs sources concordantes, plus de 120 000 spectateurs. Entre 1992 et 1995, Africa Fête a organisé des tournées en Afrique australe, et dans l’Océan Indien, notamment avec le soutien de l’Association Française d’Action Artistique (Afaa, ministère français des Affaires étrangères).
Homme de refus et fidèle à ses convictions de « retour au pays » pour assurer un développement africain endogène, Mamadou Konté, malien naturalisé sénégalais, implante ses activités à Dakar. Il y crée, dans le quartier Gibraltar, un lieu culturel indépendant majeur, la « Villa Tringa ». En 2001 et près après un moment de flottement, l’équipe relance le Festival Africa Fête à Dakar. En s’implantant dans la capitale sénégalaise ainsi qu’à Marseille, Africa Fête élargit ses activités à la production discographique, la formation professionnelle et devient très rapidement la tête de pont du réseau d’opérateurs africains réunis au sein de la structure « Circul’A ». Tringa Musique et Développement est la structure qui a porté les diverses activités d’Africa Fête, en particulier le projet de mise en place de la Cité Internationale de la Musique Africaine, lieu de formation, de création, de diffusion et de distribution, modèle de structuration du secteur musical en Afrique de l’Ouest.
Mamadou Konté a déposé son saxophone, aux héritiers de le prendre et de faire en sorte que le soufflé ne retombe jamais.
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