En France, le ministère public a requis ce lundi soir 1er avril cinq ans de prison ferme à l'encontre de Bernard Tapie pour « escroquerie » et « détournement de fonds publics » dans l'affaire de l'arbitrage controversé qui lui avait octroyé 403 millions d'euros en 2008 et qui a été annulé au civil pour « fraude ».
Pour l'accusation, l'arbitrage censé solder un vieux litige entre Bernard Tapie et le Crédit Lyonnais était « truqué ». Et l'homme d'affaires a été le « co-organisateur » de cette fraude et son « bénéficiaire principale », ont estimé les représentants du parquet, Nicolas Baïetto et Christophe Perruaux.
Au terme d'un réquisitoire de plus de quatre heures et demie, ils ont donc demandé une peine de cinq ans de prison ferme à l'encontre du patron du groupe de médias La Provence et ex-ministre, qui souffre aujourd'hui à 76 ans d'un double cancer, et appelé le tribunal correctionnel à ordonner la confiscation de l'ensemble de ses biens saisis.
Des peines symboliques
Le parquet a en outre requis une peine de trois ans d'emprisonnement avec sursis contre Me Maurice Lantourne, ancien avocat de Bernard Tapie et son « éminence grise », et trois ans de prison ferme à l'encontre du haut magistrat et principal rédacteur de la sentence arbitrale, Pierre Estoup, « à la solde » du duo.
Les représentants du parquet ne sont pas dupes : ces peines sont symboliques. Si elles étaient prononcées, il y a bien peu de chance qu'elles soient exécutées. « Dans les réquisitions, il y a une petite notion un peu particulière qui est celle de "possibilité d'exécuter une peine". C'est vrai que lorsqu'on est malade, lorsqu'on est âgé, souvent les peines ne sont pas exécutées. C'est le Code de procédure pénale qui le prévoit de façon très stricte, sous le contrôle d'un juge d'application des peines », commente Benoît Chabert, avocat des parties civiles.
« Néanmoins, symboliquement, il y a une recherche de sévérité parce que les finances publiques étaient en jeu. Il y a eu tout de même dans ce dossier un arbitrage truqué, avec un arbitre qui a fait croire qu'il était indépendant », rappelle Benoît Chabert.
Trois ans de prison requis contre Stéphane Richard
Contre l'actuel PDG d'Orange Stéphane Richard, qui était le directeur de cabinet de la ministre de l'Economie Christine Lagarde et qui a fait à celle-ci une « présentation tronquée » du litige lors de l'entrée en arbitrage en 2007, le ministère public a demandé trois ans de prison, dont 18 mois ferme, assortis d'une amende de 100 000 euros et d'une interdiction de toute fonction publique pendant cinq ans.
La même peine d'emprisonnement et la même interdiction a été réclamée à l'encontre de Jean-François Rocchi, ex-dirigeant du Consortium de réalisation (CDR), entité chargée de gérer le passif du Crédit Lyonnais et adversaire de Bernard Tapie lors de l'arbitrage. La relaxe a au contraire été requise pour Bernard Scemama, autre fonctionnaire également jugé depuis le 11 mars.
L'Etat et le CDR, parties civiles au procès, ont demandé le paiement solidaire de 525 millions d'euros de dommages et intérêts. Ils réclament en outre respectivement un million et 500 000 euros au titre du préjudice moral.
Les plaidoiries de la défense doivent débuter mardi matin et s'échelonner sur trois et éventuellement quatre jours. Le jugement n'est pas attendu avant plusieurs semaines.
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