Alors que les réseaux sociaux sont devenus le principal moyen de s’informer au Cambodge depuis 2017, selon une étude d’Asia Foundation, l’organisation Reporters sans frontières a publié un rapport mercredi 14 février qui décrit l’effritement de la liberté d’expression et d’information, trois mois après la dissolution du principal parti d’opposition et à moins d’un an des élections générales. Facebook y est nommé et est mis en cause par ailleurs du fait de son influence.
Au Cambodge, on dit parfois que Facebook est presque un synonyme d’internet, tellement les Cambodgiens l’utilisent. Mais comme le rappelle Reporters sans frontières(RSF) dans son rapport intitulé « Cambodge : La presse indépendante en ruine », une mise à jour du réseau social testée au Cambodge depuis octobre 2017 pose problème.
Le fil d’actualité principal se limite au contenu privé. Les contenus diffusés par les médias ou les pages publiques figurent désormais dans un fil à part, explorer. Il est moins instinctif de se rendre sur cette page, et les médias, les journalistes citoyens ou les ONG ont donc perdu en visibilité sur leur principal outil de communication. Cela au beau milieu d’une année électorale déjà tendue après la dissolution du principal parti d’opposition.
Une campagne électorale mesurée par les « likes », le Premier ministre en tête.
Le Premier ministre Hun Sen totalise plus de 9,5 millions de fans sur sa page. Il en a gagné 8 millions en deux ans dans un pays qui compte environ 15 millions d’habitants. Il est aujourd’hui le troisième leader mondial le plus suivi sur le réseau social. Pourtant, le chef d’Etat a longtemps été à la traîne sur Facebook. En décembre 2015, avec 1,9 million de likes l’ancien chef de l’opposition en exil Sam Rainsy comptait même 500 000 fans d’avance sur le Premier ministre.
La semaine dernière, Sam Rainsy a entamé une procédure judiciaire afin que Facebook donne accès aux données du compte de Hun Sen. L’opposant soupçonne la page du Premier ministre d’avoir enfreint la politique du réseau social à plusieurs reprises. Il s’agit notamment de vérifier l’origine des récents likes dont beaucoup viendraient en fait de comptes fictifs issus de fermes à clic en Inde ou en Thaïlande. Une pratique interdite par le réseau.
Sam Rainsy veut surtout déconstruire l’image de popularité du Premier ministre au Cambodge, enjeu de poids dans une société qui s’informe de plus en plus sur Facebook.
Le réseau social sert aussi à identifier les critiques
Facebook est un outil pour mesurer la popularité, mais pas seulement : le gouvernement est très attentif à ce qui est publié sur la page du Premier ministre ainsi que sur l’ensemble du réseau. Des hommes politiques ou de simples citoyens sont régulièrement accusés de diffamation ou d’injure après des publications critiques à l’encontre du gouvernement sur Facebook.
La semaine dernière, une Cambodgienne réfugiée en Thaïlande a été remise aux autorités. L’an dernier, dans un clip posté sur Facebook, elle lançait une chaussure sur un panneau du parti au pouvoir où figurait une photo du Premier ministre. Elle risque jusqu’à trois ans de prison pour outrage et incitation à la haine.
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