Le Sénégal a exigé samedi des «excuses sincères et publiques» du premier ministre canadien Stephen Harper pour l'accueil réservé au secrétaire général de la Francophonie, une affaire qui a jeté un froid sur une conférence de cette organisation à Winnipeg.
Le bureau de M. Harper à Ottawa a réagi à cette demande formulée par le chef de la diplomatie sénégalaise Cheikh Tidiane Gadio en déclarant que le Canada, par la voix de son ministre des Affaires étrangères Peter MacKay, avait déjà exprimé à Abdou Diouf ses «profonds regrets» pour ce «malheureux incident».
M. Diouf, un ancien président sénégalais, a dû subir une fouille à son arrivée au Canada mercredi, une «entorse fâcheuse» au protocole, selon son entourage. «L'annulation» d'un entretien de M. Diouf avec M. Harper, prévu au programme de l'Organisation internationale de la Francophonie (OIF), mais pas à celui des Canadiens, a également été la source d'incompréhension.
Le ministre sénégalais a exigé des excuses en pleine séance plénière de la conférence de la Francophonie qui s'est ouverte samedi dans la capitale de la province du Manitoba (centre), en présence de M. MacKay.
«Monsieur le Ministre (MacKay), nous aurions relativisé cet incident si - au lieu de présenter de simples regrets -, votre gouvernement avait promptement pris les choses en main pour diligenter une enquête», a-t-il dit lors de la séance selon le texte de sa déclaration diffusée par la délégation sénégalaise.
«Et si votre premier ministre avait, au nom de votre gouvernement, présenté des excuses sincères et publiques au président Diouf lui-même, à tous les membres de l'OIF, au peuple sénégalais et à tous leurs compatriotes africains», a-t-il ajouté selon le texte.
Interrogé par la presse sur ce que ferait le Sénégal si M. Harper refusait de présenter des excuses, M. Gadio a répondu : «nous prendrons acte».
«Cet incident est d'une extrême gravité pour nous. (...) Nous tenons à ce que l'ancien président du Sénégal soit traité avec déférence et respect et il n'a pas eu ce traitement», a-t-il ajouté.
L'opposition libérale canadienne a également exigé des excuses publiques de la part du gouvernement conservateur.
Des représentants des 53 pays et gouvernements membres de l'OIF, interrogés par l'AFP, ont regretté cette affaire venue «ternir» cette conférence de deux jours sur la prévention des conflits et la sécurité humaine.
«Cela a vraiment jeté un froid sur la conférence et je crois que le Canada devrait s'expliquer sur l'annulation à la dernière minute de la rencontre avec M. Diouf, qui est très grave», a dit un diplomate sous couvert de l'anonymat.
Lors de la cérémonie d'ouverture au collège universitaire francophone de Saint-Boniface, quartier français de Winnipeg, le secrétaire général de l'Onu Kofi Annan avait souligné, dans un message adressé à l'OIF, toute l'«importance qu'il accorde» à cette conférence, «au coeur de la réflexion de l'Onu».
M. Diouf a lui dit espérer que cette «première concertation interrégionale sur la sécurité humaine «marque un tournant dans une nouvelle dynamique de partenariat» avec l'Onu, notamment pour les opérations de maintien de la paix dans des pays francophones.
Des forces de maintien de la paix sont notamment déployées en Haïti, la Côte d'Ivoire, la République démocratique du Congo et le Burundi, pays membres de l'OIF, mais moins de 10 % de leur personnel est francophone.
Une vingtaine de ministres, dont une très grande majorité de ministres des Affaires étrangères de pays africains, assistent à cette conférence au Manitoba, une province anglophone qui compte moins de 50 000 francophones (4,5 % de sa population).
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