Deux jours après son élection à la présidence française, Nicolas Sarkozy peaufinait, hier, la composition de son gouvernement depuis un yacht à bord duquel il se repose à Malte, alors qu’à Paris le Parti socialiste tentait de surmonter ses divisions avant les législatives de juin. Pour la seconde nuit consécutive, de violentes manifestations anti-Sarkozy ont eu lieu à Paris et en province et plusieurs centaines de voitures ont été brûlées dans des banlieues.
Paris - L’un des proches collaborateurs de M. Sarkozy, Claude Guéant, a indiqué que le président élu, dont le retour à Paris est prévu jeudi, allait profiter de ses trois jours de repos pour "se préparer à sa fonction" et travailler "à la composition de son gouvernement" avant la passation des pouvoirs avec le président sortant Jacques Chirac le 16 mai.
Le gouvernement, dont la tête devrait revenir selon la presse à l’ancien ministre de l’Education et du Travail François Fillon, sera composé de "personnes d’horizons divers" avec peut-être même des "ministres de Gauche", a dit M. Guéant.
Une rencontre avec la chancelière allemande Angela Merkel est prévue "dans les plus brefs délais", pour "affirmer la force du couple franco-allemand" et "faire le point sur le processus de relance" du traité constitutionnel européen, selon M. Guéant. Laissant Jacques Chirac -son parrain en politique avec lequel il a choisi de marquer sa "rupture"- commémorer seul mardi à Paris la victoire de 1945 sur l’Allemagne nazie, M. Sarkozy s’est rendu, lundi en jet privé, sur l’île méditerranéenne de Malte.
Il y a embarqué avec sa femme Cécilia et leur fils Louis, 10 ans, sur un yacht de 60 mètres appartenant selon la presse à l’homme d’affaires français Vincent Bolloré.
L’escapade surprise du président élu -qui avait passé la nuit après son élection à l’hôtel de luxe Fouquet’s à Paris-, a suscité des interrogations dans les médias et des critiques à gauche. Le quotidien de Droite « Le Figaro » relevait mardi qu’"il y a une semaine, Nicolas Sarkozy était censé faire une +retraite+ dans le monastère bénédictin de la Pierre-qui-Vire, dans le Morvan", région reculée du centre de la France. "C’est un autre monde. On était prévenu. M. Sarkozy n’a jamais dit qu’il serait le président des petits pauvres. C’est le président du Cac 40 (principal indice boursier parisien, ndr)”, a déclaré le sénateur socialiste Jean-Luc Mélenchon.
Le Parti socialiste (Ps) dont la candidate Ségolène Royal a été battue sévèrement par M. Sarkozy avec plus de 53 % des suffrages, semblait toujours agité par des remous. Son bureau national s’est réuni lundi soir pour tenter de resserrer les rangs en vue des législatives des 10 et 17 juin.
Mais l’ancien Premier ministre Laurent Fabius, représentant l’aile gauche du parti mécontente de l’ouverture au centre opérée par Mme Royal, a maintenu mardi qu’il fallait "un vrai rassemblement sur des positions de Gauche". Un proche collaborateur de Mme Royal, Jean-Louis Bianco, a répliqué en estimant que malgré sa défaite, celle-ci était "absolument légitimée" par le scrutin et que son programme devait être "la base" des propositions défendues aux législatives.
Mme Royal a promis dimanche de "continuer" le combat, se posant implicitement en chef de son camp, mais les ténors du Ps, dont M. Fabius et le social-démocrate Dominique Strauss-Kahn, lui ont d’emblée contesté cette place, relançant le débat sur l’orientation -ancrage à gauche ou évolution vers le centre- du parti. Le chef du Ps, François Hollande, affaibli par la défaite de Ségolène Royal, sa compagne, a tenté de calmer le jeu en affirmant que c’était à lui qu’il incombait de "conduire la campagne des législatives". Il a par ailleurs lancé un appel au calme aux manifestants d’extrême gauche et anarchistes qui contestent dans la rue l’élection de M. Sarkozy, alors que plusieurs centaines de voitures ont aussi été brûlées, principalement dans les banlieues déshéritées théâtre d’émeutes en 2005.
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