Vingt ans après la signature de l’accord de Nouméa, la Nouvelle Calédonie est appelée dimanche à se prononcer par référendum sur son autodétermination, étape majeure du processus de décolonisation de cette collectivité territoriale du Pacifique Sud contrôlée par la France depuis 1853. Les 174.154 électeurs néo-calédoniens auront à répondre oui ou non à la question suivante dont l’intitulé a fait l’objet d’intenses discussions ces derniers mois : “Voulez-vous que la Nouvelle-Calédonie accède à la pleine souveraineté et devienne indépendante?”
Surnommée le “Caillou” et située à 16.000 km de la métropole, l’île dispose actuellement d’une large autonomie et reçoit chaque année quelque 1,3 milliard d’euros de financements de Paris. A deux jours du scrutin, les derniers sondages donnent tous une large victoire au camp du “non”, crédité de plus de 60% des voix mais les deux camps - indépendantistes et anti-indépendantistes - restent prudents.
A Paris, l’Elysée comme Matignon s’en tiennent à la ligne épousée par l’exécutif depuis le début du quinquennat dans ce dossier en assurant que l’Etat resterait “neutre et strictement neutre” jusqu’au jour de la consultation. Emmanuel Macron, qui avait lors d’une visite en Nouvelle-Calédonie en mai dernier souligné l’importance de ce territoire pour la France sans donner de consigne explicite pour le vote, a toutefois prévu de s’exprimer une fois les résultats connus.
Le Premier ministre Edouard Philippe sera quant à lui sur place lundi, au lendemain du scrutin, avec la ministre des Outre-mer Annick Girardin, “pour rencontrer l’ensemble des forces politiques, pour discuter de leur analyse des résultats de la veille et pour évoquer avec eux les conditions de l’après-4 novembre”.
“SORTIR DU CARCAN FRANÇAIS”
“C’est l’aboutissement de trente années d’engagement des parties aux accords de Matignon”, a dit le chef du gouvernement la semaine dernière à l’Assemblée nationale. “C’est aussi le début de la Nouvelle-Calédonie qui veut continuer sur le chemin qui a été tracé en 1988 et qui veut construire un avenir. Il faudra pour l’Etat et le gouvernement aider les forces politiques à construire cet avenir.”
L’organisation de ce référendum constitue le point d’arrivée du processus de décolonisation engagé par les accords de Matignon de 1988, conclus après une décennie de violences entre groupes kanaks (populations autochtones) et caldoches (populations essentiellement d’origine européenne). Ces accords ont été suivis par celui de Nouméa en 1998 conclu entre l’Etat, le FLNKS et les RPCR. Considéré comme fondateur, cet accord prévoyait qu’au terme d’une période de vingt ans “le transfert à la Nouvelle-Calédonie des compétences régaliennes, l’accès à un statut international de pleine responsabilité et l’organisation de la citoyenneté en nationalité” seraient soumis à référendum.
En cas de victoire du “non” dimanche, l’accord de Nouméa permet la tenue de deux autres scrutins du même type d’ici 2022 si un tiers des membres du Congrès le demande. Un scénario rejeté par le sénateur Les Républicains (LR) et président du Rassemblement (parti non-indépendantiste) Pierre Frogier qui a estimé cette semaine qu’”il ne servira à rien de poser la même question par référendum une deuxième et une troisième fois”. Dans le camp d’en face, Rock Wamytan, président du groupe UC-FLNKS au Congrès, a appelé sur Public Sénat à “sortir du carcan constitutionnel français” si “nous voulons former des cadres de haut niveau et faire en sorte que nous puissions librement gérer notre pays et nos affaires”.
Marine Pennetier, édité par Yves Clarisse
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