Le Pentagone a baptisé «Geronimo» l'opération destinée à capturer le fondateur d'al Qaida. Un choix incompris par les Américains d'origine indienne qui dénoncent la persistance des préjugés à leur égard.
Comme beaucoup d'Américains, la mort d'Oussama Ben Laden les as réjouis… Jusqu'à ce qu'ils apprennent le nom de code de l'islamiste. «Geronimo». 48 heures après la liquidation du chef d'al-Qaida, la communauté amérindienne n'en revient pas que le Pentagone ait baptisé la capture du djihadiste du nom du guerrier apache,figure de la résistance indienne au XIXe siècle. «Ce lien établi entre un des plus grands héros indiens et l'ennemi numéro un des Etats-Unis est inconvenant», a dénoncé la directrice du personnel du comité des Affaires indiennes au Sénat, Loretta Tuell. «Les références impropres à la culture amérindienne sont légions dans notre société. Les conséquences sont dévastatrices sur l'esprit des enfants», a déploré la responsable à l'agence de presse Associated Press.
La commission des affaires indiennes au Sénat a prévu, de longue date, jeudi un débat sur les stéréotypes racistes dont sont victimes les indiens. Loretta Tuell compte bien aborder le sujet «Geronimo». La haute fonctionnaire n'est pas la seule à être indignée. «Avoir un président afro-américain à la Maison-Blanche ne suffit pas pour surmonter deux siècles passés à traiter et à considérer les indiens comme les ennemis de la nation. Surnommer Ben Laden «Geronimo», c'est donner une claque aux Indiens», a ironisé l'éditorialiste de l'hebdomadaire Indian Country Today.
L'armée américaine aime emprunter au vocabulaire indien
Geronimo posant avec un fusil en 1887, un an après sa capture. Crédits photo : Ben Wittick/ASSOCIATED PRESS
Un militant amérindien, qui a servi dans l'armée américaine, a lancé une pétition pour obtenir des excuses de Barack Obama. «J'étais ravi que nous l'ayons attrapé et je me sentais vraiment américain. Puis soudainement ce nom de code surgit. Pourquoi s'acharne-t-on sur nous ? Le général de la guerre de Sécession Robert Lee a tué bien plus d'Américains que Geronimo, Hitler est le diable incarné mais on choisit Geronimo pour Ben Laden ?», s'est plaint au Washington Post un autre ex-marine d'ascendance cherokee. «Personne n'aurait trouvé acceptable d'appeler cette mission Mandela ou Ben Gourion», lui a fait écho un lobbyiste de la cause amérindienne. Sur internet également, les commentaires déçus affluent. «Qu'est-ce que c'est que ce putain de nom de code ?» s'exclame sur Facebook un jeune amérindien, dont le statut riche en jurons a retenu l'attention de la chaîne ABC. «Chers amis Amérindiens, nous avons tué des hommes du monde entier mais vous avez été les premiers», raille un utilisateur de Twitter.
La passion autour de cette appellation semble avoir surpris les autorités. Interrogé sur l'origine de ce nom de code, un porte-parole de la Maison-Blanche a renvoyé la question au Pentagone qui pour l'instant reste muet. Certains spécialistes des questions de défense estiment que «Geronimo» a été choisi car le chef indien s'est révélé pendant des années aussi insaisissable qu'Oussama Ben Laden. D'autres experts rappellent que l'armée américaine est coutumière des emprunts au vocabulaire indien : missiles tomahawk, hélicoptères apaches - tous les hélicoptères militaires sont d'ailleurs nommés d'après des tribus indiennes -. Crier «Geronimo» au moment de sauter a longtemps été une tradition chez les parachutistes. De même, deux unités de l'armée américaines ont adopté le patronyme du leader indien, né en réalité Goyahkla (celui qui baille).
4 Commentaires
Eredbgsss
En Mai, 2011 (16:23 PM)Kordior
En Mai, 2011 (16:41 PM)Undefined
En Mai, 2011 (17:47 PM)Mourid Djite
En Mai, 2011 (22:05 PM)Participer à la Discussion