L'homme d'affaires Ziad Takieddine, intermédiaire dans des contrats
d'armement et poursuivi dans l'enquête sur une présumée corruption lors
de la campagne présidentielle de 1995, a porté plainte contre
l'ex-Premier ministre Edouard Balladur, annonce son avocat lundi.
Il ne s'agit pas de mettre en cause ce dernier mais au contraire
de réorienter la procédure qui serait injustement fondée sur l'hypothèse
d'un financement illégal de la campagne Balladur de 1995, ceci afin de
mettre fin à la "rumeur", explique dans un communiqué Me Francis
Vuillemin.
C'est une nouvelle péripétie d'une affaire développée déjà dans
de multiples procédures et qui examine le scénario d'une possible
corruption massive en France, au Pakistan et en Arabie saoudite, sur
fond de contrats d'armement, de luttes entre clans de la droite
française en 1995 et avec un lien hypothétique vers un attentat ayant
tué 11 Français à Karachi en 2002.
Ziad Takieddine, intermédiaire franco-libanais, est mis en examen
car il est soupçonné d'avoir organisé le retour en France d'une partie
des commissions légales convenues en marge de la vente de sous-marins au
Pakistan (84 millions d'euros) et de frégates à l'Arabie saoudite (200
millions d'euros) dans les années 1990.
L'argent pourrait avoir alimenté en espèces les caisses de la
campagne d'Edouard Balladur, finalement éliminé au premier tour par
Jacques Chirac et le socialiste Lionel Jospin en 1995.
INSTRUCTION "DÉTOURNÉE"
Me Francis Vuillemin a déposé sa plainte à la Cour de justice de
la République (CJR), seule habilitée à traiter des délits imputés à des
ministres.
"A l'inverse des magistrats qui se sont emparés de cette
question, seule la CJR est compétente, selon la Constitution, pour
traiter une fois pour toutes cette rumeur vieille de 1996 et mettre
ainsi un terme aux errements de l'instruction dont les familles de
victimes de l'attentat (...) ne cessent de pâtir", écrit-il.
Selon lui, l'instruction du juge Renaud Van Ruymbeke a été
"détournée" pour mettre en cause Edouard Balladur et son ancien
porte-parole de campagne Nicolas Sarkozy, alors que "le sort réservé aux
commissions postérieurement à l'élection de Jacques Chirac a été
ignoré".
En fait, le juge Van Ruymbeke a déjà reçu l'autorisation d'enquêter
sur l'hypothèse d'une dérivation de l'argent "noir" des commissions
après 1995 vers des réseaux présentés comme proches du camp Chirac.
D'autres aspects sont explorés, notamment avec l'information
judiciaire pour fraude fiscale ouverte le 20 juillet contre Ziad
Takieddine, qui n'aurait payé aucun impôt depuis 2002 malgré une fortune
très importante, aujourd'hui saisie.
Ziad Takieddine est un proche du secrétaire général de l'UMP,
Jean-François Copé, ministre du Budget de 2004 à 2007, qui a admis en
septembre dernier s'être fait payer des vacances par l'homme d'affaires
au début des années 2000, tout en contestant toute implication dans les
malversations qui lui sont prêtées.
Thierry Lévêque, édité par Yves Clarisse
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