PR ABDOULAYE BATHILY, LEADER DE LA LD: « Wade est un colosse aux pieds d’argile »

L’As : Les résultats donnent largement victorieuse la coalition Bennoo Siggil Senegaal dans beaucoup de collectivités locales. Quelle est votre lecture ?

Abdoulaye Bathily : Comme première analyse, nous disons que le scrutin de dimanche dernier a été la démonstration du rejet par les populations de la politique désastreuse de Abdoulaye Wade et de ses méthodes de gestion. Il a mis en place un vaste dispositif de fraude en amont et en aval. Ce système de fraude a été exercé le jour du scrutin à travers la désorganisation volontairement mise en œuvre pour empêcher la transparence et la régularité des élections. C’est ainsi qu’il a été noté, sur l’ensemble du territoire national, des retards dans la mise en place du matériel de vote, les votes multiples, le transfert des électeurs, la prolongation du vote jusque tard dans la nuit. Malgré tout cela, l’opposition et les populations fortement déterminées sont parvenues à faire respecter leurs suffrages. Grâce à leur détermination, elles ont réussi à annihiler beaucoup de cas de fraude. Le raz-de-marée de la coalition Bennoo Siggil Senegaal aurait pu être beaucoup plus manifeste n’eût été les manœuvres d’Abdoulaye Wade et de son régime. Cela dit, c’est l’occasion de saluer la maturité du peuple sénégalais qui, sans verser de sang, sans mettre à feu le pays, a su s’opposer à une politique destructrice.

Qu’est-ce qui explique cette bérézina qu’a connue le régime libéral ?

Il y a plusieurs facteurs dont la politique anti-populaire exercée par le pouvoir, une gestion partisane du pays, une gestion provocatrice avec un président de la République qui nargue ses concitoyens, les piétine, foule aux pieds les lois. C’est au mépris de la loi que Abdoulaye Wade a mobilisé tous les moyens de l’Etat et battu campagne pour des élections qui ne le concernaient pas. Et les images de cette pseudo tournée économique diffusées en boucle par la Rts ont cristallisé les frustrations de l’opinion. Ensuite, les populations qui triment pour joindre les deux bouts ne comprennent pas l’arrogance, l’indifférence de cette caste de nouveaux riches. Enfin, sa décision d’imposer son fils a envenimé la situation. Avec le rejet d’Abdoulaye Wade, c’est la tentative de succession monarchique qui a été désavouée. Ce gosse qui était à la recherche d’une légitimité qui lui permettrait d’accéder aux plus hauts sommets de l’Etat sait ce qui l’attend. Il a été armé par son père pour s’attaquer à l’opposition et décréter qu’elle n’existe plus. La réponse la plus pertinente est venu des bureaux de vote de l’école Franco-arabe. Les populations ont tenu à démontrer qu’elles restent solidement attachées aux formes républicaines de l’Etat, à la bonne gouvernance, à une gestion saine des affaires. Ce qui n’est malheureusement pas le cas. Aujourd’hui, Abdoulaye Wade et son clan ne récoltent que ce qu’ils ont semé.

Concrètement, est-ce que vous vous attendiez à ce raz-de-marée?

 Evidemment ! Nous savions que les Sénégalais étaient avec nous. Il nous fallait simplement renforcer le niveau de résistance des populations aux techniques de fraude pensées, élaborées par le pouvoir en place. La volonté du régime de frauder était affichée partout. Cela s’est manifesté par la désorganisation constatée dimanche dernier. Des choses de ce genre sont dépassées. Le ministre de l’Intérieur, Cheikh Tidiane Sy, aurait dû démissionner. En 1996, quand de nombreux dysfonctionnements ont émaillé les élections locales, le Président Abdou Diouf avait démis le ministre de l’Intérieur de l’époque, Abourahmane Sow de son poste. Pour le moment, nous devons nous concentrer sur l’essentiel et suivre attentivement tous les développements qui ne manqueront pas de survenir car nous avons affaire à des gens qui vont imaginer toutes sortes de contentieux. Abdoulaye Wade qui prédisait la fin pour l’opposition se retrouve aujourd’hui par terre. Il est un colosse aux pieds d’argile. Désormais, il n’a aucune leçon à donner à qui que ce soit.

Est ce que vous êtes conscients des responsabilités qui pèsent désormais sur vos épaules ?

 Nous sommes tous conscients des attentes placées en eux et nous nous attellerons à servir fidèlement et loyalement les populations.