En requérant dix ans de prison contre Modibo Diop et ses co-prévenus, le procureur de la République accentue la pression sur eux. Même si la défense plaide la relaxe, les parties civiles réclament 10 milliards de dommages et intérêts.
Le procureur de la République ne veut pas le sortir du four où il est mis depuis presque quatre ans. Hier, il a requis 10 ans contre l’ex-directeur général de l’Agence sénégalaise de l’électrification rurale (Aser). Il a demandé la confiscation des biens de M. Diop et de ses présumés complices.Le réquisitoire est sans appel et vise une peine lourde. «Ce dossier est un scandale financier extrêmement grave», renchérissent les avocats des parties civiles (Aser et Etat du Sénégal). Ils ont réclamé aux prévenus la somme de 10 milliards de francs en termes de dommages et intérêts. Une addition de soucis qui risque de prolonger le séjour carcéral de Modibo et compagnie.
«Rocambolesque», le dossier n’entrouvre pas de porte de sortie à Modibo Diop et ses co-prévenus. La journée d’hier était dédiée aux plaidoiries. Selon Me Samba Bitèye, n’eut été la constatation de la Banque mondiale, l’argent mis à la disposition de l’Etat du Sénégal allait être détourné. Pour ce conseil de l’Aser, l’argent attribué par les bailleurs n’a pas été destiné à l’objectif auquel il a été assigné. Il soutient que M. Diop s’était retrouvé au cœur d’une «nébuleuse» et n’avait pas l’intention de remplir sa mission. Selon toujours Me Bitèye, l’ancien directeur de l’Aser a trouvé à son arrivée dans cette structure, un programme social économique et politique mis en place par l’Etat du Sénégal. Lequel avait pour but l’électrification d’une série de villages par l’Aser. Mais en lieu et place, M. Diop a mis un programme parallèle dénommé «villages spéciaux». Et c’est avec l’argent dégagé par l’Etat du Sénégal qu’il a entrepris l’électrification de ces villages dits spéciaux. Alors que les sources de finances allouées par l’Etat ne pouvaient pas servir et développer un autre programme. De son avis, ce détournement d’objectif suffit pour caractériser les délits de détournement de deniers publics, d’escroquerie et de faux usage de faux reprochés aux prévenus.
10 milliards de dommages et intérêts
Me Félix Sow, avocat de l’Etat, parle de mal gouvernance qui date depuis l’indépendance et qui interpelle tous les citoyens. «Nous devons nous ressaisir et refaire le pays dont la moitié de la population est pauvre», invite-t-il. A en croire l’ancien Bâtonnier, l’argent public a été utilisé pour financer des activités politiques. Il a été aussi reproché à Modibo Diop de détournement de chèque retiré. Le modus opérandi est sans équivoque. Me Bitèye en a fait la démonstration. « Pour payer un fournisseur fictif, ils prennent un reçu vierge qu’ils photocopient. Ils le remplissent en mettant le nom du bénéficiaire du marché. Et après l’avoir rempli, ils photocopient à nouveau ce reçu qu’ils vont joindre au dossier de l’Aser afin de le rendre impeccable. Ensuite, le chèque original est rempli à la même date au nom de Abdoulaye Diop. Ce qui lui permet de retirer l’argent pour le compte de Modibo Diop sans laisser des traces», relate l’avocat. Par ce procédé, un préjudice de 5 milliards a été d’abord reproché à Modibo Diop et ses acolytes avant que l’expert ne le ramène à 477 millions de francs. Insatisfaits de cette expertise, ils ont sollicité une contre expertise. Ils estiment que ni le juge d’instruction ni le rapport d’enquête ne permettent de faire un rapport. Les avocats des parties civiles sont d’avis que l’expert Laye Dramé est complice.
«Dossier politique»
Pour eux, Modibo et Cie ne leur doivent pas seulement 477 millions de francs. Le Parquet déplore également le manque de sérieux de l’expert dans la tâche qui lui a été confiée alors que 780 millions ont été dépensés, informe-t-il, pour des études. Il en conclut qu’il s’agit d’une association de malfaiteurs bien huilée. Le Parquet a aussi déploré l’absence de procès-verbal ayant permis la réalisation des travaux. Et dès l’instant que les conventions ne sont pas homologuées par la tutelle, le Procureur est convaincu du délit de détournement. Il y a, dit-il, un changement de la destination des fonds.
Selon Me Demba Ciré Bathily et ses confrères, Modibo est une double victime. Il y a 96 millions utilisés par Aliou Niang qui ont été imputés à Modibo, dira Me Maïmouna Dièye Diène. Les avocats de M. Diop trouvent en outre que les procès-verbaux de réception ne pouvaient pas être disponibles «parce que leur client était en prison au moment de l’enquête». «Ce dossier est politique et haineux», crache Me Bathily. Pour eux, Modibo a été abusé par son directeur financier. Tous les avocats de la défense estiment que les délits de détournement de deniers publics portant sur la somme de 477 millions, de faux et usage de faux, reprochés à Modibo Diop, Ibrahima Dieng et Pape Diallo et celui de complicité reproché Abdoulaye Diop, Ma Anta Thiam et Thioune ne sont pas constitués malgré le préjudice. Question : Qui a alors pris cet argent que les accusés estiment tous avoir remis à Modibo Diop ? Prévu le 17 septembre, le délibéré apportera les réponses. En attendant, Modibo Diop reste toujours coincé entre les… fils de l’Aser.
6 Commentaires
Wou2uop
En Août, 2013 (15:16 PM)Paranoya
En Août, 2013 (15:34 PM)Lipo
En Août, 2013 (15:50 PM)Woyreiozoy
En Août, 2013 (16:09 PM)Deug
En Août, 2013 (23:08 PM)Thiop
En Août, 2013 (08:33 AM)Participer à la Discussion