Style décontracté, anecdotes succulentes, Oustaz Alioune Sall est un prêcheur unique en son genre. Avec l’ancien attaquant, il n’y a pas de rhétorique sur la théologie, juste une pédagogie à mourir de rire.
Entre deux formules, Oustaz Alioune Sall est du genre à choisir la plus douce et la plus succulente pour faire passer son message. Loin des prêches à la Taïb Socé qui font trembler l’assistance, lui entraine son monde dans un rire fou. Un style décontracté qui a fini de s’imposer dans le milieu austère des prêcheurs sénégalais. Avec lui, c’est la fameuse ‘’Castigat ridendo mores’’, c’est-à-dire corriger les mœurs en souriant.
Ainsi, des anecdotes croustillantes, il en a à la pelle. A commencer par sa propre personne. Par exemple, le jour où son ami Lamine Thiam a dépassé un camion sur une ligne continue. Le gendarme l’arrête et lui fait remarquer qu’il s’est rendu coupable de conduite dangereuse. Au-lieu de plaider en faveur de Lamine, Oustaz Alioune Sall dit au gendarme : ‘’Il faut y ajouter l’excès de vitesse’’. Hilarité générale !
Pour faire du Alioune Sall, confie le concerné, il faut un peu de Serigne Abdou Lahat Mbacké, de Serigne Cheikh Tidiane Sy Al Maktoum et d’El hadj Ibrahima Sakho. Autrement dit, il faut de la sagesse. « Ce sont ces trois styles différents que j’ai voulu incarner, la synthèse », confesse le prêcheur. Chez Oustaz Alioune, la pédagogie et l’humour font bon ménage. Ainsi, pour inciter les célibataires à se marier, il déclare : ‘’à chaque fois que vous vous réveillez et que votre caleçon est mouillé, c’est que Dieu vous a envoyé un message pour vous demander de vous trouver une épouse’’.
Oustaz 4 4 2
Alors que ses collègues préfèrent ne rien savoir du sport, Oustaz Alioune Sall lui aurait pu aider l’entraineur Aliou Cissé à confectionner la liste des 23 Lions devant participer à la Coupe d’Afrique des nations. L’enfant de Darou Thioubou évoque régulièrement des systèmes de jeu comme le 4 4 2 ou le 4 3 3. Mais ce n’est pas un hasard chez cet amoureux du ballon rond. Ses moustaches abondantes ne le laissent peut-être pas deviner, mais l’ancien attaquant de pointe aurait pu être à la place d’un El Hadji ou Sadio Mané. ‘’A me voir marcher, vous vous rendez automatiquement compte que j’étais un grand joueur de football. Il faut demander à Mayacine Mar ou Séga Sakho, ce sont eux qui me connaissent’’, se glorifie-t-il.
Démarche sobre, barbe et chevelure blanchâtres, la silhouette plongée dans de grands boubous, Oustaz Alioune Sall présente tous les atours d’un prêcheur sénégalais. Si certains dévoilent volontiers leur âge, Oustaz Alioune Sall lui entretient le mystère autour de sa date de naissance. Sa philosophie est simple : tout comme la jeunesse, la vieillesse aussi est un état d’esprit.
« Nogaye », un symbole
Oustaz Alioune Sall, c’est aussi Nogaye, cette cousine, symbole de la femme sénégalaise à qui le natif de Tialé (Mbacké), fait porter toutes les tares de la gente féminine. En fait, chez lui, le côté pratique l’emporte sur la théorie. Loin des références théologiques assez techniques et parfois difficiles à comprendre pour les profanes, l’homme choisit les raccourcis empreints de sagesse. Une attitude qui ne vient pas ex nihilo, puisque dans une ‘vie antérieure’, le prêcheur à la radio Sud Fm a été enseignant de la langue arabe. Sa carrière le mène tour à tour à Mbacké, Saloum, Louga, Keur Mbarik, Niaré Touba Ndiaye, Daka...et pas seulement.
Sortir des sentiers battus n’a pas été une sinécure pour lui. En mettant les pieds à l’étrier en 1997, à la radio Dunya, il s’aventurait sur un terrain fortement conquis par des grosses pointures de la bande Fm comme El Hadji Moustapha Guèye, Ahmed Bachir Kounta, El Hadji Moustapha Sarr ou encore Taib Socé, dans une moindre mesure. Il fallait donc se différencier pour s’imposer. Et c’est la ligne que, d’emblée, s’est fixé le jeune prêcheur d’alors, Alioune Sall.
« Père Noël »
Entre Oustaz Alioune et l’école française, c’est une histoire de : « je t’aime, moi non plus » ! « Je n’ai passé que 3 jours à l’école française. Mon école portait le nom de Serigne Modou Awa Balla ou quelque chose comme ça ». Un souvenir vague qui traduit le peu intérêt que l’élève du ‘’Professeur Djiby’’ a accordé à ‘’l’école des Blancs’’. Oustaz s’empresse d’ailleurs de préciser qu’il ne regrette guère d’avoir déserté les bancs.
Pour lui, la ligne à suivre était clairement tracée : l’apprentissage du Saint Coran. Et c’est cette quête qui le mobilise d’abord dans le Saloum, ensuite à Tialé, puis à Mbacké Baol, creusets de savoirs islamiques.
Contrairement à beaucoup de prêcheurs de sa génération, Oustaz Alioune n’a jamais étudié en dehors du Sénégal. « Si j’avais un regret à nourrir, ce serait de ne pas être sorti du pays pour renforcer mes connaissances religieuses », confie Oustaz Sall. Ce qui lui vaut peut-être les critiques acerbes d’Ahmed Khalifa Niass, qui le classe dans « une catégorie primaire » et lui donne le sobriquet, ‘‘père Noël’.
Politiquement engagé
Mais attention ! Chez Oustaz Alioune Sall, les surnoms ne passent pas ; il ne badine pas avec. « Je n’en ai jamais eu et je refuse d’en avoir. C’est haram », coupe-t-il net. Polygame de son état, ce Baol-Baol d’origine (et fier de l’être) a 13 daaras à son actif. Son objectif est clair : « mettre sur pied de véritables complexes d’éducation islamique, avec toutes les commodités et alléger aux parents leurs charges scolaires ».
Pendant longtemps, des « arabisants » ont décrié leur exclusion des sphères de prises de décisions. Un prédicateur politiquement engagé, ça ne court pas les rues. Comme pour changer la donne, Oustaz Alioune se fait investir sur la liste du Mouvement de la réforme pour le développement social (Mrds), lors des législatives de 2012.
Mais il s’est arrêté à la porte l’hémicycle, la faute à la loi sur la parité, qu’il ne cesse de maudire. ‘’Que Dieu ait pitié de la parité, c’est elle qui m’a pris mon poste de député’’, disait-il plein d’humour. Toutefois, l’aventure n’a pas été vaine, puisqu’il a pu se consoler d’une nomination au Conseil économique social et environnemental. De quoi exhausser son éternelle prière : Que Dieu nous accorde le meilleur, vous l’accorde et nous donne des poches bien pourvus. Amine !
11 Commentaires
Mohammed
En Mai, 2019 (19:42 PM)Du
En Mai, 2019 (19:51 PM)Il n’a aucune culture religieuse
Aicha
En Mai, 2019 (20:14 PM)Sk
En Mai, 2019 (21:13 PM)Bilal
En Mai, 2019 (22:42 PM)C'est très méchant de voir aujourd'hui des anciens politiciens perdus ou aventuriers déchus se rabattre sur la religion et tirer sur eux.
Lemou
En Mai, 2019 (23:03 PM)Reply_author
En Novembre, 2021 (21:20 PM)Reply_author
En Novembre, 2021 (21:20 PM)Participer à la Discussion