Le pèlerinage juif de la Ghriba a débuté vendredi sur l'île tunisienne de Djerba, sous haute surveillance et ponctuée de retrouvailles, de chants et de danses.
Des centaines de pèlerins se sont rendus dès le 11 mai à la synagogue de la Ghriba – la plus ancienne d’Afrique – pour se recueillir, formuler des vœux et faire la fête. « Entre 2 500 et 3 500 visiteurs sont attendus cette année », d’après les autorités tunisiennes. Beaucoup de Tunisiens, mais aussi des personnes venant de France, d’Italie, des Etats-Unis ou encore d’Israël pour l’occasion.
Un regain d’affluence
« Cette année, j’ai l’impression que ça redémarre », nous confie Fatma, une djerbienne de 43 ans, à l’intérieur de la synaguogue. C’est la première fois depuis longtemps que je vois autant de monde, et on en attend encore plus dimanche », pour le dernier jour du pèlerinage.
Un « retour en force » des pèlerins et des visiteurs également annoncé et constaté par René Trabelsi, fils du dirigeant de la communauté juive de Djerba (Perez Trabelsi) et directeur du tour-opérateur Royal First Travel. Ce qu’il explique en partie par un « rétablissement de la confiance vis-à-vis de la Tunisie et une amélioration de son image au niveau international ».
La plupart des pèlerins, venus de Tunisie ou d’ailleurs, veulent croire en des jours meilleurs
A l’intérieur de la synagogue, des hommes et des femmes de tous âges défilent dans la salle de prière, allumant des cierges et déposant des œufs dans une petite cavité au fond de la salle. La tradition veut que les jeunes filles cherchant à se marier ou à avoir un enfant y écrivent leur vœux au feutre sur la coque avant de les déposer dans la cavité où les œufs durciront avec la chaleur des bougies.
Déborah, une mère de famille venue de Paris avec ses trois filles, vérifie l’état de tout un sachet qu’elle avait déposé la veille. Sur ses œufs, on peut y lire « santé », « mariage », « bébé », accompagné du nom de la personne concernée. « J’en ai fait un pour moi et pour mes filles bien sûr, pour ma sœur, deux de mes nièces et quelques-unes de mes collègues qui n’ont pas pu venir à Djerba », explique-t-elle. « Aujourd’hui tout le monde, même des musulmans, veut faire un vœu parce qu’ils se réalisent ! » ajoute-t-elle en souriant. Ce que ne contredit pas Gérard : « La dernière fois qu’on est venus il y a 13 ans, ma femme avait déposé trois œufs. Aujourd’hui, j’ai trois enfants ! »
Et la plupart des pèlerins, venus de Tunisie ou d’ailleurs, veulent croire en des jours meilleurs. Ouzifa, 62 ans, né à Djerba et installé en France n’a « pas raté un seul pèlerinage ». Pour lui, ce pèlerinage 2017 « est un bon cru ». « On observe un retour de la confiance. A travers ce pèlerinage, on veut démentir les rumeurs et la mauvaise image liées au terrorisme. D’ailleurs j’ai moi-même été surpris cette année par le dispositif sécuritaire mis en place autour de la synagogue et sur le reste de l’île. Il faut revenir, l’endroit en vaut la peine ! »
Un « baromètre touristique et sécuritaire »
De fait, la sécurité semble au rendez-vous. Un hélicoptère survole le site, des fouilles et des contrôles sont régulièrement effectués et les visiteurs doivent passer par un portique de sécurité à quelques mètres de la Ghriba. Des dizaines de policiers, militaires et agents de la brigade antiterrorisme (BAT) veillent également à la sécurité des lieux. « Il doit y avoir autant de policiers que de pèlerins ! » blague un homme à l’entrée. « C’est bien, c’est rassurant », répond son voisin.
La Tunisie aussi est en marche !
L’événement est religieux, mais aussi touristique. Car plusieurs personnes venant pour la première fois en profitent aussi pour découvrir le reste de l’île, voire du pays.
« Ce pèlerinage, c’est un baromètre à la fois touristique et sécuritaire », explique à Jeune Afrique Olivier Poivre d’Arvor, ambassadeur de France en Tunisie. « On a rassuré et on rassurera encore, et l’objectif maintenant c’est de faire venir et revenir les touristes, notamment français, en leur montrant qu’il y a beaucoup plus au pays que ses plages. »
« Il est important pour nous de récupérer aussi nos Tunisiens à l’étranger, qu’importe leur religion », a ajouté la ministre tunisienne du Tourisme et de l’Artisanat, Selma Elloumi Rekik.
Et c’est surtout à l’issue du dimanche 14 mai, dernier jour de pèlerinage pendant laquelle une forte affluence est attendue, qu’un premier bilan pourra être tiré. « Pour ceux qui en douteraient encore, la Tunisie aussi est en marche ! » conclut Olivier Poivre d’Arvor.
1 Commentaires
Anonyme
En Mai, 2017 (17:19 PM)Participer à la Discussion