Ainsi donc, suite à l’enlèvement de deux de tes soldats au sud du Liban, j’écris bien deux, tu en es rendu à détruire, à brûler et à tuer de pauvres innocents dans un Liban déjà aux prises avec des forces étrangères malicieuses. D’où te vient donc ce droit de tuer ainsi, impunément, sans remords et sans retenue? Ce droit absolu qui te fait tuer absolument, est-ce vraiment toi?
Te vient-il de tes puissants amis des États-Unis, eux-mêmes enfoncés dans la mort jusqu’au cou en Irak? De la force incomparable de tes armes, lesquelles tu refuses à tes adversaires? De la certitude absolue que tu as acquise en tuant impunément alors que tu dénonces ces terreurs chez les autres? Tu tues quatre ou cinq ennemis pour un seul de tes morts. Cela ne te rappelle-t-il pas ton histoire récente où ce sont les tiens qui étaient tués? Ce droit te vient-il d’un pouvoir divin que toi seul, comme peuple élu, tu possèdes? Dis-moi donc d’où te vient cette facilité d’agir ainsi dans le mal et, en même temps, implorer la pitié sur toi, toi la victime des terroristes. N’as-tu pas assez connu la peine, la misère et la mort depuis ces quatre mille ans où on crie ton nom?
Pourquoi, après Gaza, détruire les infrastructures du Liban: ponts, routes, autoroutes, centrales électriques, aéroports, etc. Pour deux soldats prisonniers de tes adversaires? Pour quelques roquettes insignifiantes, par rapport à ta riposte et à tes propres bombes, injustement lancées sur ton territoire? Ne leur jalouses-tu pas plutôt leur industrie touristique naissante? Leur pénible relève économique? Leur sympathie auprès de la communauté internationale? Pourquoi le Liban tout entier et non pas que les cryptoterroristes bien ciblés du Hezbollah? Veux-tu éliminer un concurrent économique aussi faiblard soit-il?
Ces deux prisonniers aux mains du Hezbollah au Liban et cet autre à Gaza, pourquoi ne négocies-tu pas de les échanger contre quelques prisonniers du Hezbollah que tu détiens par centaines? Pourquoi ne pas prendre cette voie plutôt que celle de la force illusoire que te donne ta suprématie armée? Ne sais-tu donc pas que chacune de tes balles de fusil, que chacun de tes obus, que chacune de tes bombes ne sont que des graines de haine mise en terre qui feront pousser des forêts de vengeance et des lacs de sang?
Ne sais-tu donc pas que le temps et les murs que tu construis pour te cacher ne sauront jamais te protéger? Tu te crées des terroristes pour légitimer tes assassinats, tes spoliations, tes destructions et tes exactions alors que tu es maintenant le plus fort. Mais demain Israël, demain ou après demain, le seras-tu encore? Pourquoi ne vois-tu pas dans l’âme et le cœur des Libanais, dont tu tues les maris, les femmes et les enfants, dont tu détruis les villes et l’économie, que tu pousses dans les bras de la Syrie haletante, monter la haine que tu sèmes pour l’éternité?
Ce sont mes amis et mes parents que tu tues là bas. Que tu blesses et que tu mets à la rue aussi. Que tu humilies et que tu prives de vivre en humain digne de ce nom! Moi je vis ici. À l’abri. Mais c’est aussi moi que tu vises et que tu atteins. C’est aussi moi que tu blesses et que tu fais rager. Moi qui défends ton droit d’être. Moi qui supporte toutes les tempêtes en expliquant tes raisons auprès des amis. Moi qui, avec beaucoup d’autres, se mettons les nôtres à dos pour toi, Israël.
Mais aujourd’hui, je ne comprends pas tes attaques destructrices, que tu sais parfaitement inutiles, sur le Liban de mes rêves et de mes amours. C’est pour cela que je te demande de m’expliquer. Explique-moi!
Bien sûr tu souffres aussi. Bien sûr il y a les Palestiniens. Bien sûr il y a eu l’Holocauste. Bien sûr tu dois te défendre. Mais comment tout cela te donne-t-il un tel droit à un tel abus de pouvoir? Il ne te reste que quelques appuis. Bush et Blair, Harper ici. Mais quelle est donc leur légitimité? Bush et Blair seront demain des monstres du passé que le tribunal international convoquera. Mon premier ministre est un malheureux pee-wee politique inexpérimenté aux bottines trop grandes. Mes ministres québécois, sourds à mes appels, ignorent même où se trouve Beyrouth. Ils ne voient que Washington et encore, ils la voient à genoux. Que me reste-t-il donc à faire? J’implore tes amis à te rendre à la raison. J’implore ta diaspora à intervenir pour t’éclairer. Surtout, celle d’ici si habile et si présente dans les universités et les journaux.
Dis-moi Israël, toi qui est riche et forte, toi qui es puissante et sévère, combien de vies encore prendra-tu pour tes deux soldats prisonniers au Liban? Ou cet autre à Gaza? Combien de mal feras-tu autour de toi avant de comprendre toute la haine qui monte contre toi sur cette planète? Quand donc auras-tu une âme et un cœur pour te guider? Quand donc pourras-tu m’aider à encore pouvoir t’aider?
Israël, Israël entends-tu ma voix dans ce désert de feu et de sang qui te transforme en assassin que l’Histoire attend? Israël, Israël, je t’appelle et je t’implore, négocie et oublie cette drogue que ta force militaire te donne. Elle n’est qu’illusion. Israël, Israël tu peux encore être la plus grande. Israël, ISRAËL, m’entends-tu?
Denis Gaumond
Ex-professeur chargé de cour ÉNAP et Université de Montréal, Directeur de service à l’UQAM
1 Commentaires
Allons Y Molo
En Octobre, 2010 (18:36 PM)Participer à la Discussion